.....................................................................
Dans un
splendide musée de renommée internationale étaient exposés des centaines de
tableaux tous plus beaux les uns que les autres. Cependant l’un d’entre eux
retenait particulièrement l’attention des visiteurs de par son originalité, ses
couleurs, sa dimension, mais surtout son interprétation. Chacun et chacune
s’arrêtait un temps infini devant cette œuvre incontournable, inqualifiable, en
lui donnant à chaque passage une nouvelle image. Tantôt poétique, tantôt
dramatique, tantôt humoristique. Tout était permis devant cette toile aux mille
teintes inventées et créées par l’artiste. Le musée obtint grâce à lui une
réputation défiant toute concurrence et attira des milliers de curieux,
jusqu’au jour où, sans préambule et emportant avec lui tous ses mystères et
toutes ses richesses artistiques, il disparut.
Elisabeth
................................................................................................
H(his)M(majesty’s)A (australian)S(ship) SYDNEY
Nous
sommes en été 1940 à Alexandrie. S’y trouve la principale base navale de
l’empire britannique, située stratégiquement sur la route des Indes, aux abords
du canal de Suez, verrou hermétique isolant l’Italie fasciste de son empire
d’Afrique orientale et vouant celui-ci à un inéluctable et prompt
anéantissement.
Selon un
usage répandu dans les couches aisées de la
population alexandrine, mes parents parrainaient un marin de l’escadre
mouillant dans le port. C’était en l’occurrence un jeune quartier-maître du
croiseur australien Sydney. Il avait table ouverte chez nous, lors de ses
permissions. Mes parents entretenaient une relation épistolaire avec sa
famille, à l’autre bout du monde.
Peu après
l’entrée en guerre de l’Italie fasciste de Mussolini, le Sydney, en opération,
remporta un triomphe en coulant le Bartoloneo Colleoni, joyau de la marine de
guerre italienne.
Auréolé
de gloire, le Sydney rentra dans son bercail alexandrin. Notre jeune hôte, à sa
première permission, s’avéra en savoir moins que nous sur l’exploit du navire.
En effet, confiné à son poste de combat, il se trouvait quasiment comme l’était
à Waterloo le Fabrice de Stendhal dans sa Chartreuse
de Parme.
Nous le
revîmes ensuite plusieurs fois chez nous, mais un beau jour, il disparut.
P.S. :
été 1941, le Sydney patrouillait dans l’océan indien, à la recherche d’un
corsaire allemand qui y sévissait. Mais un beau jour, il disparut ;
P.
S. du P. S. : Cette disparition, sans rescapé ni le moindre débris
flottant, est paraît-il un cas unique dans l’histoire des batailles navales.
Emmanuel
.........................................................................
Au Resto
du Cœur, il était très fidèle. C’était mon ami l’Algérien.
C’était
Khalid, le Nord-Africain.
Les
cheveux frisés
Les yeux
sable doré
C’était
mon Apollon au teint basané.
Une
chambre que l’on partage au rythme des trois huit
Une
solitude qui vous plonge dans le vide
La
musique du pays qu’on écoute parfois
Rend
nostalgique la darbouka.
On dit
bien à la ronde
Que tes
traits sont si creux
Ton
visage n’est pourtant pas si vieux
Et même
si ton pauvre corps
Est brisé
par les durs travaux
Si tes
mains sentent parfois le chlore
J’aime le
mat de ta peau
Il rêvait
d’aller plus encore vers le nord
À mille
lieues d’ici
Dans un
pays où on l’aurait appelé « Monsieur »
C’est
peut-être la raison pour laquelle
Un beau
jour, il disparut.
Christiane
O que de tendres souvenirs
Semblables
aux sensibles corolles
Qui
délicatement s’envolent…
Comme
la lumière du soleil disséminant
Savamment
ses rayons d’or en caressant
Lascivement
les cordes d’une mandoline,
Qui
égrène des sons divins, enchanteurs.
Lors
d’une mutine et ludique promenade
Délicieuse
et vibrante sérénade,
Aux
trémolos et soupirs
Aussi
légers que la lyre
Ton
cœur chavire.
Comme
une ode à la joie,
Libératrice
et lumineuse,
Emulsionne
tes sens en émoi.
Que
d’offrandes magnifiques,
Et
aux combiens romantiques,
Offertes
gracieusement
Aux
déesses de l’amour :
Aphrodite
et Vénus, puis à Apollon,
Dieu
de la lumière, de l’avenir,
Du
chant, de la musique et de la poésie,
Ainsi
qu’à l’arc magique de Cupidon.
Marianne,
jolie jeune femme famélique,
S'abandonne
ainsi aux plaisirs de l’amour
Nostalgique.
O
que de douces paroles,
Qui
doucement s’envolent,
Entêtantes
senteurs,
D’encens,
dispersées,
Comme
tant de notions de valeurs
Disparues,
enfouies à jamais,
Au
fond de ta mémoire.
O
que de ferveurs, que de langueurs,
Que
de promesses d'amour,
Que
de "je t'aime, que de toujours",
Modulés
sur tous les tons,
Murmurés,
susurrés au creux de l'oreiller…
Jeune
femme au combien romantique,
Amours
au combien érotiques
O
jeune femme, O combien amoureuse,
Tu
te souviens des premiers frissons,
Toutes
en caresses
Toutes
en prouesses.
Tu
bouscules les principes, ivre de volupté,
De
ces émois, de cette passion sublime,
Dès
l’étreinte ultime.
Symbiose
et jouissance des sens,
Union
des corps chargés de beauté,
Union
des âmes porteuses de liberté,
Amours
interdites enchantées
Bouleversement
des sentiments.
