1 - Ma
mère m’emmène en ville. Dans la rue principale, nous entrons dans la pharmacie
pour acheter des bonbons paraît-il. À peine dans l’officine, nous bifurquons
dans un couloir où une porte s’ouvre. Je suis happée par un adulte et installée
dans le fauteuil du dentiste. Je vais tellement hurler qu’on m’entendra de la
rue. Pas d’attente, l’accès direct : c’est la mise en confiance pour
l’avenir.
2 – Salle
d’attente d’un bloc opératoire, les patients sont alignés en attendant leur
passage. Je n’ai pas le moral. Le garçon de service le voit et me dit « Il
ne faut pas pleurer madame », que répondre ? « Quelle chanson
aimez-vous ? » Je m’en fiche d’une chanson mais il insiste, mais
celle que j’aime n’est pas très connue : Étranger dans la nuit chanté par
Frank Sinatra. Le garçon sort son smartphone, cherche et trouve la chanson. Il
glisse son appareil contre mon oreille et retourne à son travail. La porte de
la salle d’opération s’ouvre. C’est mon tour, on m’installe en laissant
l’appareil à mon oreille et je m’endors doucement accompagnée par la voix de
Frank Sinatra.
3 – Le
service des urgences d’un hôpital. Une foule disparate se tient là, un peu
plombée car nous savons tous que l’attente sera longue.
Une
personne, peut-être sdf, arrive et s’installe dans un coin. J’observe qu’elle
ne passe pas par l’accueil mais que la personne de service la voit sans s’en
inquiéter.
Après un
certain temps, quelqu’un du personnel vient lui porter un sachet contenant, je
crois, de quoi manger.
Josiane
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Quoi de
plus variée que la salle d’attente du médecin, à l’image de la société. Elles
sont peut-être le reflet du quartier et
du standing du médecin généraliste ou spécialiste ! Elles sont toutes différentes !
Je me
rappelle une fois, avoir pris rendez-vous chez un spécialiste assez âgé qui
travaillait à l’ancienne. Je pénètre dans un petit hall carré peu éclairé. Là, sur
la gauche, une porte en bois brun. C’est celle de la salle d’attente. Elle est
rectangulaire, silencieuse mais minuscule. Une ampoule pend du plafond donnant
une lumière blafarde. D’un seul côté du mur, un banc de bois permet de
s’asseoir à une ou deux personnes, pas plus. L’espace est si étroit qu’il n’autorise
pas d’autres sièges. Si vous allongez un peu les jambes, vous touchez le mur du
cabinet. L’angoisse me saisit. J’ai l’impression d’entrer dans un placard. Me
suis-je trompée ? Je me demande si
je vais repartir. Mais non, une porte s’ouvre déjà. Heureusement, je n’ai pas
eu longtemps à attendre. En outre, le cabinet est très lumineux et l’accueil du docteur très chaleureux.
Une autre
fois, une amie m’a raconté son aventure : « Je ressens des douleurs dans
le dos depuis des années. Une collègue de travail me recommande le cabinet
privé d’un professeur dans le 16° arrondissement, rue Malesherbes. Après avoir
pris rendez-vous, obligatoire, je m’y
rends un peu anxieuse, je ne connais pas ce beau quartier et
j’appréhende aussi la consultation. Déjà, j’ai du mal à trouver la porte, et
j’angoisse. Je n’avais pas vu la plaque discrète, sur le côté d’un renfoncement.
J’appuie sur le bouton, la porte s’ouvre comme par enchantement, sur une petite
pièce. Imagine !..., deux parois à mi-hauteur la divisent et sur leur base
blanchie à la chaux, se dressent des longues planches de peupliers vernies reliées entre elles par des cordes. Entre les
deux, un petit bureau sur lequel repose un écriteau : « Accueil ». Mais il n’y
a personne ! Dois-je pénétrer davantage ? Je m’interroge. Un coup d’œil
circulaire et sur le côté droit, je découvre à demi-dissimulés par un panneau
de même bois, deux fauteuils de cuir noir et quelques revues déposées sur une
petite table en verre. Je m’assois et attends fébrilement. Quelqu’un
viendra-t-il à l‘accueil ? Personne, ou plutôt un homme grand, déambule, le
portable à l’oreille sans me voir. Je commence vraiment à être très mal à l’aise.
