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Aussi
loin que je me projette dans mon petit passé, j’ai toujours aimé le feu de
bois. Pourquoi ? Je ne sais … Quelques pistes… peut-être la dureté des
hivers de ma petite enfance que la guerre et ses privations rendirent plus
intense ; dans les villes sinistrées, ramener de quoi faire une flambée
relevait du miracle. Vinrent ensuite des temps meilleurs.
Le
jardinage impliquait le nettoyage des terrains après les récoltes, par les feux
de broussailles… d’âcres fumées se mêlaient aux premiers brouillards tandis que
l’on se rapprochait du feu pour mieux profiter de ses ronflements si vivants,
si réconfortants et joyeux avec leurs pétillements traversés de coups de
pétard ; et puis les flammes orangées, dansantes et chaudes attirées par
le ciel.
Les
loisirs simples revinrent avec le camping héroïque et ses feux de camp de
tailles variées. Dans la nuit d’été s’élevaient des chants, des rires et des
exclamations, surtout quand une partie du feu s’effondrait dans une gerbe
d’étincelles, tel un feu d’artifice naturel. Avec le retour de l’automne, le
feu retrouvait toute sa place dans la maison : la cuisinière Godin, en
fonte, se chargeait d’avaler du matin au soir sa hotte quotidienne de bûches.
Sympathiques, le ronflement, les flammes orangées sous les rondelles que soulevait
le pique-feu de maman, les odeurs du bois qui se mêlaient à celles de la soupe
et des mets qui mijotaient…
Bien plus
tard, à l’occasion de séjours réguliers à la campagne, je renouai avec le feu…
de cheminée. Cette fois, j’appris à l’allumer, le « fouetter » pour
qu’il chante et chauffe bien ; le feu devint alors le compagnon maîtrisé
de mes lectures.
Mais
j’eus aussi plusieurs fois l’occasion de réaliser sa force destructrice lors d’incendies dans les pinèdes sèches de
Haute-Provence, en plein été ; parfois sa force était décuplée sous les
coups du mistral : les flammes engloutissaient alors les pins, les
transformant en torchères ; le feu courrait de collines en collines car
les pommes en s’enflammant étaient projetées telles des grenades en avant du
front de l’incendie. Le pays et les hommes étaient alors engagés dans un vaste
corps à corps avec lui. Quand il était enfin battu, ne restaient alors que des
hectares carbonisés, parsemés de troncs noirs et de ruines. Il allait falloir
attendre 20 à 30 ans pour retrouver la forêt…
C’est
bien l’un des questionnements actuels : comment faire coexister ces deux
éléments naturels, l’un étant le produit de la vie végétale qui a son rythme et
l’autre, élément naturel destructeur. Les grands incendies posent la question
de notre survie car c’est bien la conquête et la maîtrise du feu (autour de
500 000 ans) qui ont permis nos développements ultérieurs.
Françoise
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Le feu de bois évoque
pour moi plusieurs souvenirs, d’abord les feux de camp auprès desquels nous
nous retrouvions tous pour chanter des chansons lors des veillées de colonies
de vacances et pour regarder danser les
flammes au milieu des poussières incandescentes qui s’élevaient en
tourbillonnant. La vision du feu, ses couleurs, jaune, rouge et or, son odeur
et le crépitement du bois m’hypnotisaient totalement, puis les braises
rougeoyantes et assoupies accompagnaient notre douce indolence avant le coucher.
La fascination des flammes et c’est comme si j’étais alors transportée dans un
autre monde. C’est aussi la cheminée chez mes grands-parents à Bruz où nous
allions une fois par an en été quand nous étions très jeunes, dans celle-ci un
feu était constamment allumé, il y avait toujours le lait pour le petit
déjeuner dans une casserole au cul noirci, une marmite pour le repas du midi et
la soupe du soir et entre temps de l’eau à chauffer pour la toilette ou pour
laver le linge. La cheminée était très grande et papa nous racontait que quand
il était petit sa propre grand-mère, donc mon arrière grand-mère, qui était
conteuse s’installait dans l’âtre avec ses auditeurs regroupés auprès d’elle
autour du feu.