lundi 4 décembre 2017

POUR OU CONTRE L'AUTOMNE !

- Oui, je suis là : je suis l'esprit de l'automne : maints poètes me célèbrent depuis longtemps, certains comme Charles Baudelaire expriment avec émotion une angoisse d'une voix brisée et assourdie :" nous plongerons bientôt dans les froides ténèbres" ; Paul Verlaine excelle également dans "les sanglots longs des violons de l'automne"...
Les poètes d'antan et de toujours exaltent la richesse de mes parures, de mes vêtures de saison, tels  : Maurice Carême, Samain, Rollinat, Gregh, Delarue Mardrus, Cadou, la liste est inépuisable.
Je ne suis pas un assassin comme l'insinue Apollinaire : "Oh! l'automne a fait mourir l'été".
Je m'inscris dans une continuité, celle de la ronde des quatre saisons : j'offre un moment de beauté absolue : je mets en scène la nature, avant de basculer dans la morte saison hivernale, de plonger dans les froides ténèbres .
Je vois les villageois préparer les provisions de bois de chauffage dans les forêts empourprées et ruisselantes d'or, tout en foulant le tapis de feuilles bruissantes recouvrant le sol qui fleure bon l'humus.
Les ménagères, quant à elles font quantité de confitures de pommes, poires, de gelées de coings.
C'est aussi la période des confits de volailles pour se nourrir : il n'y aurait pas assez de nourriture pour la basse-cour : la réduction de l'effectif de la basse-cour s'impose.
Tout ce monde déborde d'activité joyeuse, devant cette profusion de provisions, d'autant plus que la période de l'été indien est un bonus apprécié.
Toutes les fleurs dahlias, chrysanthèmes et vendangeuses vont fleurir les tombes à la Toussaint, c'est cela aussi l'automne : les fruits, les fleurs...
Tout le monde aime la période des champignons des châtaignes, les veillées au cours desquelles on dépouille le maïs ; période des glandées pour les cochons, apport de nourriture sain et gratuit.
On écosse les haricots blancs, on récolte les pommes de terre : base de la nourriture. On gaule les noix.
Les citrouilles tellement recherchées pour Halloween font leur apparition : elles sont nourrissantes et ludiques !
Tout le monde m'apprécie pour les promenades, randonnées sylvestres, dans le calme : on prend des forces, on se ressource.
Bien sûr, les esprits chagrins me décrieront : les gens se couvrent, s'emmitouflent à mesure que les arbres se dégarnissent, que les feuilles quittent leur ramée nourricière, que les rafales plaquent au sol les parures d'or, de pourpre et d'ambre.
Je passe forcément plus inaperçu en ville à cause du confort du chauffage, les barres de béton ont fait disparaître la nature, les gens sont frileux, pressés, ne savent plus regarder leur environnement.
J'aurai toujours mes fidèles, forcément, et mes détracteurs : je suis une saison de la vie, " la saison mentale " d'Apollinaire, celle qui lui correspondait le mieux.

Je suis éphémère et éternel : vive l'automne !

Marie-Christine
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Je  fais partie de ceux que l’automne rend mélancoliques, les jours qui raccourcissent de plus en plus, le soleil de moins en moins présent et qui ne chauffe pas. Les feuilles sans vie qui tombent  des arbres et eux qui ressemblent à de grands bras morts. Je n’aime pas le froid venir me geler le bout du nez  et pincer doigts et orteils. Je n’aime pas plus l’hiver mais lui a un débouché vers le printemps. Peut-être serai-je  plus sensible à la beauté de l’automne si j’habitais à la campagne ? Pour moi c’est une saison triste et qui me rend triste. Il faut ranger les affaires d’été et ressortir les pull et pantalons chauds. Ce ne sont que des banalités mais elles ont un impact sur mon moral. Je n’aime vraiment pas l’automne.

Fabienne
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Ce poème (L’automne d’Albert Samain) appris par cœur lors de mes vertes années, en ma primaire sonnante et trébuchante, résonne encore à mes oreilles et me fredonne cet air d’enfant que seuls les anciens et les jeunes retraités ici présents peuvent ressentir au fond de leurs entrailles. Et comme une oursonne frileuse bien emmitouflée sous la couette polaire, encore frissonnante de mon plantureux repas, je m’apprête à faire une bonne sieste qui me retiendra en mon repère une bonne partie de la journée. Alors que les premières lueurs du jour tardent à se lever, celle d’un coucher de soleil embrase les feuilles des tilleuls et les cieux d’un or sans pareil. Je me perds un instant dans la cannelle et le doux bordeaux de mes chrysanthèmes et leur jaune conquérant et franc me tient en éveil. Un long frisson court sur mon épiderme et je réalise que l’été est bien parti avec les hirondelles. Une fraicheur vivifiante, qui éloigne pour un temps les jolies abeilles et charmants bourdons venus se ravitailler auprès de mes gaillardes. A  tire-d’aile, ils se sont enfuis allègrement vers d’autres fleurs, d’autres délicieux festins. Je n’entendrai plus pour un certain temps leur vrombissement rassurant… Je n’aurai plus l’occasion de les observer derrière ma baie vitrée.  Me resteront les souvenirs de leurs butinages intempestifs et gourmands. Ils ont enchanté ma vue, mes sens et me laissent le parfum d’un retour au printemps. Un printemps qui recouvrira les arbres de nouveaux bourgeons. Mes yeux se posent un instant sur les feuilles éparpillées qui volettent à la moindre brise sur la terrasse caillouteuse. Elles forment un tapis au pied de l’immeuble parsemé par endroit de ce trésor éphémère semblable à un tableau de Vermeer... Elles doivent grelotter la nuit venue. Elles se tiennent chaud très certainement en ce mois de novembre en un camaïeu d’or, d’ocre et d’argent. Et je me prends à suivre leurs nervures en un geste doux et caressant. Elles me racontent des histoires, des contes. Elles me disent bonjour c’est sûr et je leur rends bien cette politesse. Mon regard se perd au dessus des toits avoisinants formant comme un petit village lové tout contre la grande cité. Elles habillent si bien nos trottoirs, nos allées, nos plates-bandes. Elles dérangent certainement car les pelles et les souffleuses s’agitent et les réunissent en un tas compact au fond d’un sac plastique. Un jaune uniforme les unit à jamais. Elles auront une autre vie peut-être, en compost elles finiront pour revigorer les nouvelles pensées, les jacinthes, les  jonquilles et les tulipes qui sous le terreau en février, mars pointeront leur nez.

Claudine
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Ambiguïté de l’automne : azurs safranés ou sanglants… aigreurs des premiers matins frisquets annonçant le retour proche du cocooning.

Uniformément triste et sombre, ultimes splendeurs éclatantes.

Tombes et trésors variés : tartes au raisin, pintades flambées au cognac, parfum ensorcelant du coing, emplissent les cuisines de la Toussaint.

Odeurs prégnantes et diverses : confitures et pâtes de fruits, alcools, odeurs de saines et sublimes pourritures envahissant bois, prés et jardins, âcreté des feuilles mortes et des champignons, avec le retour des brumes vagabondes.

Mort : la grande faucheuse d’hommes et de valeurs rôde encore dans les cimetières envahis de fleurs, Toussaint et 11 novembre. Contre l’oubli, des chrysanthèmes à l’infini pour traverser l’hiver et retrouver la vie.

Nids d’oiseaux, vides et silencieux, attendent le retour de la musique de leurs locataires au printemps.


Envol des feuilles multicolores, sous les coups de butoir des premières bises, dernier feux d’artifice de l’année, énigme de l’automne.

Françoise
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Nous voici de nouveau en automne, que le temps passe vite...
Les arbres ont changé de couleurs et d'aspect. Certaines feuilles sont devenues d'un beau jaune d'or, d'autres rouges alors que d'autres encore persistent à rester vertes. Mais ça ne sera que de courte durée, elles jauniront elles aussi au final. Et puis ce sera une nouvelle phase, les feuilles quitteront l'arbre, elles tomberont au sol  où elles sècheront en formant un épais tapis marron, le désespoir des balayeurs à cette saison. On parlera alors de feuilles mortes, les arbres seront nus, noirs et tristes.
C'est là que pour moi rien ne va plus car je déteste ce qui fait penser à la mort. C'est aussi l'époque où l'on voit arriver les chrysanthèmes chez les fleuristes, une fleur qui vient colorer les cimetières et que je n'apprécie donc pas. J'aime tout ce qui fait penser à la vie, ce qui est gai, positif, moi qui malheureusement suis déjà à l'automne de ma propre vie.
A l'automne on voit aussi les jours raccourcir, le soleil, quand il daigne paraître, se fait voir plus tard, il nous quitte plus tôt. Malgré nous, nous-mêmes changeons notre rythme de vie. Le matin on se lève moins facilement, le soir on a tendance à rentrer plus tôt. Personnellement, voir cette nuit tomber me donne toujours l'impression qu'il est tard, je presse le pas, je vis en fonction de la lumière. Et cette lumière est tellement nécessaire  pour nous aider à garder le moral. L'automne c'est aussi le ciel gris, la pluie, le vent, le début du froid, que tout ça est triste en cette saison.
Pour toutes ces raisons je n'aime donc pas l'automne, on le devinera aisément. Je vais donc  patienter, il faut encore laisser passer l'hiver, pourvu que le printemps soit beau, l'hiver nous semblera moins long.
Au printemps, tout comme la nature, je vais revivre. Quoi de plus beau que de voir poindre les premiers bourgeons sur les arbres, de voir s'ouvrir ensuite ces tendres petites feuilles vertes, d'admirer les premières fleurs, tout renaît et moi aussi. Les jours vont s'allonger, je sauterai bien vite du lit de bon matin, c'est ça la vie et la vie, c'est si beau.

Paulette
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C’est la fin de l’été, les grandes vacances sont finies. Le temps fraichit et un beau matin de septembre, je reprends un peu triste le chemin du pensionnat. L’automne est déjà là.  Je dois renoncer aux  jeux de plage et aux baignades dans l’océan où souffle le vent de la liberté. A regret, je troque les sandales, le maillot de bain, les robes légères aux couleurs chatoyantes contre une tenue plus stricte : chaussettes blanches et chaussures noires, veste et jupe bleu-marine que seul égaie l’écusson du collège.
 Ma sœur et moi, nous prenons alors le train  pour  une longue journée où les yeux rivés à la fenêtre, je vois défiler des paysages si différents ! Au-revoir douces prairies de la Saintonge que baignent les mille et un méandres de la Charente !  Ton vert printanier, grillé par la chaleur de l’été, s’est mué en un gris cendre ou en un brun terreux. Déjà les branches des arbres commencent à perdre leurs feuilles. Bientôt tels des squelettes dénudés, elles s’étireront vers le ciel dans un geste d’imploration.
Mais pour l’heure, la micheline nous emporte de son allure tranquille, sifflant à maintes reprises, joyeuse sous le soleil déjà pâlissant ou caverneuse sous la brume et la pluie. Tout au long de la voie, des buissons encore verts se teintent par endroits, de beige et de roux. Parfois, de gros tas de bois mort me rappellent qu’il faut déjà rallumer poêles et cheminées et que les derniers beaux jours vont se raréfier. Le froid est proche et me fait déjà frissonner. A la pension, les levers matinaux dans la demi-obscurité extérieure n’en seront que plus durs.
Bientôt, nous arrivons à la gare de Limoges-Bénédictins. Un peu plus de deux heures d’attente pour avoir la correspondance !  Allons faire un petit tour dans la ville ! Brr ! Brr ! Il fait bien frais ! Avant de nous éloigner, mettons nos écharpes et refermons nos vestes ! Sous le ciel lourd, les nuages couleur d’acier virant par endroits à l’anthracite, courent,  se chassant l’un, l’autre en de mornes figures. Le vent tourbillonne et soulève des feuilles mortes qui, s’échappant du tombereau, montent dans l’air telles des danseuses virevoltant dans un ballet, pour retomber épuisées sur le sol humide. Ici, l’automne a bien entamé son œuvre. Sous nos pieds, elles craquent et s’effritent dans un dernier gémissement.
Dans la ville grise, nous nous pressons pour voir dans les vitrines, l’éclat blanc et doré de la porcelaine et celui plus sombre des émaux où se juxtaposent le cramoisi, l’outremer,  l’ocre et la malachite.
Un dernier coup d’œil pour dire au-revoir à ces merveilles plus pérennes que celles de la nature. Nous retournons vers la gare. Son dôme de cuivre, verdi par le temps, se tapit tout contre sa tour élancée veillant sur la ville, à l’image des châtaignes brunes qui se cachent dans leurs vertes bogues piquantes, au pied des arbres.  Chauffées sur des braseros, elles sont un des régals de l’automne tout comme sans doute, l’omelette aux champignons. Elle ne se déguste avec un plaisir intense qu’après une longue recherche dans les zones boisées et en bonne compagnie, chassant ainsi la morosité du temps maussade. Et certains ne feront-ils pas leurs délices, d’une bonne soupe au potiron à moins que ce ne soit une purée de courges dont la couleur orange leur réjouira les yeux. Et pourquoi alors, pour faire fuir la mélancolie, ne pas savourer un gâteau aux marrons ou encore une tatin aux noix après une longue promenade dans la forêt aux couleurs vibrantes sous un dernier rayon de soleil.
Du pourpre au rubis, du garance au vermillon parfois teinté de mauve ou de rose, du jaune cadmium au chrome ou au safran en passant par toute la gamme des roux, des ocres et  des terres des Sienne sans oublier les verts sapin ou amande qui se délitent, l’automne, dans un magnifique feu d’artifice qui me rend nostalgique, m’offre son dernier adieu en un bouquet qui s’évanouit lentement.

Marie-Thérèse...

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