dimanche 5 février 2012

FABLES, SOTTISES, BALIVERNES ET BILLEVESEES

A la suite de nos réflexions sur la vérité et le mensonge, voici un petit inventaire  - non exhaustif - écrit en commun des bêtises auxquelles on nous a fait croire enfant.


Aujourd’hui Caroline n’est pas partie travailler. Sa petite Manon doit rester au chaud, elle a la rougeole. Alors, l’ayant confié à sa mère, ravie d’être là, la voilà qui court les magasins à la recherche de vêtements rouges pour la petite car sa mère le lui a dit : quand un enfant a la rougeole, il faut tout de suite l’habiller en rouge, cela fait sortir la maladie et l’enfant guérit deux fois plus vite qu’avec les médicaments.

Marie est sur le pied de guerre. Son mari est alité avec une forte fièvre. Donc, elle a éloigné les enfants, fermé la porte de la chambre. Elle a couvert les cheveux de son mari d’un foulard bien serré et acheté chez le pharmacien des produits anti-poux. C’est qu’on lui a dit que tout le monde a derrière la tête une poche à poux qui s’ouvre lorsque la chaleur de la tête est intense, libérant ses hôtes. Une horreur absolue !

Au temps béni où les garçons entraient en apprentissage très jeunes, et où les petits commerces fleurissaient à tous les coins de rue, les anciens aimaient s’amuser un peu, mais pas méchament, aux dépens des jeunes. Ils les envoyaient quérir chez le droguiste une bouteille d’huile de coude pour graisser les machines.



Biens sûr, le premier commerçant, rodé à cet exercice, en manquait et envoyait l’enfant chez un confrère qui venait juste de vendre la dernière, mais peut-être que chez un autre…
Quand le jeune rentrait bredouille, et pour cause, avec  la peur de se faire traiter d’incapable, tout le monde riait à son grand étonnement et on lui expliquait la plaisanterie. Gageons que l’an prochain, il sera parmi ceux qui rient.

Mystère entre les mystères qui fait chuchoter dans la cour de récréation : par où les enfants peuvent-ils bien sortir, car on le sait, on est grand et pas idiot, les bébés sont dans les ventres des mamans ?
Michèle a la réponse. Michèle a deux grandes sœurs très dégourdies et un père médecin, elle en sait plus que tout le monde. « Ben, les bébés sortent par le nombril, évidemment ». Voilà matière à réflexion pour les mois, les années qui viennent qui sait, car après inspection attentive le nombril ne présente pas la moindre ouverture. Probablement pratique-t-on une incision ou bien crève-t-il sous la poussée du bébé. On comprend mieux les douleurs de l’accouchement !

Ce vendredi matin, il y a beaucoup de monde au marché. Chacun fait la queue et attend son tour.
Disciplinée, il n'est pas question de dépasser, la petite Cécile attend près de sa maman, elle est un peu dans la lune et ne se rend pas compte que la personne derrière elles aimerait bien être servie à son tour ! La maman s'adresse à sa fillette.
- Si tu restes plantée-là, tu vas prendre racine !
-  Prendre racine !!?... Prendre racine ?! se demande la fillette, C'est quoi ça ? Maman? De prendre racine ?
Sa maman, tout en finissant de ranger le fromage dans sa poussette, attrape le bras de la fillette et l'entraîne plus loin, vers le marchand de légumes.
Cécile regarde autour d'elle, elle se souvient du grand chêne du village elle reprend :
- Maman, je vais me transformer en arbre ? Comme celui sur la place ?
La maman finit par sourire, elle entoure l'épaule de Cécile et d'une voix très calme :
- Aller, arrête de dire des bêtises… Tiens, porte ça et tais-toi !
Elle lui tend un sac contenant des pommes. La petite Cécile prend le sac et suit sa maman sans un mot. Tout en regardant anxieusement ses pieds !

20 juillet 1969. Incroyable, on a marché sur la lune. Plus incroyable encore : la lune n’est pas habitée. Alors là, c’est vraiment à douter de tout y compris de ce qu’on a vu de ses yeux vu. C’est que depuis qu’on est petits et on nous dit que si on regarde la lune assez longtemps on verra un petit bonhomme avec une hache. Nous avons fait l’expérience et plusieurs d’entre nous, parmi les vaillants qui résistent au sommeil, ont vu comme je vous vois ce fameux bûcheron céleste. Mais alors si aucun bonhomme n’habite sur la lune, qu’est-ce qu’on a bien pu voir ?

Ma tante Henriette a eu son premier bébé dans la grande maison familiale. Grand-mère, maman, une voisine et moi sommes venues lui apporter notre aide. Henriette reste enfermée dans la chambre à l’étage et je n’ai pas le droit de monter avant que la chose soit faite. J’essaye de me distraire au rez-de-chaussée avec le chien mais ce n’est pas facile : il y a à l’étage un sacré remue-ménage et parfois des gémissements à vous dresser les cheveux sur la tête. Ma mère finalement vient me chercher : tout c’est très bien passé et le bébé est là. Quel choc ! Contre la poitrine de sa mère, le bébé est affreux, tout plissé et la peau couverte de je ne sais quoi. Inquiète, j’interroge ma grand-mère « c’est rien, on va le laver. Ça c’est tout Henriette si elle avait pris correctement ses bains de siège son bébé aurait été propre ». Des années plus tard, lors de ma première grossesse, j’ai interrogé mon gynécologue sur la nécessité des bains de siège. Il a soupiré bruyamment et j’ai compris que j’avais encore gobé n’importe quoi.

Dans la classe de Martine, il y a une petite fille rousse tellement couverte de taches de son qu’on dirait qu’elle est sale. Certains se moquent d’elle, Martine plus charitable la plaint : c’est vraiment très laid. Les vacances suivantes se déroulent au bord de la mer et Martine profitent de la plage avec sa famille. Pour le goûter, ils vont boire un rafraichissement sur une petite terrasse en bord de mer. Il fait chaud et Martine, choisit une table abritée d’un grand parasol en paille. « Ne t’assois pas là malheureuse, lui crie sa mère, le soleil passe par les trous et tu vas attraper des taches de rousseur ! » Mon Dieu, Martine l’a échappé belle. Voilà donc l’explication et c’est logique car la petite fille rousse de la classe vient de la côte d’azur. Plus jamais Martine ne se mettra sous un mauvais parasol ou ne portera de chapeau de paille.

Ma meilleure amie de ma première année d’école primaire s’appelait Christine et nous étions inséparables. Nous partagions tout : jeux, secrets, goûters… Parfois, pour se dire bonjour, nous nous donnions un tout petit bisou sur la bouche : on appelait ça « accrocher les wagons ». Un soir, en rentrant de l’école, une voisine de mes parents me prit à part. Tu sais, me dit-elle, fais attention, si tu continues à embrasser les filles sur la bouche, tu auras des enfants anormaux. Y croyait-elle elle-même, voulait-elle me faire peur ? Toujours est-il que je changeai, la mort dans l’âme, de meilleure amie et que durant des mois, et peut-être plus longtemps encore, chaque soir en faisant ma prière, je suppliai Dieu de me pardonner et de ne pas me donner d’enfants anormaux.

« Mange ta soupe et tu grandiras ». Tous les soirs, je mangeais une bonne assiette de soupe sans sourciller dans l’espoir de grandir. Ma sœur de 14 mois ma cadette, rechignait : « Non, je n’aime pas la soupe. Je n’en veux pas ! » Rien n’y faisait ni les menaces, ni les cuillères pour faire plaisir à maman et l’assiette de soupe finissait dans l’évier. Je craignais que ma sœur ne finisse par avoir des problèmes de croissance. Je fus détrompée, sous le regard moqueur de ma sœur, elle me dépassa très vite de près d’une tête sans avoir jamais avaler une goutte de soupe.

Aucun commentaire: