vendredi 29 septembre 2017

QUAND TU SERAS GRAND

Que voudras-tu faire quand tu seras grand ?...


Quand j’avais 3 ans mes parents m’ont inscrite avec ma sœur à un cours de danse rythmique une fois par semaine. J’adorais cela d’abord car j’aimais beaucoup ce que l’ont y faisait et ensuite par ce qu’étant la plus petite j’avais toujours un rôle particulier. Il y avait une fois par an un spectacle pour les parents et j’y remportais mon petit succès. Je me voyais donc danseuse, j’avais l’agilité la grâce et j’étais toute menue. Cela a duré jusque vers la puberté, à ce moment là pour me faire plaisir, mon parrain m’a emmenée voir plusieurs spectacles de danse moderne et j’ai découvert un aspect auquel je n’avais pas pensé. Il fallait travailler très dur pour obtenir le succès, un documentaire sur les petits rats de l’opéra a fini par détruire mes illusions. Je n’imaginais pas mon corps torturé à ce point et puis je ne correspondais pas aux critères pour être recrutée. Trop petite, les cheveux très courts eh oui ! Le chignon et j’avais déjà de la poitrine. Alors j’ai abandonné cette idée tout en me contentant de mon cours de danse dans lequel je m’éclatais vraiment. Le rêve n’a pas duré longtemps mais je n’en ai pas pour autant été triste. Très vite un autre rêve a pris place ; sage-femme mais là c’est une autre histoire qui touche à mon passé.

Fabienne
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Aujourd’hui, mes petites filles sont venues nous voir et nous discutons à bâtons rompus.
"Qu'est que tu voudrais faire quand tu seras grande ?" demandai-je à ma petite-fille.
A ma grande surprise, elle me répondit : - « officier de marine ! »
-Et pourquoi donc dans la marine ?
-Parce que j’aime la mer et je veux voyager, faire le tour du monde dans le bateau école.
- Mais ne crains-tu pas de monter dans les vergues et d’amarrer les voiles ?
- Non, je n’ai pas le vertige et j’aime grimper partout.
- Grimper dans la montagne ou sur les rochers qui ne bougent pas, c’est une chose mais le faire au-dessus de la mer c’est un sport très différent.
- Oui, mais je me sens attirer par ce compagnonnage qui règne sur un navire et cette franche camaraderie.
- Comment le sais-tu ?
- Je suis souvent allée à Rochefort  et j’ai plusieurs copains de classe qui pensent aussi faire une initiation dans la marine pour pouvoir s’inscrire après le bac. Je vais me joindre à eux.
- Ah ! Tu as déjà pris tes repères et demandé des informations !
- Oui, de plus, je suis allée à la journée « portes ouvertes » et j’ai pu discuter avec un officier. Il m’a donné plein de renseignements et de dépliants. C’est là que je me suis inscrite pour le stage d’initiation.
- Et comment se déroule-t-il ?
- Il y a d’abord une formation théorique, certains week-ends de l’année scolaire, puis un embarquement de huit jours pendant la période des petites vacances et si je réussis toutes les épreuves physiques et théoriques, je pourrai alors m’inscrire pour celui d’un mois sur un plus grand navire après le bac.
- Je vois que tu es bien renseignée et que tu as déjà plein de projets.
- Oui, et je dois aussi beaucoup travailler  car sans le bac, je ne pourrai pas réaliser mon rêve.
- Et toi, dis-je à sa sœur aînée, que voulais-tu faire quand tu étais plus jeune ?
- Moi, je voulais garder les chèvres ?
- Pour une fille de la grande ville, ce n’est pas très commun.
- Oui mais je suis souvent allée à la campagne et aussi, au château de Versailles, où j’ai visité  la ferme pédagogique du Hameau de la Reine au Petit Trianon
- Ah oui, c’est vrai. Tu  y as même fait un stage à la fin de l’hiver.
- Et j’avais assisté et aidé à la mise au monde de petits chevreaux ! Il faisait très froid cette année-là.
- Tu continues à vouloir élever des chèvres ?
- Non, après plusieurs stages dans différentes fermes de plaine et de montagne, je me suis rendue compte qu’il fallait être en couple pour pouvoir faire face aux différents travaux.
-Alors que penses-tu faire maintenant ?
- Peut-être me spécialiser  dans la fabrication du fromage de chèvre ou m’installer dans un petit commerce bio mais pour cela, je dois continuer mes études.
- C’est bien, je vois que toutes les deux vous êtes pleines d’enthousiasme et de projets pour votre avenir. Alors bon courage sur le chemin de vos réalisations, dis-je en les embrassant.

Marie-Thérèse
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Quel enfant n’a pas été sommé de répondre à cette question ? Question embarrassante pour lui, car même à 7 ans, l’âge de raison, on n’a pas forcément d’avis arrêté sur le sujet : alors on cherche… et on trouve. C’est ce qui arriva à mon petit frère.
À l’époque, c’était le « doudou » de notre fratrie, le garçon espéré et attendu après la venue de deux filles. Mes parents étaient donc curieux de savoir quel(s) métier (s) lui faisai(en)t envie.
Il ne répondit pas tout de suite à la question… puis il se décida : campeur !
Le mot fut lâché en même temps qu’un beau sourire envahissait son visage, ce qui semblait vouloir dire qu’il avait bien réfléchi. Nous fûmes étonnés, également amusés : il était encore bien jeune et il avait le temps de changer d’avis… Ce qu’il fit, mais pas tant que cela : à vous d’en juger.
Il grandit après une scolarité honnête, plutôt matheux que littéraire. Il aimait le football, démonter ses jouets et les reconstruire et devint ainsi un bon bricoleur. Mais, être dehors en pleine nature, observer les petites bêtes et se remplir ses poches, le ravissait. Plus tard, il voyagea grâce à une voiture d’occasion révisée, tout en faisant du… camping. La montagne devint son terrain de jeux. Entre temps, il avait choisi un métier : professeur de mathématiques. L’été, il devenait moniteur de colonies de vacances, puis directeur de camps d’adolescents, durant une trentaine d’années. Aujourd’hui l’heure de la retraite venue, il partage son temps entre bricolage, jardinage et entretien de sentiers de randonnées après chaque hiver montagnard. Quelques sorties plus sportives pour la forme et le plaisir.
À présent, quand je lui rends visite, je l’observe et j’en profite pour marcher avec lui… je repense alors à sa déclaration initiale, enfantine.

Il peut être judicieux d’être à l’écoute des enfants.

Françoise
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« Qu’est-ce que tu voudrais faire quand tu seras grand ?
- Je voudrais être ingénieur comme mon Tonton !
Depuis mes deux ans, je suis attiré irrésistiblement vers tout ce qui comporte écran technicolor, boutons, manettes, clavier puis plus tard du digital. Tout ce qui est audiovisuel attire mon regard. J’aime le bruit. Il m’entoure et flatte allègrement mes ouïes. Je suis un actif bruyant et détonnant. Je cherche et je recherche l’expérience en permanence. Tout ce qui peut se démonter, se juxtaposer, s’emmêler, se froisser, se tordre, se briser et se réintégrer me capte et m’aimante. Je suis un mélange subtil entre décodeur et dé connecteur de câble au secteur. Les boutons de la cuisinière en ont fait les frais. De tourner leurs boutons m’obsède au point de vouloir squatter le coin cuisine quand maman a le dos tourné.
Très tôt mes mains et mes premiers pas m’ont mené vers la lumière bleue des game boys, des Play Station et évidemment du petit écran à l’ordinateur en passant par la tablette actuellement. Il me fallait appuyer sut toutes les touches au risque d’éteindre l’écran et d’envoyer le matériel chez le réparateur. J’ai su les manœuvrer à ma guise avant même de savoir lacer mes lacets. Heureusement les scratchs sont apparus assez tôt pour me permettre de ne point perdre mes baskets.
Il en fallait des tonnes de céréales de muesli et de Lion engloutis au petit déjeuner pour entretenir  la Duracel qui du matin au soir me tenait tonique et alerte sur mes deux pieds bien campés sur le lino. Il en fallait de l’énergie. A la limite du court circuit. Ce n’est pas pour rien que l’on m’appelait M. 100 000 Volts. Ca ne vous rappelle rien ? M. Gilbert Bécaud. J’en suis sa photocopie. Mon hyperactivité et mon entêtement fatiguent tout le monde sauf moi. De jour comme de nuit, je balaye le lino de mon 25 aux 45 fillettes jusqu’à ce que le sol brille comme un sous neuf. A l’heure actuelle, l’heure de la sieste n’a pas encore sonnée pour que je ferme mes paupières et que je repose mon cerveau survolté. Quelques heures de sommeil suffisent pour recharger mes batteries et continuer sur ma lancée Jusqu’à friser l’overdose. Et me voilà de nouveau debout, des cernes sous les yeux, mais les yeux plongés dans un bain informatique à en créer un de toutes pièces.  Mon espace virtuel s’éclaire d’une lumière bleuâtre digne d’un « retour vers le futur » et un drôle de bruit retentit. C’est l’heure de quitter la planète terre et de rentrer en connexion avec la planète Mars et ses martiens. Encore quelques manipulations, ma matière grise est à rude épreuve et toutes mes terminaisons nerveuses irradient vers de nouvelles expériences fluorescentes. Je suis têtu, voir entêté comme mes parents d’ailleurs. Les chiens ne font pas de chats. Et limite perfectionniste. Impossible à vivre moi ? Nouveau petit Einstein ? Rien ne me détourne de mon objectif et je ne me laisse pas influencer. Comme on dit « Parle toujours, tu m’intéresses. ». On m’a toujours dit qu’il fallait se montrer curieux dans la vie. Et j’obéis. Vous me trouvez excessif ?  Alors qu’en pensez-vous ?

Claudine
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Sur leur fiche de renseignements, dans le secondaire, les élèves remplissent cette rubrique : certains ne savent pas, ou ne veulent pas répondre, de plus, en cours de scolarité, ils revoient leurs ambitions, à la hausse ou à la baisse, selon leurs résultats.
Les souhaits varient au fil des décennies : dans les années soixante-dix, les jeunes garçons voulaient être pompiers ou mécaniciens, les fillettes maîtresse d'école.
La concrétisation des vœux se profile avec le cursus, le niveau, les compétences, mais pas seulement...
Les encouragements des parents et des enseignants entrent également en ligne de compte et même leurs oppositions !
Telle élève voulait être médecin : le milieu familial ne prenait pas position, n'y croyait pas, tandis que le chef d'établissement s'y opposait, au motif que l'élève était atteinte de poliomyélite !
Heureusement, *Hélène a été soutenue farouchement par son professeur de SVT; elle est médecin. Elle a échappé à la double peine, en quelque sorte.
*Arnaud était un élève très travailleur ; quand il a demandé à me voir plusieurs années plus tard, il m'a dit qu'il lisait très consciencieusement toutes mes listes de livres (heureusement que j'avais préalablement tout lu !). Il savait ce qu'il ferait plus tard mais ne le dévoilait pas : sa motivation était enracinée au plus profond de lui : épris de liberté et de justice, il m'a honorée de sa visite, à la salle des professeurs où étaient exposés les parchemins de mes élèves ; sortant de l'école de magistrature de Bordeaux pour effectuer son stage au palais de justice de Paris, il m'expliquait que son arrière-grand-mère maternelle, ouvrière dans l'industrie amenait son fils âgé de sept ans, sur le lieu de travail et devait l'entraver au pied de l'établi pour le maintenir immobile !!! Cette situation avait marqué à tout jamais le jeune magistrat qui m'en parlait avec émotion !
* Dominique n'avait ni projet ni motivation, ses seules passions : attendre la sonnerie, parfois la devancer, commettre des incivilités, aller casser des carreaux en ville, vider des bombes de mousse à raser sur la porte à tambour du centre commercial, imiter la signature parentale, cacher ses évaluations sous la moquette de sa chambre, jusqu'au jour où la porte résistait et où le pot aux roses fut découvert ! Il devint prestidigitateur.
*Hervé était ans une classe dont une bonne moitié prépara par la suite les grandes écoles. Son professeur de mathématiques estimait qu'il avait de sérieux problèmes, à quoi je répondais, sans être entendue, qu'avec son niveau, il pouvait sauter deux classes, qu'il avait fini ses évaluations quand les autres les commençaient à peine, que nous avions de la chance qu'il ne dissipe pas la classe. Il n'affichait pas de projet particulier ; il est sorti premier à Polytectnique et à créé une vaste entreprise ; il a demandé à me revoir et m'a montré ses albums photographiques, notamment ceux de son service militaire.
* Benoit n'affichait pas de motivation avouée mais travaillait d'arrache-pied, il ne se mettait jamais en avant ; tout en préparant le bac G, il est devenu polyglotte, puis a fait le droit, a passé des concours : il est titulaire de plusieurs masters, y compris de philosophie. Il est revenu nous voir : il est ambassadeur de France à Boston et a épousé une belle américaine.
*Paul était un fort en maths, il était excellent partout, voulait être pilote de courses automobile : il est devenu pilote de ligne à Air France, après un cursus irréprochable.
D'autres, de gaité de cœur ou non, reprennent l'entreprise familiale ; un élève demanda audience un jour, s'étonnant que je me fasse du souci pour ses résultats alarmants : il me dit qu'il lui suffisait d'épouser une secrétaire sérieuse : il m'affirmait que son père était le numéro un français de l'élevage de l'asticot : depuis l'eau a coulé sous les ponts !
*Renaud avait le projet de devenir architecte : malheureusement à la naissance du quatrième enfant, sa mère développa une grave maladie et tout bascula autour de lui : il me raconta cela l'an passé en venant chez moi, pour le contrat d'entretien de ma chaudière.
En milieu urbain, les enfants peuvent accéder plus facilement aux études ; dans les hameaux de montagne c'était quasiment impensable à cause du manque de moyens, de l'éloignement, de l'aide apportée par les enfants pour les travaux. Pour ma part je n'avais pas de projet, je ne me voyais pas d'avenir :j'aurais dû être journalière agricole ou travailler les lopins de terre familiaux, taillable et corvéable à merci, sans oublier "les tuiles" qui pouvaient arriver à cette époque à une adolescente délaissée.
Lors de mon entrée en sixième, j'ai noté sur ma fiche de renseignements que je voulais être hôtesse de l'air : le professeur principal était pris entre réprobation et moquerie ; mais au fond de moi, je savais que c'était pour échapper à la voie sans issue antérieure, quand je montais aux arbres pour voir les avions de plus près et que je voulais aller à New-York, rejoindre mon parrain.

Marie-Christine
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Que veux-tu faire quand tu seras grande ? Qui dans ses jeunes années n'a pas entendu cette question. Je me rappelle que petite fille on me la posait régulièrement, et je me rappelle tout autant que je répondais timidement « maîtresse d'école ».  Là encore, je pense ne pas être la seule de ma génération à avoir fait ce choix.
Enfant, pourquoi ce métier m'attirait-il plus que tout autre, je ne sais plus trop. C'était peut-être le seul que je connaissais bien à cet âge, au travers de l'enseignement que je recevais. Il me fascinait peut-être aussi, à cette époque la maîtresse revêtait une telle importance à nos yeux. On la craignait, on la respectait aussi. On l'admirait devant l'étendue de ses connaissances, nous qui avions tout à apprendre et qui découvrions tant de choses avec elle. Et pour tout ce qu'elle nous apportait, on aimait aussi notre maîtresse d école. Elle représentait l'autorité, on lui devait obéissance, toute la classe obtempérait sans broncher.
A mes yeux, la maîtresse savait commander, se faire obéir, punir s'il le fallait, est-ce cette sorte de domination qui me plaisait  dans ce métier ? Avais-je envie un jour de pouvoir à mon tour dominer d'autres enfants ? A ce si jeune âge, je ne sais plus vraiment ce qui  me motivait  mais je me souviens de connaissances qui, me regardant jouer avec d'autres enfants, disaient à ma mère que j'avais l'étoffe d'un chef. Mais je n'ai jamais joué au petit chef.
Plus tard au collège, il fallut choisir une orientation et je voulais toujours me diriger vers l'enseignement. A cette époque j'avais envie d'être professeur d'anglais, mes notes étaient bonnes, la langue me plaisait. Je devais me débrouiller pour remplir les dossiers et c'est alors que mon professeur principal me mit en garde contre une voie sans débouché car trop encombrée. Tous les autres voulaient-ils faire la même chose que moi ? A force de me faire peur en me disant que faute d'être retenue par le lycée de mon choix, les études cesseraient pour moi et que je n'aurais plus qu'à chercher du travail, j'ai cédé. Il était pour moi hors de question d'aller travailler à cet âge, je voulais continuer à étudier coûte que coûte et je n'ai donc pas fait ce que je voulais.
Après mes études au lycée, ma mère s'est chargée de me trouver un emploi, sans me demander mon avis. Mais qu'importe, je pense m'en être assez bien tirée quand même. J'ai passé des concours, une autre façon d'étudier, je voulais toujours aller plus loin. 

Paulette 


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