dimanche 10 juin 2012

UN PRENOM, C'EST TOUTE UNE HISTOIRE

"Je m'appelle..."
Ecrire sur son prénom, voici le thème du jour.

........................................................................


On m’appelle Rose. En réalité, je m’appelle Rosa. Comme pour beaucoup de personnes de ma génération, mon nom de baptême me vient de mes ancêtres. Ce qui est surprenant, c’est que contrairement à la tradition, je n’ai pas de second et encore moins de troisième prénom. Née Rosa, en France on m’a toujours appelée Rose. Pour ma famille et un petit cercle d’amis je suis Rosette, et maintenant mamie Rosette. Côté administratif, je suis bel et bien Rosa, fille d’Italiens, j’ai été baptisée sous ce nom à New York où mes parents avaient émigré, dans une petite église de Little Italy, près de Washington square…


Rosa, Rose, ce prénom me plaît beaucoup, je trouve qu’il me va bien. Et aujourd’hui encore, figurez-vous. Ça existe bien des fleurs dont les pétales sont chiffonnés !?
Mon prénom est assez rare. Je ne connais personne d’autre s’appelant ainsi et je n’ai rencontré qu’une seule Rose-Marie. Par contre, des Solange, Madeleine, Raymonde, Micheline…
Même si j’aime mon prénom, j’aurais rêvé de porter celui de ma mère : Eléonora. C’est doux, follement distingué et cela lui allait à ravir. Ou bien, celui de ma voisine d’école : Liliane. J’enviais beaucoup ce prénom, probablement parce que je l’associais à cette petite fille superbe, riche et toujours très bien habillée les jours de distributions des prix.
Un souvenir me revient. Lorsque jeune femme j’ai travaillé non plus dans la couture qui ne rapportait pas assez pour nous faire vivre mais derrière un guichet les hommes qui venaient et connaissaient mon prénom, arrivait au guichet en chantant ce refrain d’antan :
Ah, mademoiselle Rose !
J’ai un petit quelque chose
À vous offrir
Ce n’est pas grand-chose
Mais ça vous fera toujours plaisir
Ce que j’ai pu l’entendre cette rengaine-là !

Rose

......................................................................................................


Je m’appelle Mireille, prénom de Marseille qui rime avec merveille, soleil et miel.
Je devais m’appeler Marie-Claire mais cela ne plaisait pas à mon père. Mireille étant un diminutif de Marie, prénom de mes grands-mères, ce fut adopté.
Ma maman aimait ce prénom depuis son plus jeune âge, elle aurait voulu le porter à la place du sien qui ne lui plaisait pas. Son père qui chantait souvent avec une voix de ténor des airs d’opéra lui faisait entendre ces couplets tirés de l’opéra Mireille : « Mireille voici le soleil, c’est le printemps, c’est l’éveil ». Ma mère pour ces cinq ans avait reçu en cadeau l’une de ces petites poupées que l’on appelait mignonettes. Elle lui donna le doux nom de Mireille. La poupée surmonta vaillamment deux inondations sans parler des deux guerres. Je l’ai conservé à mon tour avec soin, renouvelant sa garde-robe lorsque le besoin s’en faisait sentir.
Mon père, gravement malade, avait été hospitalisé quelques semaines avant ma naissance. Il voulait retourner chez lui pour ma venue mais voyant que son état s’aggravait il écrivit juste après ma naissance au crayon au dos d’une carte adressée à ma mère ces mots : si je ne reviens pas, embrasse tous les soirs notre fille sur le front pour moi.
Il rendit l’âme le lendemain, j’avais quatre jours. Jamais il ne put me tenir dans ses bras. Ma mère tint la promesse qu’elle lui avait faite. J’ai souvent relu ces quelques mots d’attention pour moi que mon père avait écrits.
Je devais être l’espoir d’une vie nouvelle pour mes parents en remplaçant un peu mon frère et ma sœur disparus un an et demi plus tôt à deux jours d’intervalle. J’ai finalement dû aussi remplacer mon père et essayer de distraire une mère inconsolable.
Quoiqu’il en soit, j’aime mon prénom et j’en suis fière. Parfois, on m’appelle Myriam, autre diminutif de Marie, mais c’est pour rire… Je fus Mireille, Mireille je suis, Mireille je reste.

Mireille

...........................................................................................................


Je m’appelle Colette et j’en suis très satisfaite. Ce n’est pas pour me vanter mais une publicité, qui m’était envoyée pour ma fête, m’a révélé toutes mes qualités. Pour attirer le client, rien de mieux que les compliments !
Il faut le reconnaître, voir écrit noir sur blanc que ma force tranquille et ma liberté de pensée suscitent l’admiration m’a remplie d’étonnement et de bonheur. On ne m’avait jamais dit ça ! Mais aussitôt, moi qui suis selon cette étude réfléchie et fine observatrice, je ne peux m’empêcher de me dire que leur sens du business est poussé un peu trop loin. Et s’ils croient me prendre dans leur filet, ils se trompent.  Car, et c’est encore eux qui le disent, je n’accepte pas qu’on me dicte ma conduite. Alors qu’ils n’attendent pas que je me précipite dans leurs magasins pleine de reconnaissance. La flatterie me ferait plutôt l’effet inverse. Et comme enfin, ils disent que j’avance selon mes idées et mes envies, c’est effectivement de cette façon que je fais mes achats.
A part cela, pourquoi mes parents ont-ils choisi ce prénom pour moi , Peut-être était-il à la mode au moment de ma naissance ou bien, ma sœur s’appelant Nicole, Colette leur a paru s’imposer comme un complément, reconstituant le prénom ancien de Nicolette et faisant de nous des sortes de siamoises. Souvent aussi, il était d’usage de donner au nouveau-né le nom d’un saint, le plaçant ainsi sous sa protection. Et pour tout dire, je suis heureuse de m’appeler Colette plutôt que Barbe ou Gudule, par exemple.

