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Aujourd’hui,
il pleut ! Et ce sont les vacances. Nous voilà cantonnés dans la petite
salle à manger de l’appartement que nos parents ont loué. Allons-nous nous
ennuyés ou faire des bêtises ? Non, maman a le remède pour ce jour morose.
Elle sort de son armoire et avec quel respect, une jolie boîte rectangulaire en bois aux couleurs chaudes,
peut-être du tilleul, du peuplier ou du palissandre, je ne sais. Légèrement
plus grande qu’une feuille A4, mais c’est comme un véritable trésor que maman
dépose avec beaucoup de précautions au milieu de la table. Ce n’est pas une de
ces boites modernes en carton et aux couleurs voyantes. Non, sa particularité :
avoir ses bords légèrement renflés en arrondi ce qui permet au couvercle non
pas de s’enfoncer par-dessus mais au contraire de s’insérer délicatement entre
les rainures prévues à cet effet.
Fermée, la boite présente donc un fond plat à rebord et le bois est
ainsi protégé. Nous sommes ravis. C’est le jeu de « nain jaune », jeu
qu’elle tient de sa propre mère et qu’elle a conservé avec tant d’amour
et qui nous promet tant de plaisirs partagés!
Nous
sommes là attentifs car c’est maman qui va l’ouvrir. Avec soin, elle tire
lentement le couvercle. Il ne faut pas le brusquer ni le forcer car il pourrait
rester bloqué voire, plus grave, se détériorer. Les jetons de toutes les couleurs
apparaissent : des jaunes, des verts, des rouges, des bleus, des ronds,
des carrés et des rectangles sur lesquels sont inscrits « La
Cressonnée », « PERNOD FILS » ou « COINTREAU
Liqueur », avec au dos leur écusson. Sont-ils d’époque ou plus
récents ? En tout cas, ils n’étaient pas neufs dans les années 50 mais en
excellent état.
Le
coffret est ouvert. Au dos du couvercle enlevé, soigneusement collée sur le
bois, une feuille de papier imprimée
donne la règle. Elle ne risque pas de s’envoler ou de se perdre et, à
tout moment, peut être consultée. Maman le range précieusement sur l’étagère où
il attendra la fin de la partie. Elle
saisit, au centre, le jeu de 52 cartes qu’elle pose immédiatement sur le côté. Puis elle retourne la boite. Les jetons
s’éparpillent sur la table et nous nous faisons une joie de les séparer par
catégorie avant de se servir car ils représentent notre petit trésor de départ.
Les ronds valent 1, les carrés 5 et les rectangles 10, quelque soit la couleur.
Dans le grand coffret, se trouvent cinq
petites cases amovibles dans lesquelles vont miser les joueurs. Celle du
centre, carrée mais posée comme un losange, porte en son fond l’image d’un nain.
Vêtu d’un habit jaune et coiffé d’un chapeau d’arlequin multicolore, il semble
agiter ses grelots tout en brandissant la
carte du 7 de carreau : celle qui rapporte davantage car chaque joueur y mise
5. Sur les autres cases rectangulaires mais avec un côté coupé en oblique pour
s’encastrer avec celle du centre, sont peints successivement, le dix de
carreau, le valet de trèfle, la dame de pique et le roi de cœur. Que d’émotions je ressens en revoyant ces
petits personnages au fond de leur case et dont la couleur a à peine pâli !
Je me
rappelle maman prenant les belles cartes glacées qui glissaient si bien dans
ses mains et qui paraissaient toujours aussi neuves comme sorties de leur étui
pour la première fois. Elle les battait, une fois, deux fois, trois fois, et
après les avoir fait couper, elle les distribuait en prenant bien soin de
laisser un talon. Chacun alors, du plus petit au plus grand s’empressait de les
ranger dans l’ordre : As, roi, dame, valet, dix, neuf etc… Il
n’était pas besoin de savoir lire pour déjà s’enthousiasmer et avoir envie de
gagner ! Et nous pouvions alors jouer pendant deux heures au moins. Le
temps passait bien vite ! La partie terminée, avec autant de soin, maman
rangeait à nouveau le jeu dans son armoire comme un bien très précieux.
Plus
tard, quand nous venions en vacances, maman sortait à nouveau sa boite et
jouait avec ses petits-enfants. C’est
ainsi que devenue maman, j’ai joué, avec quelle émotion, avec mes enfants petits ! Puis un beau
jour, nous avons eu la boîte en cadeau et l’avons emportée avec joie, à la
maison. Que de bons moments avons-nous passé ensemble ! Les enfants grandissant, le jeu n’a pas été
oublié mais soigneusement rangé pour, de nouveau, réapparaitre avec mes
petits-enfants. A leur tour, ils ont apprécié « le nain jaune » et ne
manquaient pas de le réclamer lors de leurs séjours,. Ils prenaient vraiment
beaucoup de plaisir pour ce jeu facile et attrayant. Pour moi, c’était un
moment à la fois très agréable et très émouvant, fait du souvenir de mon
enfance et du plaisir partagé.
