lundi 14 juillet 2014

AU JARDIN PUBLIC


Pour les populations urbaines, le jardin public est un composant majeur de la qualité de vie. Aux plaisirs de la promenade et de la détente s’ajoute une oxygénation des poumons à la source même de la photosynthèse.
À cette généralité propre à tous les jardins viennent souvent se greffer des singularités. Il en est ainsi pour ceux qui sont à portée aisée des Gentilléens, comme on le verra ci-après.
Le parc Picasso est doté d’une minuscule basse-cour qui fait le délice des tout-petits. Par ailleurs, il englobe une crèche et avoisine un stade.
Le parc de la Poterne des Peupliers voit son bassin alimenté par une gigantesque cascade tandis que son aire se prolonge par un terrain de football.
Le parc Montsouris avait, jusqu’à il y a peu, à proximité de son portail principal en vis-à-vis de la Cité universitaire, un petit obélisque qui servait de mire pour le calage du télescope – de nos jours suranné – de l’Observatoire de Paris. Pas loin de là, se dressait une réplique miniaturisée du palais du Dey d’Alger.
Le long du grillage bordant le jardin du Luxembourg depuis son entrée principale, se déploie un musée de plein-air exhibant des affiches consacrées à des thèmes périodiquement renouvelés.
Aux confins du jardin des Plantes, à proximité de sa grande serre, se présentait un cadeau offert par la légion américaine à ses camarades de combat : les Poilus français de 14-18. Ce cadeau était matérialisé par un tronc de sequoia bimillénaire scié à l’horizontale. Sur sa face exposée étaient épinglées de petites étiquettes s’échelonnant depuis une étiquette centrale figurant l’an 1 de notre ère jusqu’à une étiquette périphérique figurant l’année 1918 de la Victoire, les étiquettes intermédiaires datant divers événements historiques.

Emmanuel
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Jardin public insolite : une plage aux pieds de Notre-Dame

L’eau était calme. Le ciel et même le fleuve, plutôt verdâtre habituellement, étaient bleus. Des oiseaux volaient, tournoyaient, rasaient la surface de l’eau.
Sur la plage de « sable fin » bordée de palmiers, les enfants jouaient à faire des pâtés ou mieux encore, à construire des châteaux forts. Un peu plus loin, d’autres s’exerçaient au volley-ball. Un bébé rampait sur le sol doré. Un nageur bronzé et un autre à la peau bien blanche s’apprêtaient à plonger. Des bateaux passaient au loin, laissant derrière eux une traînée de blanche écume. Le bébé qui était arrivé au bord de l’eau criait et pleurait en appelant sa mère. « Mais que fais-tu là ? » lui demanda un maître-nageur qui passait par là juste à temps pour le rattraper. « Veux-tu déjà apprendre à nager, à ton âge ? », il aurait aussi bien pu se noyer !

Des lecteurs allongés sur le ventre se faisaient brunir, d’autres étendus sur des chaises-longues semblaient compter les oiseaux à travers leurs lunettes de soleil. Un marchand de glaces ambulant proposait des friandises rafraîchissantes… Il rencontrait beaucoup de succès.
En fermant les yeux et en oubliant touristes, badauds et voitures, on se serait presque cru sur la côte d’opale. Courte illusion, en effet, levant les yeux au-dessus de nous, on voyait se dresser les deux tours de la Conciergerie et la flèche de la Sainte-Chapelle ; en face, le curieux étalage des bouquinistes. Oui, nous sommes bien au cœur de Paris.
Je trouve cette idée de plage au bord de la Seine, une bonne initiative permettant à ceux qui ont de courtes vacances ou pas les moyens de se payer de lointains voyages, de pouvoir jouir de bons moments au bord de l’eau même si tout ce décor n’est qu’artificiel.

Christiane
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Le square Napoléon

Un tout petit jardin public, au confluent de la Seine et de l’Yonne, à Montereau, là où est érigée la statue de Napoléon, va se dérouler une fête nautique. Nous sommes aux environs des années 50.
La foule se masse dans ce petit square qui surplombe les deux fleuves ; les badauds les plus chanceux sont accoudés au parapet.
Il fait nuit, il n’y a presque pas d’éclairage à l’époque.
Les nageuses vont plonger, des silhouettes phosphorescentes se meuvent dans l’obscurité. Juste une lueur sur leurs maillots de bain, sans doute des paillettes que seuls quelques feux de Bengale multicolores font scintiller. Ces plongeuses lumineuses évoluent en un ballet nocturne féérique. C’est le bal des sirènes à Montereau.