Amours
sans offense.
Lieux
maudits à jamais
Marques
indélébiles de la passion,
Des
plaisirs charnels, de la déraison.
Sur
vos mains, sur vos pieds,
Dans
les draps froissés,
Mille
échos dans les tentures chamarrées,
Cœurs
chavirés, face aux chevets,
De
cette immense cheminée
Dans
cette chambre de cette demeure baroque
Berceau
porteur de tant de souvenirs équivoques
Où
tant de désirs, de plaisirs effrénés
Où
tant d’élans passionnés,
Resteront à jamais gravés,
Resteront à jamais gravés,
Dans
les rideaux de ton alcôve,
Où
désormais seule, tu te loves.
Tu
te consume du feu torride,
Comme
une torche vive.
Comme
un bateau ivre.
Feux
de l’enfer qui chavire
Et
consume les âmes,
Tu
te diriges vers l’expiation,
Et
tu vies actuellement l’enfer de la diffamation.
O
jeune amoureuse entière et passionnée.
Que cet amour libre et fier, ne te fasse pas divaguer,
Comme le cœur si léger de ton marquis ardent et imprudent,
Profitant, impudent de la pureté de tes sentiments.
Que cet amour libre et fier, ne te fasse pas divaguer,
Comme le cœur si léger de ton marquis ardent et imprudent,
Profitant, impudent de la pureté de tes sentiments.
A
cet amour insensé pour ce noble portugais
Que
tu continues néanmoins d’encenser,
Dans
le précipice, tu te précipites, creusé
Par
un conquérant guerrier
Attiré
vers de lointaines contrées.
Amoureux
de tout ce qui porterait jupons
S’enorgueillissant
de ces nombreuses conquêtes,
Et
de lui-même imbu.
Pauvre
Marianne dans sa Saudade confondue…
Ne
pouvant prévoir et admettre ce qui pourtant
Etait
évident…
« Mais
un beau jour, il disparut. »
Claudine
......................................................................
C’était
un beau matin de printemps, un de ces jours où le ciel d’un bleu intense est
parsemé de petits nuages blancs, légers comme des flocons. Un rayon de soleil
plus fort que ceux des jours précédents frappait la vitre de la fenêtre et
réchauffait déjà l’atmosphère.
Dans le
jardin, l’herbe encore courte verdissait et sur les tiges des arbres, les
bourgeons gavés de sève, s’enflaient au point de vouloir éclater. Déjà quelques
passereaux étaient de retour et commençaient à virevolter pour faire leur nid,
attrapant de-ci de-là dans leur bec, une brindille ou une mousse. J’avais
entendu le chant du coucou et toute la nature semblait revivre. Je me sentais
des envies de me prélasser au soleil dans une chaise longue au milieu de la
pelouse mais l’air était encore frais.
Soudain,
j’entendis remuer la gamelle du chat posée sous l’auvent, à même le sol, et
tout aussitôt frapper ou plutôt gratter à la porte. J’ouvris et ne vis
personne. Je refermai la porte, intriguée. Ce n’était pas Minette, ma chatte
bien-aimée ; elle était couchée à côté de moi. Avais-je rêvé ? Mais
non, ça grattait à nouveau. J’ouvris, baissai les yeux. Et là, il m’apparut
pour la première fois, recroquevillé dans un coin. Une petite boule
brune !
Profitant
de la porte entrouverte, Minette approcha et la petite boule se mit à gonfler,
gonfler, tout en émettant une espèce de sifflement sourd, signe de colère.
J’attrapai prestement la chatte et l’enfermai dans la cuisine de peur qu’elle
ne lui fît du mal. Je l’entendais maintenant manger les croquettes. À travers
la vitre, je le regardais s’agiter, ses deux courtes pattes posées sur le
rebord de la gamelle. J’ouvris doucement la porte et il ne s’enfuit pas. Au
contraire, il me fixa de ses petits yeux vifs et ronds comme pour m’interroger.
Je lui glissai une jatte de lait qu’il but avec avidité.
C’est ainsi
que je fis la connaissance d’un jeune hérisson que je prénommai Arnold.
Dans un
coin du jardin, sous des branchages, je lui fabriquai un abri de carton avec sa
porte. Au lever du jour, à la tombée de la nuit, il venait régulièrement se
restaurer et s’abreuver dans les gamelles de la chatte. Minette le regardait
avec respect et Arnold s’accoutuma à sa présence. Jamais ils ne se cherchèrent
querelle. Mais un autre chat survenait-il dans le jardin qu’Arnold se mettait
immédiatement en boule puis à gonfler, prêt à l’attaque, émettant ce petit
sifflement court, très aigu finissant comme dans une roucoulade. Les jours
rallongeant, il apparaissait de plus en plus tôt pour ne revenir que de plus en
plus tard. J’avais pris l’habitude de le guetter et de lui parler doucement. Je
réussis même à l’apprivoiser suffisamment pour, de temps à autre, le caresser
d’un doigt sous son museau pointu.
La saison
s’avança tranquillement puis vint l’été et son ardent soleil. Arnold se
réfugiait dans son abri, sous le feuillage que je lui renouvelais fréquemment
pour en conserver la fraîcheur. Il ne réapparaissait que lorsque les rayons
obliques du soleil venaient se briser contre la façade opposée.
Mais le
ciel s’assombrit, la pluie arriva et le temps redevint frais. Les feuilles
commencèrent à tomber. Pourtant Arnold continua ses visites encore quelques
temps.
Une nuit,
la température baissa et frisa les zéro degré.
Le
lendemain, le soleil brilla encore faiblement mais en ce beau jour, il disparut.
Marie-Thérèse
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire