« Blanche
Neige », quel joli nom pour un lieu gravé à jamais dans ma mémoire !
et pourtant cela avait mal commencé. J’avais six ans et venais d’entrer à la
grande école ; au cours d’un dépistage consécutif à une cuti positive, on
me diagnostiqua une primo-infection ce qui me valut une interruption de
scolarité d’un an avec séjour en préventorium, en montagne, et bien sûr
éloignement de ma famille de même durée.
Le cœur
gros, quelques jours après Noël, je fis le voyage avec mon père. Du train, je
ne me souviens plus, seule la partie finale où je découvris la montagne enfouie
sous la neige m’est restée.
Blanche
Neige était un délicieux chalet où l’on soignait ce genre de primo-infections chez les
enfants. Il s’élevait, seul au milieu d’un plateau, en plein Chablais, près de
Morzine. L’établissement où seuls vingt enfants pouvaient être accueillis était
donc à taille humaine et, qui plus est, tenu par un personnel chaleureux et
qualifié. Cet encadrement riche et ouvert au milieu d’une nature presque
intacte qui je découvris au cours de ces quatre saisons, allait me marquer et
m’attacher définitivement à la montagne… et au monde de l’éducation.
1er
flash : la fin du voyage se fait en car. Je revois la neige qui tombait
dru au fond de la gorge profonde où bondissait la Dranse, la draperie des
stalactites de glace à l’entrée des grottes le long de la route et en bordure
des toits, enfin le car qui se faufilait toujours plus loin, prudemment mais
sûrement ; aux brefs arrêts le chauffeur déposait quelques voyageurs et livrait
diverses commandes… Mon père découvrait aussi la montagne et
m’encourageait : « tu en as de la chance de pouvoir vivre ici, au
milieu de cette beauté ! » Puis ce fut l’arrêt du bus convenu, notre
guide nous attendait. Le froid, la neige moelleuse sous mes pas, le raidillon
déjà sévère qu’il nous fallut emprunter pour accéder au chalet, un mélange de
silence et de bruits nouveaux dont le rugissement du torrent plus bas.
En
arrivant, tante Mimi m’accueillit, me fit découvrir Blanche Neige qui sentait
bon le pin et
tout le mobilier façonné à la taille des pensionnaires, comme
pour les nains de Blanche Neige. Pour moi, une vie nouvelle allait commencer.
Autres
flash : l’école s’inspirait de la pédagogie Freinet, fondée sur les
activités des pensionnaires, notamment les observations au cours des promenades
en pleine nature.
Je revois
encore le saupoudrage de neige des sommets voisins en septembre-octobre, avec
quelques ancolies au bord des chemins, profitant des derniers rayons du soleil
d’automne.
Enfin,
plusieurs fois revécu au cours de randonnées d’été, la fonte des neige et ses
miracles : crocus fleuris sous le manteau neigeux soudainement dévoilés,
petites pensées sauvages piquetant la prairie qui jouxtait Blanche Neige, à la
manière des tapisseries médiévales.
J’ai tiré
de cette découverte toutes sortes de bienfaits qui allaient me servir à
différentes étapes de ma vie, pourtant je n’ai jamais cherché à devenir
montagnarde… Ce lieu est ma réserve à moi, mon recours aussi et, comme tout ce
qui est précieux, il ne faut peut-être pas en abuser.
Françoise
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Le Bataclan - novembre 2015 |
Un lieu à
jamais gravé dans ma mémoire … Mon ancien quartier situé entre république,
Nation, Bastille. Quartier où j’ai vécu pendant plus de quinze ans et qui le 13
novembre 2015 a tristement fait parler de lui avec les attentats du Bataclan et
des terrasses de café de la rue de Charonne.
Oui, il y
a dans ce quartier des enfants aux yeux tristes,
Des
enfants aux yeux noirs, superbes et racés,
Il y a
dans leur regard es profondeurs divines,
Porteuses
de tendresse que personne ne connaît.
Il y a
des solitudes intenses et désertes,
Débordantes
des vents et des soleils lointains,
Des
soleils qui réchauffent les demeures inertes,
Aux murs
de béton gris, de ce vieux quartier.
Qui sont
enveloppés des odeurs de maïs grillé,
Une chambre au foyer du Palais de la Femme - rue de Charonne |
De la
terre rougie des reliefs du Maghreb.
Il y a
des mélodies qui vont jusqu’aux étoiles
Qui
partent enlacées en branches d’oliviers
Chanson
qui vient d’ailleurs, chanson qui porte l’âme,
Témoin
d’une illusion, présence d’un passé.
Il y a
des Castillans qui meurent la foi au ventre,
Ils
meurent dans l’aurore d’un automne glacé,
Des héros
oubliés que personne ne chante,
Mais ils
ont marqué l’histoire car ils ont tout donné.
Il y a
ceux qui se taisent, il y a ceux qui pleurent,
Il y a
ceux qui cheminent la passion dans le cœur
Démolissant,
tenaces, les barrières qui montent,
Qu’obscurcissent
et cernent les murs du vieux quartier.
Il y a
tant de fatigues, il y a tant de souffrances,
Il y a
tant de sourires et de chaleur ignorée !
Vous qui
voulez savoir comme on vit l’espérance,
Venez !
Prenez ma main, venez dans mon ancien quartier !
Mon vieux
XIème à rues étroites chargées d’histoire, jamais je ne t’oublierai !
Christiane
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Le lieu
de vie à jamais gravé dans ma mémoire est l’école de montagne, fréquentée du CP
au CM1 : nous étions cinq élèves.
Elle a vu
passer plusieurs générations d’enfants de paysans d’Arrous, Pertéguech,
Miramont, La Serre.
Je
parcourais deux kilomètres, quatre fois par jour, à travers prés, en traversant
le petit pont de bois régulièrement emporté par les crues lors de la fonte des
neiges.
Selon la
saison, j’apportais un bouquet de fleurs à la maîtresse : marguerites,
bleuets, orchis, lilas, myosotis, violettes, coucous, anémones, pivoines, roses
anciennes, iris, narcisses, dahlias écarlates, fleurs de topinambours, houx,
gui…
Personne
n’ayant l’eau courante, nous allions remplir quelques bouteilles à la fontaine,
pour faire les bouquets et nous laver les mains.
J’accrochais
la pèlerine dans le couloir de cette maison à un étage ; je gardais mes
sabots de bois, garnis de paille, façonnés par mon grand-père maternel dans un
morceau de peuplier équarri par ses soins.
Le
rez-de-chaussée de cette école était aménagé en salle de classe, avec deux
fenêtres donnant sur le chemin et le bois voisin, deux rangées de tables, aux
pupitres entaillés au couteau par les générations précédentes, étaient maculées
d’encre. L’encrier était rempli avec la bouteille remise dans le débarras
voisin avec les cartes de géographie Vidal-Blache. Un antique poêle Godin, le
seul de tous ces hameaux, avait failli nous tuer avec ses émanations. Nous nous
engourdissions quand le facteur, merci monsieur Massat, donna l’alerte :
nous fûmes copieusement mouillés, secoués, frottés, giflés, abreuvés de gnôle
artisanale par les paysans qui nous extirpèrent de notre léthargie, les uns
hurlant, les autres pleurant.
Le mur
était décoré avec une reproduction du tableau de Berthe Morisot et sa fille, tandis
qu’une vitre était ornementée avec un vitrail en papier polychrome et
translucide.
Les
cartes de géographie étaient accrochées sur le tableau de gauche qui était
réservé aussi à l’apprentissage du français, y compris de sublimes poésie qui
nous sortaient de l’ordinaire : V. Hugo, J. Richepin, Th. Gautier,
Lamartine, Fombeure, Carême, Vigny, La Fontaine, Ronsard, Du Bellay…
Nous
dessinions, calligraphions, élaborions des frises.
Nous
n’avions pas de cartable. Un voisin m’avait offert un crayon bleu à mine
grise ; l’institutrice nous fournissait le cahier. J’ai appris à lire avec
Rémi et Colette.
J’étais
émerveillée par l’existence de craies multicolores et la belle écriture de la
maîtresse.
Le
tableau de gauche était réservé au calcul ; souvenirs mouvementés de
fractions, fuites de robinets qui m’étaient inconnus, et autres pertes et
profits qui me valurent moultes taloches.
La
maîtresse régnait au bureau sur lequel était posé le cahier de progression
pédagogique qu’elle présentait à l’inspecteur qui rendit successivement visite
à mesdames Loubet, Géraud, Biros.
Nous
étions des enfants paisibles.
Les
toilettes rudimentaires de cet établissement se trouvaient à l’entresol : une planche était pourvue
d’un trou et le tout vidangé une fois l’an pour fertiliser la prairie voisine.
L’institutrice
avait son logement de fonction au premier étage, mais y séjournait rarement,
étant chargée de famille en ville, à St-Girons ou à Aulus-les-Bains. Elle se
déplaçait en moto, la route n’étant pas goudronnée, peu carrossable. Elle
garait sa moto à Pertéguech et finissait à pied le parcours d’un kilomètre la
séparant de l’école.
Sous le
toit, se trouvait le grenier où j’ai passé la première journée de CP car je ne
parvenais pas à dessiner correctement les ailes d’une hirondelle :
effectivement, elles n’étaient pas aérodynamiques, car trop épaisses.
Pendant
la récréation, nous jouions avec des billes végétales trouvées sur certains
chênes, aux barres, à cache-cache, à colin-maillard ; nous allions trouver
du petit bois pour alimenter le poêle, les grosses bûches étant fournies par le
père de Josette, Edmonde et Daniel.
Parfois,
j’emportais la gamelle de soldat paternelle, remplie de soupe pour la faire
réchauffer sur le poêle.
À la fin
du printemps, quand l’herbe devenait trop haute et qu’il pleuvait à verse, ma
mère m’enfilait tous les tabliers et vestes disponibles pour me protéger.
Arrivée dégoulinante à destination, l’institutrice me retirait toutes ces
épaisseurs et les étendait pour les faire sécher. Yvette avait quitté l’école
et ne pouvait plus « m’ouvrir le chemin ». Personne n’arrivait au
Certificat d’études, les familles avaient besoin de main-d’œuvre.
Je
reprenais les cours à la mi automne car il fallait aider aux récoltes de pommes
de terre, de topinambours, de châtaignes, de maïs, participer au dépiquage du
blé, de l’avoine, du blé noir, au fléau et avec le tarare dont on activait la
manivelle.
En hiver,
la maladie des congères et une hauteur de un mètre vingt de neige m’empêchaient
d’aller à l’école.
Cette
école, dont la cloche n’a jamais sonné car le battant en avait été retiré,
était un havre de paix, un espace de repos, le seul endroit où l’on s’occupait
de moi comme d’une enfant ; j’ai répondu à son appel, dans la mesure du
possible et lui dois ce que je suis devenue.
Elle a
définitivement fermé quand nous n’étions plus que trois ; il a fallu
partir vers d’autres cieux.
Marie-Christine
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Le lieu gravé à jamais dans ma mémoire n'a rien de
réjouissant, c'est même une horreur dont je vais vous parler.
Cette année-là, en février, nous passons une semaine de vacances dans les Vosges, plus précisément, à Schirmeck, petit Commune du Bas-Rhin située dans la vallée de la Bruche et qui fait partie de la région s'appelant dorénavant Alsace-Champagne-Ardenne, Lorraine.