Je me sens si peu à ma place dans ce décor parfait comme un objet insolite posé
au mauvais endroit. Avec tous ses gréements autour, j’ai l’impression d’être
sur un bateau à voiles ! C’est très
beau mais je ne suis pas venue au musée. J’ai vraiment envie de fuir quand une
patiente sort du cabinet. Un vrai mannequin, tout droit sorti d’un catalogue de
mode : cheveux laqués, rouge aux lèvres et maquillage, vêtements de
marque, chaussures à talons et même le parfum reflètent son élégance et sa
classe. Elle me toise tout en s’en allant et sa moue pincée en dit long. Tu
penses, moi, même sur mon trente et un, je me suis sentie ridicule et j’avais
presque honte de m’être fourvoyée dans un tel endroit. J’étais prise comme un
rat. De la porte de son cabinet, le praticien, l’air étonné, m’a appelée d’une
voix douce. Courtois mais glacial, il m’a fait entrer. J’étais si perturbée que
je n’ai rien retenu de ce qu’il m’a dit. Heureusement, il envoie son
compte-rendu à mon médecin habituel ! »
Le mien,
il y a quelques années, avait son cabinet dans sa jolie maison. Elle ne donne pas directement sur l’impasse où elle
se cache. Il faut d’abord, arriver au petit portail, tirer sur la chaine d’une
petite clochette avant de traverser un jardinet et d’atteindre la terrasse couverte
d’une abondante vigne vierge. Heureusement, une flèche sur une pancarte indique
l’entrée de la salle d’attente. La porte, dans l’angle s’ouvre vers
l’extérieur. Carrée, de taille réduite, elle ne peut guère contenir plus de
trois ou quatre personnes à la fois. Une banquette basse les attend. Deux murs
gris-perle et dans l’angle une lampe ancienne éclaire joliment le tableau
accroché au mur, tout en diffusant une apaisante lumière. Les deux autres murs sont plus clairs. C’est
le coin des enfants : jouets éparpillés sur un tapis de sol, table basse
entourée de chaises et de fauteuils très bas. L’attente sera plus facile
et les bambins plus sages !
Maintenant
ce cher docteur a pris sa retraite et la salle d’attente du médecin de quartier
n’a rien de très poétique. C’est presque un bureau espace-ouvert. De la porte
d’entrée, vous vous dirigez tout droit vers le bureau d’accueil. Des deux
côtés, un couloir. Deux secrétaires, casque sur la tête pianotent sur leur
clavier tout en répondant au téléphone. Entre deux écoutes, l’une d’elles vous demande
votre nom et celui du docteur avec lequel vous avez rendez-vous avant de vous
enjoindre de vous asseoir derrière la paroi vitrée où attendent les clients.
Certains parlent fort, d’autres montrent
des signes d’énervement, se lèvent,
regardent à droite ou à gauche dans le couloir puis se rassoient.
D’autres encore, plus patients, se plongent dans la lecture d’un livre ou d’une
revue. Ici, ce n’est pas le petit cabinet intime mais un centre médical où
officient plusieurs praticiens. Alors, il y a toujours foule et parfois, il n’y
a même plus assez de sièges pour les derniers arrivants. Le bruit des voix est
incessant et seules les différences de tons en rompent la monotonie. Parfois,
des amis ou des voisins se rencontrent et se mettent à discuter ou à raconter
leurs misères comme dans un salon sans se soucier des autres. Attendre, il faut
attendre et quel soulagement quand c’est enfin mon tour.
Marie-Thérèse
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La salle
d’attente médicale de la caserne est en effervescence. Il y règne de forts
relents d’alcool rectifié. C’est aujourd’hui que les nouveaux conscrits doivent
subir la pluri-vaccination T.A.B.D.T.
Un strict
cérémonial se déroule :
A – Une
brochette de gars, torse nu, s’assoient sur les bancs, face au mur.
B – Une
aiguille leur est plantée entre les omoplates par des infirmiers.
C – Les
médecins-majors n’en finissent pas de commenter entre eux le poker de la veille
ou de pronostiquer les courses de chevaux du lendemain.
D – La
conversation tarie, ils passent dans les rangs et, de leur seringue, envoient
une giclée dans chaque aiguille.
E – Les
infirmiers retirent les aiguilles des dos.
F – Des
brancardiers ramassent ce qui gît et évacuent la salle.
Emmanuel
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Qui n’est
jamais entré dans une salle d’attente de médecin ? Aujourd’hui, peu de
personnes.
Celle qui
jouxte la salle d’examen de mon médecin est des plus modestes. En quarante ans
maintenant, je n’y ai as vu de grands changements ; la pièce qu’elle
partage avec son confrère n’est pas très grande mais pourvu du nécessaire,
mobilier simple et complet, avec beaucoup de chaises toutes semblables, une
table basse offrant diverses revues afin de rendre l’attente plus courte et
détendue ; aux murs quelques communications et affiches à caractère
médical retiennent l’attention des adultes… juste ce qu’il faut. Les patients
qui la fréquentent sont à son image, calmes et réservés : ils se
« tiennent », car aller en consultation reste un petit événement de
la vie familiale. Ils sont en principe du quartier et tous les âges sont
représentés, toutefois les visages changent en fonction des heures et des jours
de la semaine.
Les deux
médecins du cabinet ont dû faire carrière ici, avec toute la discrétion
nécessaire. Ils ont suivi des familles entières… Il règne ici une ambiance
sereine et familiale, un peu à la manière d’autrefois. Pour les patients
handicapés, gravement malades ou très âgés, les médecins se rendent au
domicile, souvent proche du cabinet ce qui devient une rareté. Mais quand je
les croise dans mon immeuble, je vois qu’ils fatiguent… en vieillissant comme
nous.
