Un
dernier virage, le péage, nous voilà presque arrivés ! Encore quelques
minutes, nous nous arrêtons sur le bas côté de la route, en surplomb sur la
vallée. D’un seul coup d’œil, j’embrasse ce paysage que je suis venue
contempler. Là, en contrebas, la rivière déborde de son lit. Elle s’étale à son aise
dans les champs et se prélasse langoureusement. Un vent léger soulève ses eaux
d’un blanc laiteux. Comme des cibles dispersées au gré des flots, le soleil rasant l’horizon, perce les rides de la
surface, les irisant de couleurs chatoyantes. Les arbres, plantés ça et là sur
la prairie recouverte, semblent se hausser sur la pointe de leurs racines pour éviter
de disparaître complètement sous les flots à moins que ce ne soit pour mieux se
regarder dans leur miroir. Les barrières blanches délimitant les enclos, tels
des naufragés, s’agrippent à leurs
troncs rugueux. Et le reflet des branches dénudées donne une impression
d’immensité où nul troupeau ne peut plus paître.
De
l’autre côté de la rive, la ville est là, endormie. Et les derniers rayons de
l’astre dorent les pierres grisonnantes des trois clochers qui s’interpellent
par nuages interposés.
- «Oui,
je suis le moins haut et le plus ancien, je date de l’époque romane. Avez-vous
remarqué mon tambour cylindrique percé de si jolies baies d’où s’égrènent
parfois de si magnifiques musiques ? Voyez
comme il est original, couronné d’une flèche à écaille en forme de « pomme
de pin » ! Et j’ai vécu tant de moments heureux avec toutes ses dames dans
mon abbaye !»
-
« Moi, je suis gothique », dit le deuxième, «je suis celui de la
Cathédrale, bien placé au centre de la ville, mais je n’ai pas eu ta chance car des incendies m’ont abîmé ! Ma flèche devait être reconstruite et atteindre cinquante
huit mètres! Avec ces guerres de religion, elle est restée tronquée! Alors pour
me protéger des intempéries, je me suis coiffé d’une coupole en cuivre qui me
donne un charme si particulier ».
- «Et
moi aussi, je suis gothique» s’écrie le troisième «mais ma flèche à
crochets, pur joyau, flamboie vers le ciel et resplendit dans le soleil. Perché
sur mon éperon rocheux, je domine la ville même si les hommes m’ont mutilé, amputant
mon église de la moitié de ma nef».
Et,
dans le soir qui tombe, les clochers continuent
à se raconter :
- «Toi,
petit clocher, ton quartier a souvent les pieds dans l’eau comme en ce moment».
- «Oui,
mais regarde, mes habitants sont prévoyants et conservent précieusement de
longs madriers pour y cheminer ».
Mon
regard se porte un instant sur la longue rangée de maisons aux façades bleuies
par la brume qui s’élève. Elle marque la limite de la berge disparue.
La
Cathédrale rétorque :
- «Moi,
je les ai toujours serrés près de mon cœur, je les ai nourris et protégés.»
De
fait, s’offrent à ma vue, les masses sombres de l’ancien cloître, les toits
penchés, gris sombre du vieux marché et de la mairie et tout près, dans
l’entrelacs des maisons anciennes, je
devine le clocheton arrondi du beffroi de l’échevinage. Mes yeux suivent les
toits qui cachent dans leur enchevêtrement, les toutes petites ruelles qui
serpentent.
Il me
semble entendre le clocher me chuchoter :
- « Regarde
comment accrochées à la colline, elles grimpent jusqu’au Capitole. »
Et en
écho, la flèche flamboyante semble répondre :
-
« Ici aussi, nos venelles courent à flanc de coteau. De combien de
pèlerins allant à Compostelle n’ai-je pas guidé les pas ? Nos maisons
anciennes les ont logés et restaurés.»
Je
regarde un peu plus sur la droite : au milieu du vallon, une large tache
sombre. Je la scrute davantage et je décèle quelques gradins arrondis de pierre
grise. Ah oui ! Ce sont les ruines de l’amphithéâtre romain.
Mais le
soleil s’est couché. Les lumières de la ville
s’allument, détournant de nouveau, mon regard vers la rivière. A leur
tour, les réverbères s’y réfléchissent. J’aperçois quelques barques amarrées au
quai. Je distingue alors le pont où circulent quelques rares voitures et tout à
côté, la passerelle qui mène du quartier central au Jardin Public. Une lune,
toute ronde se lève jetant une lumière blanche qui éclaire ce paysage et le
transforme. De nouvelles ombres se forment dans la pénombre. Mais il se fait
tard. Je frissonne et quitte à regret mon promontoire.
Marie-Thérèse
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Paysages corses
Même si
l’on a parcouru le monde, il y a certains paysages qui restent gravés dans nos
mémoires.
Ainsi la
vision du grand canyon la première fois où je me suis rendue aux États-Unis, je
me suis trouvée si petite appuyée contre un immense séquoia pour la photo.
Bien plus
près de nous se trouvent aussi des lieux superbes qui conjuguent la mer, la
montagne et la campagne.
Dans une
forêt, des chemins tortueux bordés de châtaigniers et de noyers, et si l’on
prend un peu de hauteur s’étend en contrebas un océan de verdure. Les villages
sont escarpés, y poussent des orangers, des vignes entre les vieilles maisons
délabrées. Sur la place de l’église :
des bancs où les vieux se réchauffent au soleil et se racontent toujours les mêmes
histoires de leur jeunesse, la soupe aux châtaignes et le fromage de brebis à
tous les repas. Sur les routes en lacets qui mènent à la mer, les voitures et
les autocars ralentissent. On devine les plages de sable fin et au loin une
petite plage de cailloux noirs. La roche est partout au bord de l’eau. Tout en
haut d’une falaise se trouve une maison dont on se demande comment elle a pu
être construite et qu’on aimerait visiter ne serait-ce que pour sa vue
panoramique sur la mer. La capitale laborieuse a ses heures de travail et ses
heures de sieste, au sommet d’un grand escalier trône la statue de l’enfant du
pays.
En
sortant, en prenant un petit train appelé « la rafale » on traverse
une forêt d’eucalyptus, fraîche et odorante qui donne aussitôt envie de revenir
un jour.
Je me
souviens d’une fête dans l’un des villages où des hommes aux visages masqués
défilent enchaînés. C’est terre de tradition et de soleil, bien que l’hiver
dans les montagnes de l’arrière-pays il neige et gèle à pierre fendre.
Des
écrivains, des poètes et des peintres ont loué ce magnifique pays qui mérite
bien son nom d’Île de Beauté.
Rose
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Quelque part au sud
La garde
est montée par la Madone qui domine la ville. C’est elle qu’on prie à genoux,
qui sourit et pardonne chez nous. Elle a revêtu ses beaux habits d’or sur
lesquels se reflètent les rayons du soleil. Dans le port, les bateaux, les
barques, sont alignés en attendant le départ.
Comme elle
est jolie la ville avec son port et ses calanques.
Elle
est née selon la légende d’une histoire d’amour. Protis, chef d’une expédition
grecque demanda amitié au maître de ces lieux. Celui-ci préparait une fête afin
de trouver un mari à sa fille, le trouvant sympathique il l’invita à se mêler
aux prétendants. La jeune fille choisit Protis en lui offrant une coupe remplie
d’eau. Ravi de ce choix, le père donna à son gendre un territoire pour y fondre
une ville « massalla ».
Cette ville
vous invite au voyage sur l’un de ses bateaux blancs. Une petite brise apporte
à nos narines un doux parfum de thym, d’ail et de romarin. On se souvient de l’histoire
de la sardine qui avait bouché le port,… elle est si délicieuse une fois grillée.
Que dire
de plus : qu’il est bien dommage que tous ces crimes commis viennent
assombrir ce joli paysage ensoleillé qui ne devrait être que calme et beauté.
Toi, la
bonne mère, tu souris sans rien dire, mais à ton regard bienveillant on veut
croire que tout va s’arranger.
Bien sûr,
vous avez reconnu ce paysage où chantent les cigales et où cuit à petits
bouillons la bonne bouillabaisse.
Mireille
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En Dordogne
La vigne
de tonton Pierre, dont il était si fier, donnait un vin qui était une vraie
piquette. Heureusement que le soir, il y avait la bonne soupe de tata Martinaud
où avaient mijotés les légumes du jardin depuis tôt le matin sur un coin de la
grosse cuisinière.
Il nous
fallait bien ça pour nous remettre de nos nombreuses visites dans cette
magnifique région, riche d’Histoire. Tout le long de la Vézère, il y a des
kilomètres de grottes, de rivières souterraines, sinueuses et profondes.
Les
hommes ont laissé des traces que nous découvrons peu à peu et qui nous
permettent de recréer leur univers et leurs façons de vivre. La nature aussi
nous surprend et nous éblouit avec les stalactites et les stalagmites, les
concrétions de toutes formes, dont les pointes, avec la lumière noire, ressemblent
à des diamants.
Agitation
dans les chemins et bruits dans les collines et, au fond, le grand calme que
même l’eau des rivières ne trouble pas.
Quelle
jolie maison ils possédaient ces gens qui nous avaient pris en amitié sur le
lieu-dit « La Vergnassade », un nom qui chante. La cheminée de cette
maison se reflétait dans l’eau de la rivière où était amarrée leur petite
barque et où, des milliers de libellules abandonnaient leurs ailes bleues à la
fin de leur vie si brève.
Au pays
de la bonne cuisine, on ne perdait pas de temps. Pendant que la boulangère
plumait une grosse oie blanche, régal du futur repas, la bonne odeur de
l’énorme biscuit à la cuillère qui cuisait dans le four se rependait dans tout
le quartier.
Des
visites encore, des musées, des châteaux, encore aussi des grottes et le mur du
« grand roc » qui surplombe la rivière principale qui s’appelle…
peut-être la connaissez-vous ?
Il y a
aussi cette terre de pierres sèches et de chênes rabougris au pied desquels on
trouve des trésors. Une terre où il faut revenir souvent.
Monique
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Grand Canyon
Ombres gigantesques qui envahissent tes
parois, comblent tes galeries et la nuit créent l'effroi. Comme un grand tapis,
qui t'enveloppes comme un manteau de fraicheur et pénètre au plus profond de
ton cœur et de tes os. Il occulte tes yeux jusqu’aux premières lueurs de
l'aube. Tu te caches dans une renfoncement de la roche et d'une fissure te
parvient un petit filet d'eau rougeâtre et saumâtre. Il s'écoule le long d'un
mur abrupt s'élevant à la verticale.
Cette superbe nature indomptée encore à ce jour, mais si attirante dans son ingratitude t'aurait-elle donné des ailes pour élever ton esprit loin au-dessus de ces gorges profondes ? Spectacle lunaire accidenté aux multiples circonvolutions et mouvements de terrain, où cheminées de brique rouge surplombent un désert d'argile cuit par le soleil ardent. Toute à la contemplation de ces sinueuses et encaissées vallées, tu n'aurais pu t'empêcher d'en prendre une photo et de l'envoyer à ta famille pour leur faire partager ton bonheur.
Tu te retrouves, pauvre errante enfermée dans un labyrinthe dont les parois infranchissables et les galeries interminables te troublent l'esprit et t'amènent à repasser là où tes pas t'ont déjà mené !
Cette superbe nature indomptée encore à ce jour, mais si attirante dans son ingratitude t'aurait-elle donné des ailes pour élever ton esprit loin au-dessus de ces gorges profondes ? Spectacle lunaire accidenté aux multiples circonvolutions et mouvements de terrain, où cheminées de brique rouge surplombent un désert d'argile cuit par le soleil ardent. Toute à la contemplation de ces sinueuses et encaissées vallées, tu n'aurais pu t'empêcher d'en prendre une photo et de l'envoyer à ta famille pour leur faire partager ton bonheur.
Tu te retrouves, pauvre errante enfermée dans un labyrinthe dont les parois infranchissables et les galeries interminables te troublent l'esprit et t'amènent à repasser là où tes pas t'ont déjà mené !
As-tu encore le cœur et les forces
d'admirer cette beauté sauvage et brute comme un diamant ? Tu commences à
ressentir les prémices de la fatigue et du désarroi. Tu as abandonné et laissé
derrière toi ton sac à dos qui pesait tant sur tes épaules contenant la seule
bouteille et les victuailles que tu aurais pu garder près de toi pour te ravitailler
et te désaltérer, mais pour combien de temps ?
T'aurait-elle doté de racines
suffisamment longues pour se glisser subrepticement entres les anfractuosités
des rochers, te permettant ainsi d'accéder à cette eau pure tant convoitée ? Au
lieu de cela, tu dois te contenter de poser tes lèvres à-même la roche sous un
filet d'une eau ocrée, presque rouge à certains moments, chargée de cette terre
ferrugineuse rougeoyante au soleil !
Tes forces te quittent, toi l'intrépide
jeune femme, celle qui croyait obstinément dans sa bonne étoile. Tu t'épuises
encore à vouloir te rafraîchir avant de t'écrouler, lasse, si lasse sous ce
soleil de plomb qui darde ses rayons au plus profond de cette terre couleur feu
!
Mais la volonté farouche de vouloir
rester en vie et de te sortir de cette situation te permettrait-elle de
répondre par de faibles gémissements aux appels lointains ? T'aurait-elle
permise, toi la jeune femme insouciante, il y a encore quelque jours si
vaillante de te maintenir en vie coûte que coûte ? Douterais-tu de ton ouïe
quand te parvient au loin le chant des clochettes d'un troupeau de chèvres
venues brouter les herbes fraîches dans un oasis sortant de nul part ?
Serait-ce ta raison qui t'abandonnerait ? Serait-ce tes yeux brûlants de fièvre
qui te joueraient des tours, t'inventeraient des mirages ? En douterais-tu en
essayant de suivre le ballet des oiseaux de proie et des vautours loin
au-dessus de toi, dans les cieux, empruntant les courants ascendants dans la
quête d'un éventuel repas ?
Pauvre jeune fille épuisée et amaigrie,
n'entends-tu pas l'aboiement de joie de ton chien, celui que tu as rabroué à
tort, tant ta détresse et ta fatigue se faisait insupportable ? Celui qui t'as
fui quand tu le chassais injustement et qui sans rancune vient à ta rencontre ?
Pauvre jeune femme, maîtresse de ton
chien et de toi-même, tu étais, maintenant tu n'es plus que l'ombre de
toi-même... Ne sens-tu pas la caresse tiède et humide de la langue de ton
berger allemand sur ton pauvre visage desséché par le soleil et les larmes ?
Comme un fétu de paille, des hommes à la
peau tannée par le soleil, aux yeux légèrement bridés et aux cheveux noirs et
lisses te soulèvent et t'emmènent vers leur village à de longues heures de
marche sous un soleil radieux et brûlant.
Tu apercevras bien plus tard le sourire
bienveillant de ta sœur et de ton beau-frère veillant sur toi. Ils sont venus
de loin, inquiets et prévenant le danger, ils sont parti à la recherche
d'indices prouvant ton passage. Ils ont longuement marché, ramassé ton sac, tes
effets et sont remontés à toi grâce à l'expérience de pisteur de ces bergers
vivant dans ces régions arides, mais surtout grâce à la tendresse et à l'amour
partagé que tu voues à tes proches. Le message que tu as envoyé de ton portable
t'a sauvé, jolie jeune femme libre et indépendante.