Nous ne connaissons pas du tout la région,
l'endroit m'a été recommandé par un ami.Cette année-là, en février, nous passons une semaine de vacances dans les Vosges, plus précisément, à Schirmeck, petit Commune du Bas-Rhin située dans la vallée de la Bruche et qui fait partie de la région s'appelant dorénavant Alsace-Champagne-Ardenne, Lorraine.
Bien entendu nous profitons des joies de la neige qu'il faut aller chercher un
peu plus haut, au champ du feu. Les temps libres sont l'occasion pour nous de
visiter les environs : le col du Donon, le château du Haut-Koenigsbourg, Strasbourg
et bien d'autres lieux encore.
C'est au retour d'une de ces escapades que nous nous perdons sur notre chemin, par un temps avec un ciel bas, gris et triste donc, ce qui ne nous a pas aidé pour voir à temps la bonne route à prendre. Qu'importe, nous trouverons bien plus loin une autre route nous ramenant sur notre itinéraire.
Nous roulons sur cette route qui grimpe doucement, et plus nous avançons dans cet environnement désertique, sans aucune habitation, peuplé de forêts de sapins à perte de vue, plus nous nous sentons oppressés sans vraiment savoir pourquoi.
C'est au retour d'une de ces escapades que nous nous perdons sur notre chemin, par un temps avec un ciel bas, gris et triste donc, ce qui ne nous a pas aidé pour voir à temps la bonne route à prendre. Qu'importe, nous trouverons bien plus loin une autre route nous ramenant sur notre itinéraire.
Nous roulons sur cette route qui grimpe doucement, et plus nous avançons dans cet environnement désertique, sans aucune habitation, peuplé de forêts de sapins à perte de vue, plus nous nous sentons oppressés sans vraiment savoir pourquoi.
Nous guettons bien entendu la moindre indication qui pourrait
nous éclairer sur la bonne route à prendre et à un moment, nous apercevons un panneau où sont inscrits ces mots :
« zone de silence ». Cette inscription nous surprend, elle est
étrange et angoissante à la fois. Nous profitons d'une petite aire de parking
pour nous garer et comprendre ce qui justifie l'implantation de ce panneau dans
ces lieux.
Nous le comprenons bien vite à la vue d'un ancien mirador,
devant l'entrée de ce qu'il faut bien appeler un camp de concentration... Nous
saurons plus tard que ce camp, le Struthof, est l'unique camp de concentration
existant sur le territoire français et que les détenus de cet endroit venaient
de Pologne, d'Union Soviétique, puis de France, des Pays-Bas, d'Allemagne
également, et de Norvège. Il était réservé aux « ennemis politiques
incorrigibles du Reich »... Des résistants et des juifs seront également
emprisonnés dans ces lieux.
Les visites sont autorisées, nous décidons donc d'entrer. Là,
du haut du terrain en pente, nous découvrons l'empreinte laissée par les
anciens baraquements qui composaient ce camp, une indication précise qu'ils ont
été détruits en 1976 par des autonomistes alsaciens qui voulaient apparemment
effacer ce camp de toute mémoire.
Nous avançons et passons devant une ancienne potence qui nous apprend que là étaient pendues des victimes. En contrebas, des baraquements subsistent, nous nous y rendons en silence, les lieux en effet n'incitent pas à la conversation,. Je suis pétrifiée, mon sang est glacé dans mes veines, je n'arrive pas à croire que tout ce que je découvre ici ce jour-là, est
en
France, dans mon pays.
Nous avançons et passons devant une ancienne potence qui nous apprend que là étaient pendues des victimes. En contrebas, des baraquements subsistent, nous nous y rendons en silence, les lieux en effet n'incitent pas à la conversation,. Je suis pétrifiée, mon sang est glacé dans mes veines, je n'arrive pas à croire que tout ce que je découvre ici ce jour-là, est
Camp de concentration du Struthof |
L'un des bâtiments abrite une salle de dissection, ou d'autopsie.
On y voit encore la table de faïence blanche sur lequel étaient allongés les
corps des malheureux, avec au bout l'évier où s'écoulaient le sang et les eaux
usées. Nous apprenons que pendant cette horrible guerre, un médecin se livrait
là à des expériences pseudo « scientifiques » sur des détenus, les
soumettant à la peste, la lèpre et d'autres maladies aussi horribles, afin de
voir les effets de la contamination. Ceux qui parvenaient à survivre à ces
atrocités étaient assassinés, puis incinérés.
L'autre bâtiment nous fait
découvrir la chambre à gaz, le four crématoire. La porte de ce four est
ouverte, à l'entrée de ce four est déposé un bouquet de fleurs fraîches, en
souvenir de toutes les victimes qui sont passées par ces lieux sans nom. Des juifs
pour la plupart, mais pas seulement.
Cet endroit donne la chair de poule et, toujours en silence,
nous remontons vers la sortie où un petit bâtiment a été transformé en musée.
Là sont exposés sous vitrines des écrits, des petits objets retrouvés et ayant
appartenu aux victimes de toutes ces atrocités. On peut y voir aussi ces tenues
de déportés bien connues de tous, nous
laissant imaginer que des malheureux les ont portées avant d'être lâchement
exécutés, exterminés.
Près de l'entrée, en contrebas du mirador, on aperçoit ce qui
s'appelle « le ravin de la mort ». Là étaient fusillés des groupes de
déportés. Que de morts, tous les moyens de tuer étaient utilisés....
Nous quittons ces lieux, nous sommes encore abasourdis par ce
que nous venons de voir de nos propres yeux. Bien sûr nous connaissions
l'existence de tels endroits mais jamais nous n'aurions pensé en découvrir un
ici, au hasard de notre route, les habitants de la région sont bien silencieux
sur ce sujet...
Et voilà donc ce lieu qui restera à jamais gravé dans ma
mémoire.
Paulette
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S’il
est un lieu gravé à jamais dans ma mémoire, c’est bien la place Godefroy de
Bouillon où se trouvait la maison de ma grand’mère.
Nous
y retournions chaque été en voiture. Après un long voyage de deux jours, nous
entrions par la route de Paris et nous grimpions jusqu’à la haute ville. Juste
avant d’y pénétrer, Mariette, l’Egyptologue, la main sur tête d’un sphinx, nous salue du haut de sa pyramide. Devant nous, courent les remparts du XIII°s
et l’une de ses quatre portes : « la porte des Dunes ». Deux
tours cylindriques relient un mur épais percé d’une voûte pour laisser entrer
ou sortir les habitants de cette citadelle datant des romains. Dans sa partie
supérieure, une niche ogivale abrite une sculpture du début du XIX°
siècle : Notre Dame de Boulogne nous accueille. Assise dans sa barque
accompagnée d’un ange de chaque côté, elle protège la ville depuis son arrivée
dans le port, du temps dit-on du roi Dagobert. Nous franchissons cette enceinte
et pénétrons sur une première place rectangulaire, aujourd’hui Place de la Résistance. Laissons derrière
nous le Palais de Justice, construit en 1850 et jetons un œil vers la gauche. Là, entre la lignée de
maisons et la façade arrière de la municipalité, se dresse le beffroi. Cet ancien
donjon et dernier vestige du château du
comte de Boulogne bâti au XII°s, fut transformé au début du XIII°s., pour
devenir le symbole des libertés communales. A quelques pas seulement, l’espace
s’agrandit pour former une vaste place en équerre sur la première. C’est la
place Godefroy de Bouillon, cœur de la citadelle. Datant de 1734, l’hôtel de
ville, en occupe tout un côté. Il est le seul monument en brique et en pierre dans une ville
fortifiée. Sur sa gauche, la petite rue de la Providence, très sombre cache le
couvent des Annonciades. Sur la droite, une enfilade de petites maisons se
termine par 'ôtel Désndrouin de 1777 appelé Palais mpérial, souvenir de la grande-armée de Napoléon, consul, et du camp de Boulogne. A sa
droite, la courte rue du Puits d’Amour descend rapidement vers la porte des Degrés,
ouverte sur le chemin de ronde où tant de fois nous nous avons couru et joué.