Ainsi la
vie simple du quartier se glisse dans la salle d’attente de mon médecin.
Parfois, en attendant mon tour, je me dis qu’on pourrait l’embellir un peu
cette salle : un coup de peinture, quelques tableaux montrant de jolis
paysages, un fond musical discret pour que chacun puisse profiter de ce répit
dans ce havre de paix. C’est que toutes sortes de raisons heureuses ou
malheureuses amènent petits et grands à prendre le chemin de la salle d’attente
du médecin.
Françoise
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Une salle
d'attente, salle de détente ou salle des pas restreints et des sièges non perdus
pour tout le monde. Salle où les yeux du praticien dépassent et disparaissent
tour à tour derrière le guichet, le blanc de ses yeux absorbés dans son
planning ouvert, une main sur son téléphone, l’autre sur ses ordonnances de
prescription et le carnet d'adresses de ses clients s’empêtrant pêle-mêle dans
un fatras de paperasseries sur un bureau où on dirait qu’un oiseau a fait son
nid. Il n'a pas sitôt levé les yeux sur une patiente assise dans un recoin,
essayant vainement de se remémorer à quelle heure il a bien pu lui donner son
rendez-vous, qu'il est interrompu par un appel. Le temps de répondre, il fonce
dans sa salle de soins afin de la ranger suite à la visite de sa
dernière cliente. Il a dû y égarer quelques notes, il revient rapidement
et s'écrie : "Votre nom ? Vous aviez rendez-vous à 15h30 ! "
Effectivement il est 16h15. Et de repartir pour revenir aussi rapidement. La
patiente bredouille, s'excuse, puis et il reprend bougon :"Je vais voir ce
que je vais faire !" Le manège recommence dans une cacophonie de sonneries
diverses entre le portable de la retardataire et le sien. La porte d’entrée
grince comme les jointures de ses patientes, il jette un coup d’œil furtif à la
nouvelle venue, sans un bonjour de bienvenue, il finit par lancer à celle-ci
quelque peu impatiente et sur le qui-vive, ne sachant quelle contenance avoir
:"Venez ! Installez-vous !" Le soin s'effectue entre de nombreux
appels. On entend des plaintes et des craquements d’os qui me déchirent les
entrailles derrière la porte. Soudainement, je commence à angoisser. Mes
tympans souffrent aussi. J’ai l’impression d’être la peau d’un tambour sur
lequel rebondissent les sons divers. La porte de la salle d'attente s’entrouvre
en même temps que celle de la salle de rééducation comme par magie. Pure
coordination ! La grande stature du kinésithérapeute s’encastre parfaitement
dans l’encadrement du pas-de-porte. Il consulte rapidement son registre. Fait
un geste de bienvenue en direction de la jeune femme béquillant pour l’inciter
à venir s’asseoir, bousculant au passage, la dame bien en chair occupant
presque deux sièges. La dame ronde se raidit promptement en n’essayant même pas
de rassembler ses sacs répartis ici et là ! La situation deviendrait
vite burlesque si le praticien peut
bavard mais éloquent, joignant le geste
à la parole, s’empare des affaires de la dame pour les glisser sous la
chaise ! Pendant ce temps, la jeune femme prend ses aises et étend sa
jambe sur la chaise vacante sous le regard courroucé de la matrone qui fait
alors un tour rapide de la salle d’attente aux vues de l’exigüité des lieux…
Dans un coin une dame entre deux âges, d’un œil amusé essaye vainement de
soutenir son regard, puis finit par baisser la tête, pour finir de la tourner
résolument vers la porte d’entrée où une cinquième personne s’apprête à entrer.
Le praticien comme précédemment surgit de son antre. D’un œil éclairé, il jette
un regard sur son petit monde. Demande à la jeune femme de s’installer sur le
siège jointant celui de la dame forte, sous le regard courroucé de celle-ci,
désamorçant une situation quelque peu conflictuel, d’un sourire de circonstance
à la fois paternaliste et professionnel vers cette dernière. Il essaye de
canaliser les tensions en rassurant l'une, calmant l'autre. Dans la salle
d'attente, un silence gêné s’installe et se transforme en salle des regards
perdus. La dame aux sacs jette des regards curieux sur la petite dame voûtée venant
de rentrer qui de temps à autre la dévisage de derrière ses lunettes entre
deux "Ici et Voilà !" Un homme vient de prendre place. Il
affiche une bonne humeur transparaissant dans son sourire charmant. La dame aux
sacs est conquise. Finalement La bonne humeur ne tient qu'à une chaise et
ce monsieur relativement fin et délié, n’occupe qu’une moitié de siège n’en
paraît pas plus troublé pour autant !
Claudine
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