Maintenant,
le coffret dort sagement dans l’armoire en attendant peut-être qu’il serve à
son tour pour mes arrière-petits-enfants. Qui sait ?
Marie-Thérèse
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Je me
souviens d’un petit cheval en carton, des dominances vertes de sa robe, sa
crinière en fourrure, la selle marron, les rênes, ses grands yeux semblables à
ceux des chevaux de bois des manèges. Ses pattes étaient solidement fixées sur
une planchette marron à roulettes. Il était fait pour supporter un enfant de 2
à 4 ans. J’ai pu le chevaucher un an de plus. Je passais des heures dessus, le poussant avec mes pieds et mes
petits pistolets à amorces. Je sauvais le monde en faisant fuir les bandits. Je
ramenais la paix dans les villages, fière de mon étoile en carton dorée. Je
chantais les chansons d’Yves Montand en agitant la corde à sauter qui me
servait de lasso. Il chantait ‘Chikita’. C’est le nom que je donnais au cheval.
C’était mon ami et mon frère car celui-ci l’avait reçu pour son dernier
Noël ; c’était ses deux ans. Dans le mois, il disparut. Il aurait bien
joué avec ce cheval comme moi quatre ans après. J’en parlais souvent à mon
compagnon de jeux. J’aurais tant aimé qu’il revive. Où est mon petit cheval de
carton ? Il a dû faire le bonheur d’un autre bambin. J’avais fait mon
entrée à l’école primaire où j’apprenais à m’instruire ce qui m’était agréable.
Adieu peluches et cheval de carton ! 1949 est là. Un autre monde se
construit !
Mireille
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Bernard
était un poupon en celluloïd de la taille d’un nouveau-né.
Je suis
devenue sa petite maman vers 1945. Étant une petite fille craintive et
anxieuse, quand je l’avais dans les bras, je faisais corps avec lui et devenais
plus forte car je devais protéger mon bébé symbolique. C’est comme cela que je
l’ai emmené en classe en fin d’année scolaire, invincible avec lui car j’en
étais responsable.
Je pense
que l’instinct maternel habitait déjà la petite fille. Je n’ai pas oublié la
petite barbotteuse tricotée en laine bleue avec laquelle je l’habillais. De
peur qu’il n’ait froid, je l’enveloppais dans un grand burnous blanc. Un petit
drap, une petite couverture et en route dans sa petite poussette pour l’emmener
avec moi.
Bernard,
mon baigneur, a fait partie de ma vie de petite fille. Il a été vacciné :
trois petits trous dans son bras en celluloïd. Avec le temps, le visage avait
pâli à cause des toilettes à l’eau et au savon. Ayant subi quelques
maltraitances involontaires, ses jambes étaient réparées avec du sparadrap.
Lorsque
je suis devenue adulte, mariée et mère, mon poupon a été remisé au grenier, à
Gentilly. Un peu d’intérêt pour lui m’a fait le rechercher et ne le trouvant
pas, je m’enquiers de son sort auprès de mon mari qui me répond :
« Ah, j’ai jeté ce vieux machin décoloré et couturé de
sparadrap ! »
Josiane
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Si vous
saviez comme vous avez compté poupées mannequin. Vous n’étiez pas que des
pantins désarticulés entre mes mains
mais des petites fées. Vous vous demandiez peut-être ce qui m'attirait le plus
chez vous ? S’agissait-il de vos cheveux rétractiles grâce au bouton dans
votre dos que je coiffais avec langueur et volupté comme les miens avec une
brosse minuscule ? Ou était-ce vos tenues indispensables pour sortir par
grand vent avec votre manteau CHANEL ROSE COMME IL SE DOIT POUR UNE FILLE et
votre sac à main Dior évidement ? Ou encore la tenue de cocktail et la
petite coupe de champagne ? Et quand viennent les grands soirs ou soirées
mondaines qui riment avec lamé doré et décolleté plongeant, strass et colliers
de perles aussi luisantes et nacrées que
vos dents ? Je vous aimais mes poupées. Vous étiez mes bébés. Je vous aimais
quand de vos grands yeux à la Betty Bopp vous me regardiez sage comme des
images, attendant que je souligne d'un trait de crayon vos paupières de biches,
ou que je rehausse votre tenue d'apparat d'un boléro de dentelle pour vous
rendre au Balajo ou à la Scala. Que de rêves, de pulsions, de tendresse et de passion
n'avez-vous pas éveillés et électrisés en moi. Je vous parle ainsi de cette
lumière qui incite toute petite fille à se prendre pour un mannequin de Vogue
ou d’Elle, les grands magazines de mode féminine qui ont perduré depuis. Petites poupées aux jambes immenses d'un
galbe parfait à qui je prêtais aisément le rôle de Gisèle ou de Copélia dans un ballet de Tchaïkovski. Charmantes
petites nymphes qui articuliez vos bras dans un arrondi gracieux et gracile et
dans des arabesques et ronds de jambe que personne n'auraient imaginé avant.
Vous m'accompagniez avec vos mouvements. Je me confondais en vous en figure de
mode du moment harmonieuse, esthétique et artiste à la fois. Je vous dessinais
et en vos yeux immenses je plaçais cette flamme de la passion. Que la culture
et l'éducation vous seyaient à merveille ! Vous étiez mes élèves. J'étais
donc votre professeur. Vous étiez mes modèles, j'étais votre maîtresse. Je vous
croquais des yeux. Vous me regardiez placidement. Petits pantins en qui je
mettais ma confiance. Où vous trouvez-vous ? Jetées à la poubelle par une
main indifférente, importunée par votre présence, ignorante de notre passé ? Où
êtes-vous, vous qui avez tant compté
pour moi ? Celles à qui je parlais et à qui je confiais mes secrets
par l'intermédiaire de l'écriture, du dessin et de la lecture. Vous m'avez
transportée dans un autre monde celui enchanté des filles et du monde féminin.
Vous m’avez permis de mieux comprendre celui de ma grand-mère qui petite main
au service de son cher mari tailleur de métier s’habillait de la tête au pied
en petit costume rose et escarpins assortis. Vous m’avez permis
d’apprécier les différents tissus que je tenais entre mes mains, cette
étoffe de soie qui glissait entre mes doigts et les siens m'ont ouverts un
univers incroyable de sensations, de visions d'odeurs et de chaleur. Nous
passions du temps à confectionner des tenues d’or ou d’argent, de mousseline ou
de taffetas pour mes nymphettes d'un soir. Merci Mamie de m'avoir appris à
coudre à cette occasion. Toi seule possédais la patience et la passion
pour m'expliquer sans t'énerver les petits points et les surjets, les
finissions et les ourlets. Merci ma Mamie tu résideras à jamais au fond de mon
cœur. Nous avons su recréer toutes les deux un monde de rêve meilleur et
de bonheur.
Claudine
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Je me
souviens d’un singe en peluche rousse avec une longue queue, un peu dégarni,
des mains trouées, des yeux noirs brillants collés sur du carton qui ne
l’avantageaient pas. Il me faisait peur. Je ne voulais pas le voir. Il
appartenait à ma sœur qui l’avait reçu en cadeau dans sa petite enfance.
Dans mes
premières années, je voulus bien l’incorporer dans mes jeux. Il s’appelait
Dudule.
Je lui
fis tenir le rôle du père qui me forçait à manger ma soupe. Je m’installais
sous la table ronde recouverte d’un grand tapis de table conçu point par point
en tapisserie. C’était un chef d’œuvre qui descendait jusqu’à terre. Bien
protégée, j’y installais ma maison pour jouer à la dînette avec mes poupées. Ma
maman me donnait un peu d’eau et de café pour verser dans les assiettes.
C’était amer mais je jouais la scène. Je devais boire les soupes. Les
autres avaient des compliments et moi je
tenais tête à Dudule, ce père improvisé. Je me retrouvais dehors (hors de la
table) jusqu’à ce que je finisse cette soupe amère qui me donnait envie de
vomir.
Deuxième
tableau : Je préparais mes noces avec Dudule. C’était beaucoup de
préparations, des rideaux faisaient office de toilettes. Je disais «oui» au
maire. Evidemment, je jouais tous les rôles. Le repas de noces était selon le
moment : des mûres, du sucre, pas grand-chose mais c’était loin des
histoires avec mon Prince Charmant rencontré par hasard dans des circonstances
imprévues et qui se terminaient bien.
Le
troisième scénario : J’étais chef indien avec mon arc à flèches et mon
couteau en carton. Dudule assis sur son trône avec des présents, était le Grand
Manitou. Je dansais, je chantais pour faire venir le soleil, la pluie, la
gloire.
Ces trois
histoires que je vivais régulièrement dans les années 40, se sont arrêtées avec
mon entrée au C.P. J’ai réalisé que Dudule n’était pas là pour me faire peur.
Je le mis donc de côté.
Je
n’avais pas de peluche à moi à câliner. Je ne sais pas ce que Dudule est
devenu. Mais il a tenu une place dans ma petite enfance. Il m’a servi à exprimer
mes manques et à prendre confiance en moi.
Depuis,
j’ai reçu des peluches en cadeau, des délicieux Kiki dont il ne me reste qu’un
exemplaire, depuis plus de trente ans, avec son petit biberon. Ses doigts sont
un peu rongés mais qu’importe ; je le garde quand même.
Mireille
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