Josiane
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Posséder dans sa ville, un grand jardin public, n’est-ce pas une chance ? Apprécié à tout âge, il apporte dans son décor et sa beauté, détente et convivialité et fait souvent la fierté de ses habitants. Dès les beaux jours, il est la destination première de tout loisir. Les enfants s’y divertissent, jouant dans les bacs à sable, courant dans les allées après le ballon ou encore montés sur leur petit tricycle, pédalant avec plus ou moins de force, sous l’œil bienveillant et attentif de quelques adultes qui se retrouvent avec  plaisir, pour tailler une petite bavette. Les personnes âgées aussi, aiment profiter du jardin public pour s’y réunir et s’y délasser, parfois faire une pause au retour des courses et même solitaires, pour lire ou seulement contempler la nature : admirer les arbres, les fleurs et écouter les oiseaux. Entre midi et deux heures, les employés viennent à leur tour, bénéficier du rayon de soleil et du calme pour se détendre tout en avalant leur sandwich.
Certains sont ouverts comme ceux qui sont installés près d’un monument ou une administration. D’autres, au contraire, sont entourés de grilles ou de murs comme pour se protéger du bruit et de la pollution de la ville. Chacun a son style particulier. L’un privilégie les pelouses autorisées à tous, un autre préférera offrir ses parterres fleuris tirés au cordeau, un autre encore prendra un air un peu plus sauvage avec ses niches de verdure et d’autres encore offriront à leur public, la fraicheur d’un jet d’eau sur un bassin plus ou moins grand.
Appelé square, jardin ou parc, c’est toujours un espace vert. Et venir au jardin public, c’est se ressourcer, se sentir vivre au rythme de la nature et oublier pour un moment les tracas de la vie quotidienne.
Son évocation fait naitre pleins de souvenirs.  Je me rappelle, toute petite, quand accompagnée de maman, nous traversions le square du Palais de Justice, nous nous y arrêtions un moment avant de rentrer à la maison. Souvent nous y rencontrions un monsieur âgé, à la chevelure blanche, coiffé  d’un chapeau haut de forme, portant une veste longue, chamarrée et brillante descendant jusqu’aux genoux. Très droit, il marchait lentement à travers les allées, en s’appuyant sur une canne à pommeau d’argent ciselé. Quand il arrivait à ma hauteur, il s’arrêtait, sortait de sa poche, une petite bonbonnière dorée et me permettait d’y prendre une ou deux pastilles sous les regards bienveillants de ma mère qui se contentait de le remercier brièvement. Dans mes yeux d’enfant, il m’apparaissait comme un magicien surtout qu’il savait, me semblait-il, parler aux insectes. «Regarde là, par terre, tu vas voir la fourmi.» Et la fourmi courait sur la brindille que, du bout de sa canne, il avait mise sur le bord de l’allée. « Maintenant, le papillon vient te saluer ! » Et un beau papillon coloré venait se poser sur  la fleur. C’était magique.
Je me rappelle aussi l’autre jardin public, à l’autre bout de la ville, Place Bassompierre, beaucoup plus vaste, fermé par des grilles bordées à l’intérieur par des haies d’arbustes où se nichent les petits oiseaux qui chantent à tue-tête au moindre rayon de soleil. Mais sur un de ses côtés, il est bordé par La Charente qui, comme un cours d'eau ami, coule lente et paisible et se divise à sa hauteur en deux branches formant un ilot de verdure en son centre. Toute une rangée de saules pleureurs s’incline sur sa berge. De nombreuses espèces d’arbres ombragent le parc agrémentant les allées et découvrant par endroits, les parterres de fleurs et les espaces gazonnés. Là aussi, du haut de mes quatre ans, je fus subjugué par un vieux monsieur très respectable qui m’emmena faire le tour du jardin, me montrant les arbres et les fleurs, au grand dam de ma mère qui ne m’avait pas vu disparaitre, occupée qu’elle était avec ma petite sœur dans son landau. Elle me croyait déjà noyée dans la rivière. Notre aînée, guère plus âgée, sut tout de même lui dire que j’étais partie avec un monsieur, ce qui ne la rassura guère, pour autant. Mais je réapparus au bout d’une bonne trentaine de minutes, je crois, tenant la main de ce bon grand-père. Ma mère fondit en larmes en me serrant dans ses bras. Je n’en comprenais pas trop le pourquoi mais, chaque fois que nous revînmes dans ce parc, j’avais droit à un « souviens-toi, tu ne dois pas t’éloigner d’ici !» et d’ailleurs, nous allions plus près des attractions pour enfants : toboggan, balançoire. C’était plus facile de nous surveiller.
Plus tard, à mon tour, pendant le week-end,  j’emmenais les enfants pique-niquer dans le parc de la Roseraie où ils pouvaient courir à leur aise et se divertir sur les différents jeux mis à leur disposition : roue qui tourne, petit labyrinthe, mur d’escalade ou autre, ce qui me permettait de profiter de l’air pur et de lire un bon livre tout en gardant un œil sur eux .
Quelle que soit la génération, le jardin public reste un endroit de détente agréable pour tous et recherché par tous, une parenthèse dans le stress de la vie quotidienne, un vrai moment de bonheur.