C’est
sur la place mais, à l’entrée de cette rue qu’habite ma grand’mère. Sa maison
forme un angle avec la rue d’Aumont, peu animée, qui se prolonge vers la porte
Gayolle, vers les geôles
et les basses fosses du rempart. A l’autre angle, une
maison semblable à la sienne, c’est celle de mon oncle. Elle commence
l’enfilade des maisons et petits commerces qui constitue la rue de Lille, bien
vivante, dominée par le dôme de la Cathédrale. Elle aussi se termine par une
porte appelée Neuve ou de Calais.
Toutes
ces maisons serrées, les unes contre les autres, bien que construites en
hauteur, ne comptent que 3 à 4 étages maximum, aux escaliers très étroits et
aux marches très hautes mais aux caves profondes qui servirent de refuge
pendant les bombardements de la dernière guerre. Dans les années 50, il n’y
avait pas de confort et, chez grand’mère, nous enfants, nous nous lavions dans
la cave, dans de grandes cuves de bois. Que d’éclats de rires et
d’éclaboussures y avons-nous jetés ! Et que de bons souvenirs y avons-nous
laissés !
Quand
nous venions au mois d’Août, se déroulait la « Grande
procession » où les personnes
costumées selon différentes époques rendaient hommage à Notre-Dame, chevaliers
du Moyen-Age et princesses coiffées de hennins mais aussi les marins et leurs
suroits, les boulonnaises et leur « soleil » et bien d’autres.
La
place Godefroy de Bouillon, cœur de la citadelle, par sa diversité
architecturale et ses manifestations, est pour moi, le symbole de l’histoire de
France mais aussi celui de ma propre histoire.
Marie-Thérèse
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Dans le
nord de l’Espagne sur la Costa Brava se trouvait un petit village pittoresque.
C’était un village de pêcheurs encore peu fréquenté par les touristes. À cette
époque, on trouvait dans les étroites ruelles des échoppes où les poissons et
les anchois étaient préparés, salés et vendus à la population locale. Des
petits restaurants foisonnaient où l’on pouvait déguster de la cuisine
familiale.
Des
bateaux blancs entraient, sortaient du port ; on apercevait les marins et
les pêcheurs qui s’affairaient autour d’eux.
C’était
en juin et la chaleur était encore supportable. Nous avions choisi, pour notre
séjour, le camping sauvage dans une pinède à l’abri des regards. L’odeur des
pins nous tournait un peu la tête. Chaque matin, nous allions chercher à la
fontaine de l’eau pour le café et la toilette. Les gens, peu nombreux, nous
regardaient avec curiosité.
Mon ami
avait pris dans ses bagages un canoé gonflable et, ce jour-là, nous avions
décidé de l’essayer.
Installés
à bord et après quelques coups de pagaie, nous nous sommes retrouvés sur la mer
près du rivage.
Je me
souviendrai à jamais de l’eau turquoise, limpide, d’une transparence
cristalline. J’ai pu voir une multitude de couleurs, des oursins, des poissons
bigarrés, des roches sous-marines. Je laissais glisser ma main dans l’eau tiède
et ce merveilleux spectacle me ravissait. Un bien-être m’envahissait,
j’oubliais tout, me laissant aller à une sorte de plénitude. J’étais
transportée dans un autre monde, fluide, doux, sensuel.
Cette
promenade fut de courte durée et une fois revenue sur la terre ferme, j’ai su
que je ne n’oublierais jamais ces instants de grâce, féériques.
Nadine
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photo de Robert Doisneau |
« Il
y toujours un coin qui me rappelle… », chantait Eddy Mitchell au début des
années soixante.
