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Lors de
la dernière guerre mondiale, les services secrets britanniques se livrèrent –
sous le nom de code « Fortitude » - à une monumentale mise en scène
visant à faire accroire aux Allemands que le débarquement des Alliés se ferait
ailleurs qu’en Normandie et plus précisément dans la région du Pas-de-Calais.
Sur des
hectares aux confins de Douvres, on étend une myriade de simili-avons,
blindés ; barges et autres engins de guerre, réalisés en carton-pâte.
Les
avions de reconnaissance allemands, contraints de voler à très haute altitude
pour échapper aux avions de chasse anglais – les redoutables Spitfire –
rapporteront à leur retour, les photos d’une énorme concentration de moyens
militaires alliés, présageant une intervention dans la région, c’est-à-dire ailleurs
qu’en Normandie.
Les
Allemands iront, par conséquent, cantonner leurs corps blindés dans le
Pas-de-Calais où ils se trouveront coincés, les bombardiers alliés s’empressant
de détruire ponts et voies ferrées.
Le
trompe-l’œil « Fortitude » aura pleinement réussi modifiant le cours
de l’Histoire. Les apparences sont vraiment trompeuses.
Emmanuel
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Avec son costume d’un gris clair, très
particulier, sa chemise blanche et sa cravate de couleur fondue qu’il change
chaque jour, ce chef de service est,
pour Blandine, le symbole même de l’élégance et du sérieux. Toujours courtois
avec ses collègues comme avec ses subordonnés ou autres membres du personnel,
il émane de lui une sorte d’attirance bien qu’il garde toujours ses distances.
Jamais, elle ne l’a entendu rire aux éclats ou s’esclaffer comme le font
d’autres chefs à des moments de pause. Seul se dessine sur son visage, un léger
sourire montrant qu’il n’est pas indifférent à son entourage.
Il n’élève jamais la voix. Fort aimable,
il parle toujours d’un même ton tranquille. Arrive-t-elle en retard ? Pas
de reproche ni de ton acerbe ! Il l’accueille de ces mots « Un petit
problème, ce matin ? » Son ton doux et calme la fait
bafouiller : «oui, excusez-moi, Monsieur, problème de réveil ou de
transport… ». Son travail ne lui donne-t-il pas entièrement
satisfaction ? Il prend le temps de lui expliquer pourquoi cela ne lui
convient pas. Il ne se départit jamais de son calme. Rien ne semble l’énerver
ni le faire sortir de ses gonds. Ses questions se résument souvent à un ou deux
mots sollicitant de son vis-à-vis
, une réponse plus circonstanciée. Petit à petit, elle se laisse aller à quelques confidences. Il sait si bien écouter !
, une réponse plus circonstanciée. Petit à petit, elle se laisse aller à quelques confidences. Il sait si bien écouter !
Semblable à une Dionée, ouvrant ses
grandes feuilles vert-amande, groupées par deux comme une paupière qui se
soulève, découvrant un fond d’œil rose aussi doux qu’un coussinet, il a su la
duper car, comme lui, le battement des petits cils de cette fleur cache
un piège mortel. Elle saisit sa proie et l’engloutit! Lui aussi, cache souvent son regard sous ses
paupières à demi-fermées mais au départ, Blandine n’a pas remarqué ce détail,
pas plus qu’elle n’a prêté attention à la disparition brutale de certains
employés. Elle se rappelle seulement, cette phrase qu’elle lui a entendu dire,
à plusieurs reprises, toujours sur un ton doux et calme, presque
chaleureux : «Je vous souhaite bonne chance !», phrase qu’il
prononce généralement en haut de l’escalier quand l’employé disparait en
direction du bureau du Personnel et qu’on ne le revoit plus.
Peu à peu, il a gagné sa confiance et
elle lui a raconté des propos plus personnels sans même se rendre compte qu’il
note tout, absolument tout, pour chacun de ses subordonnés : retard,
négligences, incompétences, absences, vie privée.