Marie-Thérèse 
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Dans un village tout près de Paris
Dans une petite bourgade
Où tout foisonne
Treilles et pieds de chèvrefeuille
Jasmins  et vigognes
Sous les arcades, au soleil levant,
Frissonne
A chaque bourrasque
Et coup de vent
Cette voûte de verdure
Perlent des gouttes de rosée
Et des gouttes de pluie aux poutrelles lovées.

Dans les plates-bandes, près du parc,

Une allée de gravillons bleus
Autour des feuilles de bananiers ornementaux
Offre un petit coin de repos merveilleux.
Sur un banc comme dans une alcôve
Je laisse aller mes yeux
Où se jouent les rayons du soleil
Dans ce rouge rosé veiné de vert bronze
Un si joli camaïeu.

A mes pieds, des impatients du Gabon
Qui ont bien mérité leur nom
S’étalent prêts à prendre tout l'espace
En petites touches discrètes, puis en flaques…
Des fontaines florales d'où caracolent en cascades
Des pétunias aux corolles bien ouvertes
S'enroulent comme des liserons colorés
Réclamant juste un peu de respect

De l'égard et un regard pour leur beauté.
Un ensemble vibrant de jolies fleurettes
Petites tulipes rose framboise ou fuchsia
Blanches ou grenat
S'agrémentent et se marient souvent
Avec des géraniums-lierre tombant en avalanche
Aux petites fleurettes rouges, rose et blanche
Mêlées, entrelacées avec des bégonias,
Ils ne demandent qu'à être aimés
Et à rester dans leur fontaine groupés
Jusqu’à la fin de l’été.

Aux alentours du parc, ce ne sont qu'allers-venues
De nos amies les abeilles et de messieurs les bourdons.
Que d'insectes pollinisateurs bourdonnent
Vers la reine de beauté : les fleurs de la passion.
Elle offre ainsi ses étamines et sa jolie robe violacée
A tous ceux qui la découvriront
Cachée discrètement à l'ombre du muret
Attendant le bon moment pour offrir ses bourgeons
A qui sait attendre le fruit défendu...
Le fruit tant espéré.
Aux petites graines rouges comme des fruits de groseillier
Ève sera ainsi pardonnée de ses péchés.

Et sans y prendre garde, le petit coq français
Lancera son cocorico retentissant
Vers son adversaire juré : le coq blanc
Chacun ayant son territoire et son épouse préférée
Dans ce poulailler dont l'appartenance reste à être délibérée.
Ils ont leur importance auprès du public enfantin
Et il faudrait leur donner la parole afin que chacun
Puisse dire ô combien
Poules, coqs, canes de barbarie, cols-vert et lapins
Sont importants pour leur équilibre.

Il s'agit d'éduquer nos gamins
Nos enfants et  petits-enfants
Dans cet impérieux besoin
De respecter leur environnement
Dans le souci du lendemain.