Nous
avons tous un coin qui nous rappelle un moment triste ou heureux de notre
existence.
Tout
au long de ma vie, beaucoup d’endroits de par le monde et en France me parlent
de moments inoubliables.
Mais
le lieu qui me revient souvent, qui restera à jamais dans ma mémoire, c’est le
lieu où je suis née : ce groupe de grands immeubles beiges et noirs de six
ou sept étages, les boutiques, ouvertes tout le long des premiers
bâtiments : les crémiers, les bouchers, les marchands de fruits et
légumes, le libraire, les boulangers, le charcutier avec sa vitrine alléchante,
la maroquinerie avec les sacs, les parapluies, las bijoux de pacotille que nous
rêvions d’acheter et les produits de beauté, le pharmacien qui assurait les
préparations médicinales.
Tous
les jours, nous passions devant ou chez ces commerçants. Lorsque c’était les
fêtes à Pâques ou à Noël, à cause des décorations des magasins, souvent je rêvais de cet endroit.
« Je
suis dans ces lieux dans les années 40.
C’est noir et triste, il fait froid ! Mais les gens sont chaleureux et
parlent pendant les longues files d’attente chez les commerçants munis de leurs
tickets d’achat. Puis ce sont les années 50, c’est gai ; je suis confiante
en l’avenir. On rit entre ados. Nous croyons à des rêves merveilleux sans
penser que la vie ne réserve pas toujours de bonnes surprises ou elles ne
durent pas. »
Je
suis restée 29 ans dans cet endroit. J’y suis retournée régulièrement en
rendant visite à des anciens voisins, des amis, des cousins. Je faisais
quelques achats chez les commerçants en rentrant à mon nouveau domicile.
Aujourd’hui,
il ne reste qu’une ou deux personnes de ce temps-là et deux ou trois boutiques.
Les gens sont partis pour d’autres lieux.
Mais
ce lieu-là, dans ma mémoire, de temps en temps, j’y retourne en rêve pour y
retrouver « les gens que j’aime, l’insouciance de mon enfance parmi les
adultes aux robes fleuries, prêts à danser au bal du 14 juillet ! »
Mireille
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L’Égypte
a été dotée, par la nature, d’une singularité géographique, voire cosmologique,
pouvant être qualifiée de boussole : le Nil s’écoule selon une direction
grosso modo sud/nord, tandis que le soleil dessine dans le ciel un parcours
est/ouest. Il se peut que, dans l’Antiquité, cette orthogonalité perpétuelle se
soit traduite, par les bâtisseurs, en une architecture de monuments à quatre
faces en équerre que l’on retrouve dans les pyramides, les stèles, les
obélisques, les temples…
Pour ce
qui est des pyramides, elles s’honorent de figurer comme étant l’une des sept
merveilles du monde, en sus du phare d’Alexandrie. Deux merveilles en un seul
pays, l’Égypte, sur sept au total est un record mondial.
Par
ailleurs, innombrables sont les disparités de civilisation en faveur de
l’Antiquité pharaonique par rapport à disons, la Gaule.
Ainsi par
exemple, les prêtres égyptiens savaient calculer les éclipses, alors, que des
millénaires plus tard, les druides gaulois avaient peur que le ciel leur tombe
sur la tête.
Voici un
autre exemple de disparité, au plan médiéval : en France, au XVIème siècle
de notre ère, Ambroise Paré, réputé père de la chirurgie moderne, devant opérer
une trépanation sur le roi Henri II grièvement blessé lors d’un tournoi, cru
devoir au préalable s’entraîner sur un prisonnier. En comparaison, les
chirurgiens de l’Antiquité pharaonique, eux, pratiquaient routinièrement des
trépanations. Il est vrai que la momification constitue un excellent cours
d’anatomie, abstraction faite de sa connotation religieuse.
À propos
de religion, Thèbes fut le siège d’une première mondiale : le monothéisme.