Un jour alors qu’elle revient d’un
week-end un peu harassant, son chef l’accueille comme à son habitude. Sur le
même ton que, pour la première fois, elle ressent doucereux, il lui
dit « Blandine, je vous trouve très fatiguée ces temps-ci, je pense
que ce poste est trop lourd pour vous. Allez donc voir Monsieur Taillade !
Il vous attend. » Il l’accompagne jusqu’en haut de l’escalier et elle
entend alors la phrase fatidique : « Je vous souhaite bonne
chance ! » Tous les détails lui reviennent d’un coup. Elle comprend
alors qu’elle est virée. Elle a été bien trop confiante, endormie par sa
bonhommie de façade. En descendant les escaliers, Blandine se lamente mais un
peu tard : « Les
apparences sont vraiment trompeuses ! »
Marie-Thérèse
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Lao Tseu
dit que « tout est double et contradictoire, en ce bas monde ».
Qui n’a
jamais vu un chat tourner autour d’une armoire à glace, avec défiance, croyant
voir un congénère et pas forcément sa propre image ?
Que dire
du thème abordé par La Fontaine, dans ses nombreuses fables, à propos de ceux
qui lâchent la proie pour l’ombre, séduits par les mirages, l’appel des sirènes
ou le miroir aux alouettes ?
Paradoxalement
l’homme ne contrôle pas systématiquement ses préjugés et ne gère pas
correctement ses émotions, comme le démontre Pascal, dans les Pensées, avec
l’expérience du vertige, déclenchée quand toutes les conditions de sécurité
sont réunies : on fabrique un imaginaire danger, un peu comme Les dents de
la mer, que l’on regarde, confortablement assis dans son canapé.
En
société, toutes classes confondues, des individus peuvent avoir un comportement
« normal » en groupe et ses livrer, dans le cercle familial, à des
turpitudes dévastatrices, tant sur le plan matériel, moral que vital : on
ne sort jamais indemne des griffes des pervers de tous acabits. Ces fruits
vénéneux, ces produits toxiques et frelatés, peuvent être des notables se
livrent à des sévices sur des enfants, même au su de leur entourage complice
actif ou passif : les intérêts matériels et une réputation qui n’a jamais
existé prédominent. Les pratiques déplorables de harcèlement, à l’encontre des
personnes âgées, sont monnaie courante.
Un tel,
pour maintenir son train de vie, calmer momentanément ses addictions,
dépouillera des personnes sans défense ou des proies consentantes.
« L’habit
ne fait pas le moine », le loup sait aussi montrer patte blanche, inventer
des prétextes fallacieux, des parades, pour rentrer dans la bergerie, les
victimes ne seront pas blanchies, le grand prédateur ne sera pas
systématiquement noirci. Personne ne nous rendra la vie.
Dans les
Fables de La Fontaine, on trouve deux grandes catégories : les herbivores
sont dévorés par les carnivores et non l’inverse, en général : est-dû à la
loi de la nature ou aux conventions sociales qui régissent la société
font-elles loi pour nous inciter à la résignation, à la complicité passive, à
l’acceptation hypocrite ?
Que dire
des vastes avenues de tous les dangers, de la Toile, pavées d’écueils,
jalonnées d’ornières, ornementées de râteaux ?
L’interface
séduit par un pseudo-anonymat, attise la curiosité, par l’apparente
simplicité ; l’engourdissement qui en découle, mettant en veilleuse
l’attention et le discernement.
Dans tous
les cas, il faut comme le chat, faire le tour de l’armoire, de la boîte de
Pandore, essayer de comprendre ce qui se cache derrière les mots, les images,
le non-dit, les façades trop lisses pour être belles : il ne faut jamais
se fier aux apparences.
Marie-Christine
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En visite dans de la famille en Normandie, une surprise nous
y attendait : la chatte siamoise avait eu des petits. Ce n'était pas sa
première portée mais cette fois nous a rivions au bon moment pour découvrir le
dernier chaton à qui il convenait de trouver une famille, une chatte plus
exactement nous précisa-t-on lorsque nous fîmes sa connaissance.
Comme toujours, la belle chatte de race de la maison, peu
fière de ses origines, avait été fidèle à son mâle compagnon des gouttières,
ses petits sont donc toujours les mêmes, d'un beau gris bleuté. Mésalliance ou
pas, le fruit de leurs amours est de toute beauté.
Cette petite chatte était tout juste sevrée et pouvait donc
désormais quitter sa mère. On questionne : est-elle propre si jeune encore ? Il
nous est répondu par l'affirmative, et même bien plus que sa mère qui elle
souille tapis et moquettes partout dans la maison ! Et... on craque ! c'est
décidé, elle repart avec nous, sa famille d'adoption est donc trouvée.
Elle s'habitue très vite à son nouvel environnement et
semble avoir oublié sa mère, fille ingrate ! De son côté, la mère ne cherche
t-elle pas son dernier petit ?
Elle se montre très joueuse, on la suit, la poursuit, on
participe à ses jeux, on rit, qui s'amuse le plus au final ? Elle s'attache
vite à nous et dès qu'elle entend l'un de nous, son museau a vite fait
d'apparaître. Elle fait maintenant partie de la famille et se montre très douce
et gentille, même envers un nouvel arrivant, apprenant ainsi à le connaitre. Cette douceur vient peut-être
du fait que ce soit une femelle, on dit les femelles plus câlines, plus douces
chez les animaux...
Sa démarche aussi nous amuse, tout en grâce et en légèreté,
comme si soigner son apparence était important. Encore un « truc »
propre aux filles dirait-on chez les humains. Oui, effectivement, elle est bien
féminine jusqu'au bout des griffes !
Elle fait preuve aussi d'un bon appétit et ne se montre
guère difficile. Du moment que son écuelle est remplie, elle mange. Et
effectivement, pour confirmer ce qui nous avait été dit : elle est très
propre. Aucun problème dans la maison,
elle a instinctivement adopté la litière mise à sa disposition.
Il a bien sûr aussi fallu lui trouver un nom. Et nous avons
choisi celui de Prunelle, à cause de son doux regard qui se pose sur nous. Ses
yeux sont tellement expressifs qu'à certains moments on a l'impression qu'elle
va nous parler ! Mais même la plus gentille des chattes ne peut parler, comme
c'est dommage !
Et ce nom, elle s'est y est vite habituée aussi. On
l'appelle et elle accourt ; et alors, ce sont des parties de cache-cache sans
fin qui commencent à chaque coin de couloir. Prunelle a donc bien enregistré
son nom., tout va donc pour le mieux.
Un jour cependant Prunelle semble malade, elle vomit. Que
peut-elle bien avoir ? Et comme ce dérangement persiste et qu'on ne peut se
l'expliquer, il est décidé qu'elle va aller faire sa première visite chez le
vétérinaire, ce sera aussi l'occasion de procéder à sa vaccination. Et, par la
même occasion, nous avons l'intention de nous renseigner sur le moment propice
pour la faire stériliser. Nous l'aimons beaucoup mais ne voulons pas qu'elle prenne le chemin de sa
mère.
Le vétérinaire nous rassure de suite sur son problème
digestif, il a vite fait d'en trouver la cause après nos explications. Nous
abordons ensuite avec lui le sujet de sa stérilisation : à quel âge il faut
l'envisager, comment cela se passe-t-il exactement, va-t-il garder notre chatte
après l'intervention, etc.
Pour commencer, le vétérinaire sort une fiche pour identifier
sa nouvelle patiente. Il y indique tous les renseignements la concernant : nom,
race, date de naissance, poids, etc. Et il procède ensuite à un examen
minutieux de notre petite Prunelle qui se demande bien pourquoi ce monsieur la
regarde ainsi dans tous les sens, avec tant d'attention.
Et là, tandis que le vétérinaire termine son examen, il nous
informe avec amusement que nous allons devoir lui choisir un autre nom : notre
chatte est en réalité un beau chat ! Nous en restons sans voix, la famille
ayant l'habitude de ces naissances, jamais nous n'avons douté de leurs dires
quant au sexe de ce chaton. Le vétérinaire explique que ces erreurs arrivent
parfois, il est assez difficile de distinguer le sexe d'un nouveau-né chez nos
amies les bêtes. Et de notre côté, il faut bien dire que ce n'est vraiment pas
l'endroit que nous regardions le plus.
En guise de consolation, le vétérinaire nous annonce que de
ce fait nous allons réaliser une belle économie, castrer un chat est moins
coûteux que stériliser une femelle. Certes...
Pauvre Prunelle, nous ne comprenons pas, tout chez ce chaton
nous semblait évoquer plutôt de la féminité, son regard, sa démarche, sa
douceur.... rien de viril dans tout ça à nos yeux. Et pourtant, le vétérinaire
ne peut se tromper, il est formel.
Le « chat » fut donc castré et récupéré le soir
même chez le vétérinaire. Et nous avons décidé de lui conserver son prénom,
l'animal s'y était déjà bien habitué. Quelle importance après tout ? Elle du
moins, ou plutôt lui maintenant, ne semblait pas en prendre ombrage.
La morale de cette histoire est qu'il ne faut donc jamais
prendre tout ce qui est dit pour argent comptant car les apparences sont
vraiment trompeuses.
Paulette
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Un jour, descendant dans mon jardin,
j’avisais une petite pousse inconnue, là, au milieu de nos plants de salades.
Tiens, me demandais-je, qu’est-ce que c’est. Je décidai de la laisser pousser
tranquillement malgré la réprobation de mon mari qui la considérait comme une
mauvaise herbe. De jour en jour, elle prospérait, pas forcément très belle mais
étrange avec son feuillage d’un vert argenté ? je n’en avais jamais vu de
semblable. Là au milieu de nos salades, elle se mit à les dépasser en taille,
en couleur, bref en tout. Ma perplexité grandissait avec elle. Quelle était
cette plante, d’où venait-elle ? Qui était-elle ? Un après-midi je
remarquai un petit renflement entre deux feuilles. Perplexe, je me dis :
on verra bien demain !
Le temps des vacances arriva et nos
petits-enfants débarquèrent par un bel
après-midi. La joie de nos retrouvailles, la promesse des jours heureux à venir
nous comblait. Nous délaissâmes le jardin, arrosage mis à part, pour aller
visiter les environs, surtout les parcs d’attractions et la piscine municipale.
Pendant ce temps, la soi-disant mauvaise plante grandissait et un matin, je vis
que le petit renflement s’était changé en une magnifique fleur, d’une beauté
tout à fait inattendue. Comme quoi, les apparences sont vraiment trompeuses.
Colette
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J’ai
vécu à Avon, petite ville adossée à Fontainebleau de 1949 à 1952. J’étais
pensionnaire au collège technique Uruguay-France. La pension était située à
côté d’un établissement religieux, le Couvent des Carmes. Seul un grand mur
mitoyen séparait les deux institutions et à l’époque, je me suis souvent
demandé ce qu’il y avait de l’autre côté du mur. Les Carmes étaient des moines
austères, habillés d’une grande robe de bure marron, une corde à la taille, les
pieds nus dans des sandales de cuir. Dans ce couvent, à Avon, ils accueillaient
de jeunes garçons qui faisaient leurs études secondaires. Nous n’avions aucun
contact avec les religieux, sauf les jeunes filles de mon collège qui allaient
à la messe et à cette occasion rencontraient les pensionnaires des Carmes.