Claudine
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L’allée verte

Un soir d’été, salle des fêtes à Gentilly, un bal est organisé par les anciens combattants de la guerre d’Algérie.
Nous y allons en famille. Il fait chaud, la musique bat son plein. Beaucoup de bruit, les hommes parlent de leur guerre, j’ai vraiment envie de prendre l’air.
Je pars avec mon petit garçon au milieu de la nuit pour rejoindre l’allée verte, promenade publique que je connais bien pour y avoir promené mon fils lorsqu’il était bébé. Elle est située entre le stade Charléty et le cimetière de Gentilly. De grands peupliers nous offrent une voûte de verdure où règne calme et fraîcheur. Je me promène tranquillement lorsque des policiers qui passent me demandent ce que je fais là : « Je prends le frais » leur dis-je. Ils me répondent que ce n’est pas la place d’une jeune femme avec un enfant de se trouver en pleine nuit dans un endroit aussi isolé. En jeune « provinciale », je n’avais pas compris qu’en ville ça craint, la nuit !

Josiane
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Je viens vous parler d’un jardin public dans lequel j’ai passé, pendant plus de quarante ans, des moments de ma vie.
Lorsque j’étais enfant, je passais souvent devant une propriété entourée de grands murs. On pouvait voir des arbres rares, certains étaient fleuris, qui haussés sur leurs racines pointaient le bout de leurs cimes comme pour regarder le va-et-vient des passants.
Cette propriété appartenait à la famille Debray. Le matin très tôt, l’on pouvait entendre le concert que donnaient les oiseaux, ce qui me faisait rêver du temps de mes jeunes années. Ne pouvant y pénétrer, j’imaginais des oiseaux fabuleux aux couleurs chatoyantes, des oiseaux lyres et l’oiseau bleu ? Etait-ce la forêt de Brocéliande ? Qui se cachait derrière ces murs ? Ou bien le jardin extraordinaire que chante si bien Charles Trenet ? Mystère…
Début des années 1970,  les murs furent abattus pour faire place au parc Debray qui s’ouvrit au public. Quel plaisir de découvrir ce lieu enchanteur au milieu des fleurs et de la verdure, un bassin dans lequel se mirent des magnolias tout de blanc fleuris, puis il fut rebaptisé « Le parc Pablo Picasso ». Des gardiens habitaient la maison, ils avaient un berger allemand imposant qui se prénommait : Pastis. Il reconnaissait les habitués mais aboyait sur d’autres ; cette maison est une crèche familiale à ce jour.
Deux belles charrettes entretenues par les ébénistes de la commune ainsi qu’un puits savamment fleuri faisaient la joie des petits et des grands. La première s’avérait être le décor idéal avec le puits tous deux fleuris avec soin. Que de photos de famille et de mariage ont été prises à ces endroits idylliques. Quant à la deuxième, au milieu du sable à côté d’une aire de jeux, quel plaisir prenaient les enfants qui pouvaient s’installer à l’intérieur ! Certains sont âgés d’une cinquantaine d’années à ce jour mais en regardant les photos, ils se souviennent de cette charrette de leur enfance.
Pendant ces quarante ans dans ce parc de rêve avec les enfants, petits-enfants et d’autres petits, je me relaxais un moment. Des amies, des voisines venaient me retrouver avec leurs enfants ou seules. Ce lieu magique a changé au fil des temps, c’est moins calme sauf le matin. J’y reviens parfois pour lire et admirer ce que la nature  nous offre, les oiseaux qui viennent nous demander de partager avec eux notre goûter, nous pouvons regarder les canards du bassin, les poissons et les tortues selon les années ; l’on peut aussi voir des oiseaux de basse-cour qui résident dans un poulailler.
Dès avril, c’est un défilé de mariés dont on peut admirer les toilettes pendant qu’ils se font photographier. L’été, les repas recommencent le jeudi pour les retraités pour un moment convivial ; les fêtes, les concerts, les poésies accrochées aux arbres, c’est sympa.
Que d’heures passées avec ceux que j’aime, certains ne reviendront plus mais j’entends encore le son de leurs voix, les confidences mutuelles échangées tout en fabriquant des tricots et nos enfants qui jouaient joyeusement sous nos regards attendris. Nous avons partagé des joies, des peines et des moments de tristesse. Combien de mamans se reconnaîtront dans cet écrit.
Il y aura encore de bons moments partagés pour d’autres générations à venir, sous le regard protecteur de ces géants parfois fleuris, que sont ces arbres magnifiques.

Mireille





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