Cette
immense innovation a été imposée par le pharaon Aménophis IV qui, à cet égard,
s’est rebaptisé Akhenaton, Aton étant le nom de cet unique dieu.
Pour
conclure sur une note divertissante : ce pharaon fut l’époux de la fort
belle Néfertiti, à en juger par ses bustes qui trônent dans les musées, dont le
Louvre. Leur fils, Toutankhamon, célèbre pour la richesse de sa sépulture
découverte inviolée il y a cent ans, mourut jeune, après un règne court et
insignifiant, si ce n’est que, sous la pression des prêtres, il rétablit le
polythéisme ancestral.
Emmanuel
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Le jardin
dans la ville – Un lieu marquant, c’est peut-être quelque chose dont on se
souvient au soir de sa vie.
En
période de guerre, la nourriture était rationnée, et pour que nous mangions à
notre faim, mes parents passaient beaucoup de temps à cultiver des légumes dans
plusieurs jardins. Ils étaient donc souvent absents et nous souvent seuls.
Aussi, quand le printemps amenait les beaux jours, ils décidaient de nous
emmener avec eux et d’improviser un déjeuner sur l’herbe. La famille entière
était réunie, ce qui était inhabituel.
Mon père
avait aménagé une petite terrasse en creusant le talus qui surplombait notre
jardin ; un noyer avait été planté pour nous faire de l’ombre.
C’est sur
ce petit espace que nous allions pique-niquer : œufs durs, salade composée
et fruits.
Compte
tenu de la rareté de ces moments et du lieu, exceptionnel, je ne puis oublier
cet endroit.
On
m’envoyait chercher de l’eau à la source, j’étais contente d’y aller. Quelle
aventure ! J’étais obligée de passer par un champ de luzerne dont l’herbe
était si haute que je me sentais noyée dans cette marée odorante.
Je devais
monter encore un petit sentier et là, au milieu des buissons, coulait une
petite source fraîche dont le filet d’eau mettait un certain temps à remplir ma
bouteille.
À la fin
du repas, heureuse, je grimpais sur le talus moussu. C’était le printemps, il y
avait des saules en fleurs avec des petits chatons à grains jaunes dont l’odeur
était enivrante.
« Il
me fait reposer dans de verts pâturages
Il me
dirige vers des eaux bienfaisantes. » Je ne
puis m’empêcher d’unir ces deux phrases à mes souvenirs.
Josiane
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Si ma
vision d’un petit coin de paradis perdu depuis si longtemps au fond de ma
mémoire pouvait égayer votre journée, cela me ravirait. Je vous parlerais de
cette île aux merveilles, de cet « home, sweet home » dissimulé dans
sa verdure avec en toile de fond les buildings de Vancouver : m’y
suivrez-vous ? Vous laisserez-vous envahir par tous ces chantes, ces
mélopées, ces mélodies et rapsodies in blue ? Vous laisserez-vous emmener
dans ce sanctuaire de la faune et de la flore tropicale sous cette serre digne
du Douanier Rousseau. Ce ne sera pas Robinson Crusoé qui vous accueillera,
encore moins Tarzan, avec son slip léopard et ses abdominaux saillants. Tenue
de presque cérémonie pour les touristes, les puristes, les admirateurs
d’oiseaux de paradis, de cacatoès, d’aras bleus. Vous vous glisserez entre les
feuilles de bananiers, entre les lianes, les fleurs de vanille, d’ylang-ylang,
entre le caoutchouc, le latex et les orchidées. À pas de loup et sur le
qui-vive, vous progresserez comme des aventuriers et au hasard d’un détour,
vous tomberez peut-être nez à nez avec l’un de ces petits singes hurleurs,
enfin vous le croirez… son cri résonne du haut de la canopée, il vous dévisage
de ces yeux curieux de lave rouge incandescente. Ce sera vous, l’intrus. Mais
peut-être l’invité, si vous montrez pâte blanche.
Claudine
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