Colette

........................................................................................................



Je m’appelle Christiane…. Mot que petite j’avais bien du mal à prononcer. Je m’appelle Cracrane, disais-je alors. Vers trois ans, je disais encore à tout va : « je m’appelle Cracrane ». Un jour ma mère m’a reprise « Ecoute, tu n’es plus un bébé et tu peux très bien prononcer ton nom », ce que je fis d’ailleurs immédiatement car je savais sans problème articuler ces quatre syllabes.
Ensuite, à l’école primaire où les institutrices nous appelaient par nos prénoms, j’étais la seule à porter celui de Christiane. Etrange. Je me plaignais auprès de mes parents : « pourquoi m’avez-vous appelée ainsi ? Je suis la seule à porter ce prénom, les autres s’appellent Jacqueline, Jeanine, Michelle ou Monique, c’est plus joli et surtout plus à la mode. » Vraiment, je n’aimais pas mon prénom.
Au catéchisme, chaque fois qu’il m’interrogeait le prêtre n’oubliait pas de me dire que j’avais de la chance de porter le nom du Christ, c’est-à-dire le nom de chrétienne. Pourquoi une chance ? Les autres sont chrétiennes autant que moi. En quoi un prénom pouvait-il me rendre plus chrétienne que les autres. J’avais bien du mal à m’appeler ainsi.
Un jour, une camarade m’interpela : « Tu viens jouer avec nous Cricri ?! » Ce surnom me plut aussitôt. Je trouvais qu’il m’allait à ravir et l’adoptai avec plaisir. Il me suivit au collège et au lycée.
En famille, personne ne m’appelait Cricri. Les professeurs encore moins qui nous donnaient du Mademoiselle ou bien nous interpelaient : Brossard, que savez-vous sur…
Quand j’ai commencé à enseigner, nous nous appelions mutuellement madame ou mademoiselle, c’était plus simple. Ce n’est qu’à l’âge de la retraite où, engagée comme bénévole dans diverses associations, je me suis à nouveau entendu appeler Christiane. Et j’ai commencé à aimer ce nom.
En communauté, nous nous appelions aussi par nos prénoms et étions très attachées à nous souhaiter notre fête. Quand je suis arrivée à Gentilly, l’une des premières questions que l’on m’a posée a été de savoir la date de ma fête. J’ai répondu que je n’en savais trop rien, et que l’on m’avait toujours fêté la sainte Christine, le 22 juillet, car il n’y a pas de Christiane sur le calendrier. Mais les pensionnaires voulaient une vraie fête à mon vrai nom. C’est ainsi qu’une sœur est revenue un jour avec une image dénichée chez un marchand de souvenir près de Notre-Dame, à l’effigie et relatant l’histoire de ma sainte patronne.
Je vous le dis tout de suite je n’ai nullement envie d’imiter cette sainte d’un autre âge. Je n’ai pas ces ambitions comme je n’ai pas celle de devenir poète, je veux juste mettre bout à bout des mots du fond du cœur, des mots qui font du bien à ceux que je côtoie, à ceux que je rencontre. Je n’ai pas non plus la prétention de devenir artiste, j’ai simplement envie de mettre mot à mot, après les phrases tristes, les phrases gaies qui se bousculent dans mon esprit. Je n’ai pas la prétention de plaire à tout le monde mais je suis des vôtres et avec mes mots je voudrais dire « Aimons », non pas en paroles mais en actes, car la vie sans amour n’est pas la vraie vie. Christiane ou pas !

Christiane

.....................................................................................


Mon nom est personne !
Mon prénom en aucune façon ne résonne
Sur l'écorce des platanes et des chênes
Et pourtant c'est dans cette enfance que m'enchaîne,
Que ce prénom, pas si courant à l'époque,
Plus d'une moitié de siècle se moque,
De savoir si je l'aime ou j'apprécie ses prédications,
Qui m'annonçait une claudication !
Mais que diable ! Pourquoi avoir choisi un tel prénom ?
Et pourtant ? Et pourtant ! Aurais-tu trop apprécié maman,
Les charmantes « pattes de mouche » de Colette, la libertine ?
Eternelle amoureuse des sentiments, d'un romantisme aérien et intime
Femme-gémeau à la double personnalité, sensible jusqu'au bout de sa plume,
C'est une ode à la vie, à travers les lignes transparaissent le soleil et la lune...
Délicatement, de son œil averti, elle décrypte la complexité d'une liaison,
Elle n'en explique pas pour autant les raisons...
Nous sommes libre de ressentis, libre de nos implications.
D'un paysage, elle fait un tableau de maitre, au bout de son pinceau,
Et de la robe soyeuse de ses chats entourant son cou, comme un fourreau !
Elle en ronronne de plaisir et de ses yeux lumineux, elle croque la vie divine.
Alors, était-ce pour moi, maman, que Colette a écris toutes ces "Claudine" ?

Claudine




Aucun commentaire: