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Une cave… la
plage
Par Emmanuel
Naguère,
une gigantesque cave –dénommée halle aux vins – desservant la région
parisienne, s’étendait le long de la rive gauche la Seine, à l’endroit où se
dressent aujourd’hui l’université de Jussieu et l’Institut du Monde Arabe.
Débarquaient
à cette halle-aux-vins, des gabarres ou péniches provenant de l’amont, à partir
de vignobles qui tapissaient les coteaux en bordure de la Seine et de la Marne.
Ce transport bénéficiait donc d’une commodité : descendre le courant à
pleine charge et ne le remonter qu’à vide, facilitant le halage.
Ce mode
fluvial de transport bénéficiait ipso facto d’une faveur naturelle appréciable,
par ces temps où le charroi était une activité non seulement pénible mais aussi
grevée par les péages d’un système féodal rapace et soumise à l’insécurité par
le banditisme dit « de grand chemin ».
L’intense
et lucrative activité viticole ci-dessus recevra le coup fatal avec l’arrivée
du chemin de fer qui mettra la grosse viticulture méridionale et algérienne à
portée des gosiers parisiens, par rames de wagons-citernes se chargeant à la
halle aux vins via les nouvelles gares de Lyon et d’Austerlitz.
Ces
considérations tournent et retournent dans mon esprit lorsque, sur la rive de
la Seine opposée à celle de la halle aux vins, je me prélasse à Paris-plage.
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Une laverie… une
cour de récréation
Par Josiane
Sur la
place d’une petite commune de banlieue : une laverie. On y lave le linge
au kilo et y vend divers articles.
Je me
demande si ça pèse lourd le linge sale ; et combien ça coûte de le rendre
propre.
J’ai le
nez collé sur la vitrine et à la hauteur de mes yeux, des têtes coiffées me
regardent. Dehors, il fait froid. Les chapeaux proposés dans la boutique ne
sont pas si mal. Je me décide à entrer et à en choisir un, que je mets de
suite.
Alors,
là ! C’est la reine d’Angleterre au Chaperon Vert. Comme je porte des
lunettes et que la toque a un rebord, on ne risque pas de me reconnaître. Tant
mieux, car avec un chapeau qui ressemble à une bassine retournée, ça me
ridiculise un peu. Tant pis, j’ai chaud et la couleur me plaît.
Maintenant,
à l’extérieur, il y a des bourrasques de vent, ça craint !
Une
rafale emporte mon couvre-chef. Affolée, je cours après. Il est tombé dans une
flaque d’eau sur la route. Quand je veux le ramasser, une voiture arrive et le
vent menace de le projeter plus loin.
Des
gamins sont dans la cour de récréation et ont vu la scène. Ils
s’esclaffent : c’est drôle, un chapeau qui ne veut pas rester sur la tête
de sa propriétaire.
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Une cabane à outils… un dortoir
Par Colette
Je revois la cabane aux outils comme nous
l’appelions enfants, que de trésors à l’intérieur : marteaux, scies,
rabots, pinces et tournevis, sans oublier les clous et vis de diverses tailles.
Elle était là-bas, au fond d’une cour appartenant à cette ferme où je passais
mes vacances d’été étant enfant. Cette cabane où nous avons passé tant d’heures
à jouer, mon cousin et moi. Là, dans cet endroit, suivant les jours, nous nous
prenions pour le forgeron et le charpentier du village. Nous bâtissions des
cabanes dans les arbres. Aïe !! Je me tapais les doigts en voulant planter
un clou. Notre cabane ne fut jamais finie… Elle est restée à l’état de planches
placées de guingois dans un vieux pommier tout rabougri.
Un jour, je suis retournée là-bas en
compagnie de mon mari et de notre fils. Je voulais les présenter à mon
cousin ; lui aussi était marié et père d’une jolie petite fille. Durant
notre discussion, il me révéla qu’il projetait de reprendre la construction de
notre cabane : « Ce sera nos enfants qui joueront dedans ».
La cabane à outils, elle, avait disparu,
rasée, balayée un jour de grand vent.. ce jour-là, elle ne fut pas la seule
victime de la tempête. Quelques pommiers furent arrachés mais le nôtre, tout
tordu et rabougri, avait résisté.
L’idée de poursuivre la construction de
la cabane réjouit mon fils qui sauta de joie. Accéder à une cabane dans les
arbres était un rêve pour lui… et vivre les aventures de ses héros,
« c’est le pied », comme il disait. En attendant, il passait ses
vacances en colonie. Je lui disais de ne pas trop parler de cette cabane mais
je suis sûre que dans les dortoirs où il faisait de mémorables batailles de
polochons avec ses amis, je suis sûre qu’il ne manquait pas de raconter cette
histoire.
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Un
verger… le commissariat
Par Marie-Thérèse
En
ce matin de juin, sous le chaud soleil de l’été, Julie va avec ses jumeaux
espiègles Clément et Clémentine, rendre visite à Madame Mazeau qui possède une
très belle maison bourgeoise. Autrefois au centre d’un magnifique jardin, mais l’urbanisme
aidant, la maison doit maintenant se contenter d’un petit jardin couvert de
végétation devant son perron et d’une
étroite allée de chaque côté. Par contre, à l’arrière, délimité par des murs
mitoyens, s’étire un long jardin rectangulaire plein de fleurs et un petit
bassin où nagent les poissons rouges ou gris.
Mais
dès leur arrivée, les enfants ont tôt fait de dénicher dans le mur, la petite
porte qui conduit au verger. En un rien de temps, déjouant la surveillance de
leur mère, ils s’y glissent. Ils y découvrent d’un côté la treille chargée de pampres
aux larges feuilles cachant les grappes.
Clément et Clémentine, curieux, les écartent avec soin et voient avec gourmandise, les raisins déjà
gonflés bien qu’encore verts. Qu’importe, quelques grains volés et goûtés.
Pouah ! Ils sont bien trop acides ! Un coup d’œil de l’autre
côté : les pommiers s’étalent en espalier contre le mur ensoleillé,
offrant leurs pommes à peine rouges. Cueillir un fruit et le croquer Bien vite,
ils le recrachent. Pas de chance, lui non plus, n’est pas assez mûr ! Mais
là, devant eux, pousse un magnifique cerisier. Les branches sont bien hautes
mais les « cœurs de pigeon », rouge carmin sont si tentants !
Ils sont énormes et de surcroit, une échelle est couchée au pied de l’arbre.
Vite Clément et Clémentine la dresse et l’appuie sur une grosse branche.
Clément grimpe rapidement, cueille et fourre les fruits dans sa bouche, puis
cueille à nouveau. Clémentine réclame doucement. Elle voudrait bien avoir sa
part sans attirer l’attention de leur mère. Pourtant, elle n’ose secouer
l’échelle et son frère est bien long à comprendre. Enfin, c’est son tour !
Elle monte lestement et saisit les fruits mûrs à point. Le jus lui coule le
long du menton mais elle n’en a cure. Quel régal !
Soudain,
un bruit ! Est-ce maman ? Clémentine redescend rapidement et les
enfants courent se cacher au fond du verger. Là s’étend une plate-bande de
fraisiers mais de fraises, point !
Elles ont toutes été ramassées. Mais qu’est-ce cela ? Un paquet insolite git
sur le sol. Un sac à main à demi-ouvert s’est écrasé sur les feuilles en
tombant. Le reflet du soleil sur le fermoir métallique a attiré le regard de Clémentine
qui laisse échapper un : «- Regarde, un sac ! »
Clément
l’a déjà saisi. Clémentine ramasse les papiers égarés. Son frère se précipite
vers leur mère. «- Maman, maman, regarde on a trouvé un sac ».
Julie est surprise :
« -
Mais où l’avez- vous pris? Il est sans doute à Mme Mazeau. Où
l’avez-vous trouvé? »
Pris
en faute, les enfants baissent la tête et murmure : « - au
verger ».
Au
même moment, Mme Mazeau apporte le plateau de rafraichissements près du bassin.