Serais-tu prête à te lancer dans une
nouvelle aventure ?
Claudine
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Au sommet d’une falaise de bord de mer,
se dresse une tour de guet en ruines. On y accède péniblement, par un vague
sentier encombré d’épineux, depuis un long contrebas qui surplombe un petit
port de pêche et de plaisance accessible par une route en lacets. Ce port est
entouré de restaurants où l’on pousse la chansonnette et où l’on peut déguster
une somptueuse bouillabaisse à la langouste.
La place centrale de ce bourg présente la
singularité de servir de parvis commun à deux églises se faisant face :
l’une de rite grec et l’autre de rite latin. En raison de la pénurie de
vocations, c’est un même prêtre –le père Clément- qui officie
alternativement : un dimanche sur deux revêtu de la tenue de curé et
l’autre dimanche de celle de pope. Dans l’église grecque, on peut admirer une
majestueuse iconostase qui fut naguère restaurée par des experts venus de
Russie et s’affichant comme des émules du médiéval Andrei Roublev.
Retournant à la tour de guet qui
chapeaute le bourg, on pourra balayer du regard un vaste panorama côtier
ponctué dans le lointain par d’autres érections analogues, lesquelles
s’intègrent à un cordon littoral en des emplacements consécutifs tels que
chacune soit visible d’au moins une précédente et une suivante, pour la
transmission de proche en proche de signaux d’alerte.
En contrebas du bourg, mais du côté
opposé à son port, s’étire en forme de croissant une superbe plage de sable
fin, ce qui est une rareté sur cette côte essentiellement rocheuse. A chacune
des extrémités de cette plage s’est formé un petit bassin naturel, propice aux
ébats balnéaires des enfants.
Ceux-ci pourront, par ailleurs, s’adonner
au ramassage des « yeux de sainte Lucie ». Ce sont des opercules
discoïdes sécrétés par un coquillage. Chaque pièce présente une face bombée en
couleur et à l’opposé, une face plane nacrée affichant une spirale au graphisme
parfait. Les joaillers locaux en font bon usage.
Donnant directement sur la plage se situe
un petit hôtel faisant pension et fonctionnant en famille de façon
quasi-autarcique. Le chef de famille, pêcheur de métier, est aux fourneaux
après avoir à l’aube relevé ses filets de pêche, puis dans la matinée soigné le
bétail en pâture aux alentours. Son épouse gère l’hôtel en conjonction avec des
cousines qui font le ménage et ses deux enfants qui assurent le service au
restaurant et au bar. Les grands-parents vont cueillir, entres autres, la
verveine pour les infusions. Les clients trouveront parfois dans leurs
assiettes des produits de montagne, notamment de la charcuterie provenant de la
chasse au sanglier ou de la truite pêché à la ligne.
Quittant ce site attrayant et progressant
sur une distance de l’ordre d’une quinzaine de tours de guet, on débouche sur
un chapelet de magnifiques plages s’étendant au pied de hautes dunes de belle allure,
mais avec un arrière-pays chaotique et désert, contrastant avec le rivage
enchanteur. Ce dernier servit au tournage de scènes du débarquement de
Normandie dans le film Le jour le plus long, avec une manifeste conséquence
écologique sur le plan local.
En effet, les vedettes et le personnel
participant au tournage, étant de peau délicate, risquaient d’être incommodés
par les piqures de moustiques. Aussi fit-on un surabondant usage
d’insecticides. Il s’ensuivit une rupture de la chaîne alimentaire : les
insectes ayant été éliminés, moururent d’inanition les insectivores et, par
contrecoup, leurs prédateurs… au grand dam des chasseurs ainsi privés de
gibier.
Emmanuel
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Provins
C’est une
ville chère à mon cœur car elle est chargée d’histoire, de la grande Histoire
mais aussi un peu de mon histoire…
Ville importante
au moyen-âge, située au carrefour des routes menant au nord vers les Pays-Bas
et au sud vers l’Italie et l’Orient.
Lorsqu’on
arrive par la petite gare, se dirigeant vers le centre-ville, on traverse d’abord
une rivière qui serpente aux pieds des remparts, puis par les petites rues on
arrive à l’église Saint-Ayoul, très intéressante avec son portail orné de
statues colonnes, près de l’hôtel de ville. Puis, traversant cette fois la
Voulzie, on passe par le quartier des petites maisons mitoyennes réservées aux
militaires, car c’était une ville de garnison. Empruntant des rues en pente, on
arrive au couvent des Cordelières, anciennement hôpital général qui tenait lieu
d’hospice pour les personnes âgées. De cette hauteur, on a une vue panoramique
sur la roseraie, la rose de Damas étant la spécialité de cette ville. Alors, il
faut traverser les jardins Garnier pleins de charme et monter jusqu’à la place
de Châtel où se tenaient les grandes foires régies par les comtes de Champagne.
Elle est bordée de vieilles maisons à colombage. À la grange aux dîmes, superbe
bâtiment restauré où l’on peut voir reconstitué avec des mannequins l’échoppe
du changeur, du potier, du marchand de grains et de celui de tissus précieux
venus d’Italie. On se trouve alors au pied de la tour César et de l’imposante
église Saint-Quiriace. Enfin, on quitte la ville par la porte Saint-Jean qui
abrite aujourd’hui le syndicat d’initiative et sa boutique de souvenirs.
Vous l’avez
reconnu cette ville, c’est Provins.
Colette
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En ce frais dimanche matin de fin janvier,
sur sa placette, l'angelot, sans aile et sans voix, en parti, les jambes
repliées sous son fessier, trône sur son piédestal de pierre surplombant le
bassin d'une fontaine vide.
Petit béret blanc neigeux sur ses
cheveux frisés, il laisse sa frêle épaule verdâtre disparaître sous un léger
nuage floconneux. En premier lieu, apparaît le bec du canard cachant en
partie son beau visage d'ange. Puis en s'approchant et en le contournant, on
découvre de bonnes joues rondes et pleines dans lesquelles se détachent des
yeux sans paupière. De même, un regard sans pupille s'élève loin, très loin,
vers le ciel laiteux. L'enfant de bronze semble inaccessible
Tout occupé à retenir le volatile dans
ses bras croisés sur son thorax, ses petites mains potelées étreignent le long
cou du col-vert tentant de s'échapper, l'expression des yeux de l'enfant ne
présentent aucune expressions !l'enfant de bronze semble inaccessible !
Sous les flocons tourbillonnants,
le vert-gris vieillissant de ses bras nus et graciles disparaît sous la chemise
flottante aux multiples plis. Celle-ci souligne la taille semblable à celle
qu'aurait pu porter "Gavroche" dans les "Misérables" de
Victor Hugo. Une culotte courte s'arrête aux genoux, peut-être en dessous,
découvre ses mollets ronds. Pas de vareuse visible, ni de cape, encore moins de
manteau.
Comme un petit funambule, il fait
l'équilibriste sur une calotte de pierre aux tons bruns fumés comme dans les
sous-bois en hiver. Par endroit, apparaissent quelques touffes de mousse verte.
Ce chapeau a trois étages surplombe une colonne trapue semblant avoir été
restaurée récemment. Les joints en ciment apparaissent nettement entre les
dalles couleur ivoire rendues brillantes par la couche de givre transparente.
Difficile de donner un âge à ce bronze
aux jambes rondes et musclées devant appartenir à un petit galopin semblant
bien actif. Entre les deux-guerres, sous Jaurès ? Après 39-45 ?
Je laisse vagabonder mon
imagination...Il aurait pu escalader cette colonne. Le jeune modèle de ce
sculpteur inconnu aurait certainement écorché ses jambes dénudées à escalader
la colonnette. Il aurait pris soin d'utiliser les jets d'eau comme des
cales-pieds afin d’accéder jusqu'à la calotte de pierre. Puis, il aurait
peut-être glisser le long des pierres rugueuses et poreuses en rappel en
utilisant les interstices des pierres actuellement comblées par du ciment.
Enfin, il aurait sauté à pieds joints à terre dans ce tapis de neige immaculé
recouvrant actuellement l'ensemble du bassin pour jouer avec son jeune voisin
habitant dans l'immeuble voisin.
Justement, celui-ci tourne depuis un bon
bout de temps autour de la statue. De l'étage au-dessus, sa mère surveille du
coin de l’œil les aller et venues de son fils. Le jeune garçon foule de ces
petits bottes la belle poudreuse, la retourne avec une grande satisfaction et
la tasse en y laissant des empreintes brunes dans le blanc, révélant
l'existance de conduites d'eau au fond du bassin. Le système fonctionne en été.
Puis il se baisse et ramasse à tour de bras ces millions de cristaux
brillants semblables à de minuscules diamants. Il bombarde ainsi de belles boules
de neige bien compactes et vise principalement le visage et le nez de
l'angelot. Celui-ci en reste tout déconfit ! Il disparaît une seconde sous les
yeux émerveillés de l'enfant ! Ceux de l'angelot impassibles semblent implorer
le ciel de sa déconvenue.
Images à jamais gravées dans ma mémoire
d'un instant féérique et surprenant sous l'éclairage blafard des lampadaires
cachés dans les arbres.
Comme de tendres parents, sensibles et aimants, semblant comprendre la situation, de grands et majestueux platanes penchent gracieusement leurs plus basses branches dénudées et protectrices vers la petite statue. Subrepticement, afin de faire fuir le petit garnement, quelques guirlandes de neige fraiche et étincelante tombent de leurs longs bras, un petit vent frais les disperse et en saupoudre l'anorak du jeune polisson ! Il secoue la tête, tape du pied, revient vite à son jeu favori ! Souhaiterait-il que la statut de bronze se réveille de son long sommeil pour lui rendre la pareille ?
Comme de tendres parents, sensibles et aimants, semblant comprendre la situation, de grands et majestueux platanes penchent gracieusement leurs plus basses branches dénudées et protectrices vers la petite statue. Subrepticement, afin de faire fuir le petit garnement, quelques guirlandes de neige fraiche et étincelante tombent de leurs longs bras, un petit vent frais les disperse et en saupoudre l'anorak du jeune polisson ! Il secoue la tête, tape du pied, revient vite à son jeu favori ! Souhaiterait-il que la statut de bronze se réveille de son long sommeil pour lui rendre la pareille ?
Il a surtout envie de jouer avec un
copain de son âge ! Lui a-t-on simplement dit qu'il fallait respecter les
monuments publiques ? Il n'a aucune idée de ce qu'il a devant lui. D'ailleurs,
comment s'appelle cet illustre inconnu, cet enfant de bronze ? Quel âge a-t-il
? Qui est son père légitime, l'artiste, son créateur ? Doit-on jeter la pierre
à ce jeune "chenapan" ayant trouver un terrain et un compagnon de
jeux, goûtant aux sports d'hiver citadins ? Ce n'est pas tous les jours, qu'on
a la chance d'avoir de la neige par ic !
Allons ! Allons ! Rien de telle : Une
bonne bataille de boules de neige, c'est ludique et ça consolide les amitiés !
Depuis la neige a fondu et la statue
apparaît sous un autre jour, elle a repris sa teinte vert-brun de gris, avec
cependant un peu plus de rouille dans le dos ! Elle rosit de plaisir au coucher
de soleil et à la pleine lune.
Le jeune penseur en restera de bronze.
Il ne portera pas plainte et l'épisode
restera sans suite.
Claudine
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