En 2006,
une amie et moi décidons de passer quelques jours à Avon, au centre spirituel
des frères Carmes. Malgré mon âge, à ce moment-là, j’avais toujours envie de
savoir ce qui se passait de l’autre côté du mur. Nous sommes arrivées dans une
oasis de verdure et de calme. Les laïcs assurent l’accueil et
l’intendance ; les frères n’étant plus très nombreux et vivant en retrait.
Quelques
personnes sont là, en retraite. On nous indique que le silence doit être
respecté et que l’on ne doit pas parler. Protégées, entourées par ces hauts
murs, la paix et le calme nous accompagne dans ce face à face avec nous-mêmes.
Les repas sont difficiles pour moi. Les retraitants ne se parlent pas, ne se regardent pas, ne disent ni bonjour ni
merci. Je le vis mal ; l’autre, le prochain existe pour moi et j’en ai
besoin. Il y a cinq offices religieux auxquels je n’assiste pas car je ne suis
pas pratiquante, alors je vais m’immerger dans le grand jardin. Les hirondelles
m’accompagnent, elles ne sont pas farouches. Des rosiers anciens s’appuient sur
les vieux murs, il reste quelques arbres centenaires, du lierre, des iris, de
l’herbe folle et une tonnelle, puis les tombes des frères car ils sont enterrés
ici ; une plaque commémore l’action d’un Juste qui a caché des enfants juifs
durant la guerre et qui est mort en déportation.
Dans le
jardin je me sens mieux que parmi les humains, protégée, à l’abri.
Le séjour
se termine et nous devons repartir. Nous voilà dans les rues d’Avon, en
direction de la gare, notre valise à la main. Un homme à bicyclette, vêtu avec
simplicité vient vers nous. C’est un grand et bel homme, aux cheveux blancs et
au regard profond, la cinquantaine. La conversation s’engage, je fais part à ce
frère en civil de mes réflexions et interrogations sur notre séjour et les
relations humaines. La discussion est longue, riche et profonde. Il
conclut : Dieu est en chacun de nous madame. Ce bel homme très intéressant
repart finalement.
L’habit
ne fait pas le moine comme on dit et les apparences sont vraiment trompeuses.
Josiane
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Lise
était aux anges. Elle venait de commencer une histoire amoureuse avec un
collègue d travail que beaucoup d’employés convoitaient. Il était charmant,
enjôleur, un beau visage aux traits fins, sa façon de parler aux femmes leur
disant les mots qu’elles avaient envie d’entendre accompagnés d’un langoureux
regard, toujours séduisant, bien coiffé, parfumé, vêtu de costumes élégants. Ce
qui n’était pas le cas de son collègue de bureau qui, contrairement à lui,
passait pour un ours, mal coiffé, mal rasé, vêtu d’un pull presque toujours
pareil, un jean, des baskets usagées.
Lise
faisait un bout de trajet avec ce dernier. Son amoureux, lui, avait une voiture
de sport mais ne l’accompagnait pas prétextant sortir plus tard, ayant un
travail à finir. Pourtant Lise se demandait pourquoi, elle qui était si simple
et romantique, alors que tant de filles canon lui tournaient autour. Mais
lorsqu’elle lui posait la question, il répondait qu’elle était la seule à avoir
attiré son attention car elle était différente.
Un
soir qu’elle se dirigeait vers le R.E.R., elle retourna sur ses pas, ayant oublié son portable au bureau. Elle en
profita pour aller faire un petit coucou à son amoureux mais la porte du banc
de reproduction était fermée. Elle ressortit étonnée. Ce qu’elle vit, la
plongea dans un désespoir profond. Elle vit l’objet de ses pensées, enlaçant
une superbe blonde qui monta dans sa voiture. Elle se sentit humiliée, ayant
honte de la crédulité dont elle avait preuve.
Après
avoir rompu avec ce garçon qui se conduisait comme un goujat, lui reprochant sa
bêtise, la vie reprit son cours, les quolibets cessèrent peu à peu. Le soir,
elle était contente de retrouver son compagnon de route qui savait l’écouter
sans la juger. Malgré son aspect négligé, elle aimait son regard doux et
caressant qui semblait la comprendre. Une amitié s’était tissée au fil des
jours. Un vendredi soir sur le chemin de retour, il lui proposa de déjeuner
avec elle, le lendemain. Elle avait envie de mieux le connaitre, mais elle
était gênée par sa tenue négligée et d’être vue en sa compagnie. Pourtant elle
s’y risqua, lui donnant rendez-vous à l’entrée du R.E.R., à St Michel. Lorsqu’elle
arriva le lendemain, elle ne le vit pas.
Un bel homme sortit d’une voiture en souriant avec un regard amusé. C’était
bien lui ! Bien coiffé, bien rasé, vêtu d’un costume élégant, tout ceci
pour lui plaire ! Elle le trouva fort séduisant. Elle passa une excellente
journée. Elle avait des regrets de s’être fiée aux apparences. Par fierté et
par préjugés, elle allait passer à côté d’une belle histoire d’amour qu’elle
vécut intensément.
Les
apparences sont vraiment trompeuses.
Mireille
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Je
l’entends encore susurrer du bout des lèvres et du bout des yeux des mots
sucrés et des « Bonjour Madame » et des « Je suis enchanté de
faire votre connaissance ! » et ne peux m’empêcher de penser que cet
individu est trop poli pour être honnête. Puis, je le vois détourner le regard
et sembler gêné par le mien. Se sentirait-il intimidé ou inquiet ? Mon
regard se montrerait-il trop inquisiteur ? Nos regards finissent par
s’éviter et je repars avec cette impression de ne pas avoir percé à jour cette
merveille des merveilles de la bienséance.
Quelques
années plus tard, je me remémore ce moment et cette scénette tourne encore dans
ma tête comme un refrain que l’on fredonne tout au long de la journée, et les
mêmes questions reviennent hanter mon esprit. Était-il sincère ou essayait-il
de caresser la bête dans le sens du poil ? Peu loquace et fort discret,
l’individu en question ne m’a plus jamais tenu ce discours… l’aurais-je déçu en
quoi que ce soit ? Se contient-il maintenant ? Peut-être n’ose-t-il
plus m’adresser de compliments en réaction à ma stupéfaction de ce premier
moment. A-t-il réalisé que ces paroles m’étaient apparues sur le moment fort
désuètes dans cette époque contemporaine où la politesse est si souvent bafouée
et jetée aux oubliettes ? J’en reste toujours sur mon séant. Quel effet
voulait-il produire ? A être confrontée à des personnes ignorant le B A BA
de la délicatesse, je me trouve face à un dilemme. Je suis dubitative. Plus j’y
pense et plus je me demande si c’est du lard ou du cochon ! Était-ce dans
son éducation ? Ou a-t-il entendu ces paroles dans l’une de ces séries à
l’eau de rose et au goût d’antan comme Amour
Gloire et Beauté ou Les feux de
l’amour ? Finalement, je décide d’y croire. Et pourquoi pas ? Mon
scepticisme cède face à mon optimisme. Je choisis de ranger cette belle
formulation dans un écrin que je dépose comme un joyau dans mon tiroir à
secrets. Suis-je utopique, ou trop sectaire, idéaliste peut-être, ou encore
pathétique ? Ai-je envie de vivre dans une époque romanesque et de faire un détour vers le passé, entre
Chateaubriand, Flaubert et Stendhal ? Et j’en arrive à penser qu’il faut
toujours se méfier de soi-même et de ses aprioris avant de tailler un costume sur mesure à un parfait
inconnu, devenu un « incontournable » membre de la famille, toujours
aussi discret et ne tenant pas d’interminables discours, mais sachant prendre
position en ma faveur en défendant mes belles valeurs : le respect
d’autrui. Alors, j’apprécie. Et je me dis que les apparences sont vraiment
trompeuses.
Claudine
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