Julie le lui tend «- Les jumeaux ont ramassé
ce sac, il vous appartient sans doute, le voici.
- Ce
sac est vraiment magnifique, son cuir est si fin et sa couleur chaude m’aurait
bien plu. Mais non, il n’est pas à moi.
Les enfants, où l’avez-vous trouvé ?
-
Dans le verger, sur la plate-bande des fraisiers ! Il était ouvert et des
papiers étaient tombés à côté.
-
Et bien, il ne nous reste plus qu’à
aller le porter au commissariat. Un voleur dépité l’aura jeté par-dessus le mur
pour s’en débarrasser !
-
Je crois alors que nous allons rentrer !
-
Mais non, Julie, le commissaire aura besoin du témoignage des enfants et de
leurs explications. »
Heureusement,
le commissariat n’est pas loin et il n’y a pas foule. Ils n’auront pas trop de temps à attendre. Le
policier à l’accueil, reçoit leur demande et les invite à s’asseoir tandis
qu’il transmet. Bientôt un collègue vient les chercher pour enregistrer leur
déposition tout en les remerciant de leur honnêteté. Le sac est abandonné entre
les mains du policier et tous quatre quittent le commissariat.
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Un
aéroport… chez le coiffeur
Par Mireille
Olivier venait d’atterrir par avion à l’aéroport d’Orly,
après un séjour de quatre mois à Oslo
pour effectuer un reportage sur les mœurs et loisirs de ce pays.
Il avait sympathisé avec Nora, une consœur qui travaillait sur les journaux de mode très
féminine. Elle donnait des conseils à la gente du beau sexe sur les coiffures
actuelles, les soins nouveaux pour le corps, le visage, les différentes façons
de se maquiller selon les heures, les circonstances et les lieux.
Ils avaient passé beaucoup de temps ensemble. Etant
descendus au même hôtel, ils prenaient leur diner le soir ensemble. Ils étaient
devenus très proches se faisant des confidences. Un lien fort les unissait,
c’était comme s’ils se connaissaient depuis toujours.
Ils allèrent boire un dernier verre en tête à tête avant de
se séparer. La tristesse se lisait sur leurs visages. Nora rentrait à Perpignan
retrouver son mari. Olivier rentrait au pays des corons, retrouver ses parents
et sa fiancée Stéphanie avec laquelle il devait se marier à la fin de l’année
car elle portait leur premier enfant, une petite Olivia qui allait les combler
de joie. Le temps passait. Olivier pensait la retenir. Ils s’embrassèrent
tendrement, les larmes aux yeux, échangèrent adresse et téléphone puis chacun
partit de son côté.
Arrivé dans sa petite ville du Nord où il était né, ce fut
rempli de joie qu’il poussa la porte du salon de coiffure où Stéphanie, sa
promise, exerçait son métier. Elle était belle, toute blonde, le teint pâle et
de grands yeux bleus étonnés. Elle se jeta dans ses bras. Elle avait tant
d’amour dans les yeux qu’il ne regretta jamais sa fidélité.
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Le théâtre… un
placard à balais
Par Marie-Christine
Au siècle
dernier, à Marseille, Raimu entra, en 1908, au théâtre de l’Alhambra comme
souffleur, puis il joua sur la scène de l’Alcazar, cours Belsunce, dans cette
même métropole régionale, haute en couleurs…
Raimu
brillait tout particulièrement dans le rôle de César, présent dans la trilogie
marseillaise de Marius, Fanny, César.
… Un jour
l’acteur, avec tout son talent, sa puissance évocatrice inénarrable, détaillait
la scène où M. Brun, le Lyonnais, achète à M. Panisse, le Pitalugue, un bateau
qui « boira de l’eau », en chavirant dans le Vieux Port.
La salle
était au comble de l’hilarité en entendant les propos soulignés, gestes à
l’appui, de « bougre d’emplâtre, jobastre, ô bagasse, tron de l’air,
fariboles »… quant : « ô cocagne », deux rats traversèrent
la scène, nullement effarouchés ; ils étaient familiers des lieux, cherchant leur nourriture terrestre et
peut-être intellectuelle. L’un d’eux fila entre les jambes de Raimu, qui, ne
perdant pas la face, professionnalisme oblige, enchaîna avec brio :
« ô coquin de sort, ô mange punaises », puis voyant que les rongeurs
se prenant au jeu ne détalaient pas, Raimu, regardant pa thétiquement la salle, usant de tous les tons de son répertoire,
demanda :
« s’il
y a un chat ? s’il y a un chat ? »
La salle
explosa de rire.
Personne
ne répondit. Aucun chat, aucun Raminagrobis, ne se présenta pour exterminer ces
rats devenus acteurs, spectateurs et consommateurs potentiels.
Pour
enchaîner, M. Panisse, le propriétaire du Pitalugue, le sous-marin, eut
spontanément l’idée de prendre dans le placard à balais des coulisses deux
balais, le plus naturellement du monde.
Raimu,
voyant ces deux accessoires, métamorphosés simultanément en armes destructrices
de la gent Trotte-Menu, et en rames pour sauver le Pitalugue, fit une brillante
improvisation : « S’il est vrai, ô coquin de sort, que les rats
quittent le navire qui a chaviré dans le Vieux Port, au bord duquel M. Brun est
« noyé-mort ou mort-mouillé », il faut ramer ! »
M.
Panisse rama sur scène, à en perdre le souffle, avec les deux balais, tant et
si bien que Raimu déclara, en parlant de M. Brun : « Il a encore
quelque chose qui bat, mais on ne sait pas si c’est son cœur, ou si c’est sa
montre ! »
Et
Raimu/César de tonitruer, impérialement « Et vogue la galère, les rats
peuvent réembarquer ! »
... Rideau
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Le métro… la
piscine
Par Claudine
La porte d’Italie :
un métro qui n’en finit plus d’arriver, des sous-sols sordides, des brillances lustrées d’un revêtement noir se reflétant
dans le carrelage blanc cassé et des escaliers roulants qui vibrent sous les
boots. Puis, en avant vers la place d’Italie avec encore des escaliers qui vous
mènent à l’air libre et nous offrent, nez au vent, un bon échantillon de joyeux
relents citadins de gaz d’échappement et de parfums bon marché. A contre vent
avec la veste qui claque d’exaspération entre les feux rouges et les bandes
blanches des passages piétons, la vie va à la vitesse de nos pas entre les
klaxons. Les oreilles blasées, oreillettes et écouteurs bien enfoncés dans les
conduits, c’est supportable et « I can get no satisfaction » résonne
encore dans mes tympans quand je franchis le porche de la piscine de la Butte
aux Cailles : et je cherche encore du regard ces dernières aujourd’hui.
Mais à
bien y regarder, il y aurait de nombreux pigeons venus se poser aux abords du
jardin public où nombre de riverains et de banlieusards, qui appartiendront
bientôt au grand Paris, viennent se ravitailler, à grand renfort de bidons, en eau
potable d’une grande pureté pour alimenter et rafraichir le moteur de leurs
voitures. On sent que la gratuité attire toujours plus de monde au balcon.
Sera-t-elle toujours au rendez-vous dans dix ans, voire un siècle ? Seuls
les Parisiens pourront le dire à notre descendance.
La Butte
aux Cailles : une belle piscine qui s’est offert une beauté il y a bien longtemps
maintenant et est classée au patrimoine public. Elle comportait un grand bassin
comme il convient et un petit pour les bébés nageurs et leur maman- mamie. Que
de souvenirs avec mon tout-petit qui pour la première fois sentait cette eau
fraîche javellisée caresser ses petits petons. Un choc aussi. Maintenant du
haut de son mètre quatre-vingt, l’eau est son élément et il ne peut sortir du
bain ou de la douche que quand l’eau du chauffe-eau, devenue glacée à force de
couler, annonce K.O. technique pour les suivants et suivantes.
Peut-être
en payant les factures, apprendra-t-il que l’eau est précieuse et assez chère
surtout chez Opaly. Alors les cordons de la bourse seront moins déliés et l’eau
ne coulera plus à flots sauf sous les ponts de Paris.
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