samedi 28 septembre 2019

ETRE MERE - L'INSTINCT MATERNEL

Elisabeth Badinter
L’instinct maternel existe-t-il ? Je vous ai fait part il y a quelques temps de l’admiration que j’éprouve pour Simone Veil, aujourd’hui je vais faire référence à une autre femme  qui a compté pour moi. Il s’agit d’Elisabeth Badinter, philosophe, auteure et féministe dont le livre « l’amour en plus » a bouleversé mes convictions de jeune sage-femme.  Pour elle l’instinct maternel n’est qu’une construction culturelle alors que pour beaucoup l’instinct maternel serait à l’origine du désir d’enfant. Pour Elisabeth Badinter il ne s’agit que d’un subterfuge, elle argumente en démontrant que le désir d’enfant n’est pas présent chez toutes les femmes, même s’il me semblait en ce qui me concernait à ce moment là que le fait relevait d’une évidence. Effectivement on ne peut que constater le nombre d’enfants autrefois mis au monde pour jouer le rôle de compensation, de jouet ou d’accessoire de leur mère. Combien d’enfants encore de nos jours sont abandonnés à eux-mêmes ou maltraités ? La philosophe cherchait à l’époque à renouveler l’image de la mère perçue encore par certains comme l’image d’une femme épanouie ne rencontrant pas de problème face à l’enfant, ce qui est encore aujourd’hui bien loin d’être la réalité. La société paraît plus interpellée par les femmes qui mesurent leurs responsabilités que par celles qui les ignorent. Face à ses détracteurs Elisabeth Badinter insiste, encore aujourd’hui, sur le fait que la femme n’est pas un chimpanzé ! Elle insiste également sur ce qu’elle considère comme des facteurs dominant de la maternité, c'est-à-dire notre expérience de la vie, notre inconscient et notre enfance. Des scientifiques ont fait des recherches sur l’attachement mère-enfant. Tout récemment encore j’accompagnais Manon dans ses études de puéricultrice et j’ai eu l’occasion de lire pas mal de choses sur le sujet, aucune recherche n’a pu prouver qu’il y avait un lien biologique dans l’attachement mère-enfant. Pour Elisabeth Badinter c’est le mélange de volonté, de puissance et d’amour qui forme ce que l’on appelle instinct maternel. Les comportements complexes comme le maternage, et l’on commence à parler de paternage, ne sont jamais prédéterminés génétiquement, par contre il est maintenant reconnu que l’environnement social joue un rôle déterminant dans l’amour maternel, de même que le soutien que la mère va ou non recevoir.  J’espère ne pas vous avoir gavées avec mon texte mais moi j’ai adoré traiter du sujet.

Fabienne
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L’instinct maternel n’est pas inné comme souvent on pense le croire. Plus qu’un instinct que possède les animaux, c’est un sentiment qui se développe quand l’enfant futur est désiré, que ce soit avant la conception ou pendant la grossesse. Ce n’est pas le cas des femmes qui n’en veulent pas ou sont dans le déni. Et leur enfant devenu grand saura bien exprimer cette frustration, et cette distance ressentie vis-à-vis de leur mère comme Hervé Bazin l’a si bien décrit  dans Vipère au poing.
Par contre,  la naissance de l’enfant est toujours une joie quand elle est attendue. Son arrivée est alors un évènement plein d’émotions que partagent famille et amis. Le nouveau-né est alors montré, choyé et câliné. Et tous de s’extasier, chacun de chercher une ressemblance au père, à la mère ou à tout autre membre de la famille. La maman ressent alors un sentiment de fierté et de bonheur qui décuple son amour pour son bébé.  Quelle joie de le prendre dans ses bras, de parfois l’allaiter ou lui donner le biberon dans un contact charnel si fort. A cause de sa fragilité même, la jeune femme devenue mère éprouve le besoin de le protéger. Et son amour maternel va grandir et se transformer au fur et à mesure de sa croissance. Ses moindres petits gestes vont décupler chez elle, une charge émotionnelle intense. Comment résister à deux petits bras qui s’enlacent autour du cou ou à la demande de caresses  ou de baisers ?
Et quand il rentrera à l’école, viendront les premiers  dessins qu’il rapportera à la maison, et qui seront accueillis par des compliments et des embrassades puis ce seront  les  petits cadeaux de fête des mères ou de Noel que le petit aura réalisé avec l’aide de la maitresse. Ce seront les colliers de pâtes ou les boites d’allumettes décorées ou même la photo de l’enfant dont il a savamment bariolé le cadre et l’offrant triomphalement, attendant en échange  un geste d’amour : se serrer dans les bras de sa maman qui l’aime et qui l’embrasse et lui dit à l’oreille tant de mots gentils pour le remercier. Certaines mères le couvriront de baisers et d’autres seront plus chiches dans les démonstrations affectives mais toutes ressentiront au plus profond de leur être, leur désir de le protéger et cet amour qui les inonde en le voyant. 

Marie-Thérèse
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Une histoire qui m'a émue aux larmes.
Ça s'est passé pendant la guerre du Vietnam. 
Entre amourettes qui passait par là :
J'ai perdu la tête et maintenant voilà"
Une chanson qui en dit long.
Sur le métissage, la politique
Et le qu’en-dira-t-on.


À l'époque comme maintenant
Ce n'était pas aisé
De se retrouver avec un nouveau-né.
Entre deux monde écartelé.
Né d'un père américain made USA
Et de son autochtone d'infirmière
Qui lui a fait une impression particulière

Arrive ce qui devait arriver
Quand la guerre fut terminée
Le jeune premier embarque dans un avion-cargo
Abandonnant sur place sa famille américano-asiatique
Tout en faisant de fausses promesses
Sachant pertinemment que sa dame
L'attendait aux States.
Alors qu'il a engrossé une jeunette de 17 ans.
Attitude et comportement décevants. 

La jeunette finit par épouser son médecin
Qui lui ne lui fait pas faux bond et, serein,
Reconnaît l'enfant qui entre temps
Est accueilli dans un couvent :
Un orphelinat qui bloque le processus de régularisation
Embarrasse dans la paperasse le couple abusé
Et finit par céder l'enfant à l'adoption
Par un couple français.

Il y aurait de quoi rager quand l'enfant devenu grand
Tente de retrouver ses origines eurasiennes.
Il a fondé une famille, se retrouve chef de rang :
Père de famille et possède un bon métier
Quand il décide de joindre son géniteur de père
A l'étranger qui lui transmet les coordonnées
De sa famille recomposée et évidemment de sa mère
Qui une fois contactée tombe des nues et se met à pleurer

Les deux familles décident de se retrouver.
Difficile de discuter du passé
Les questions de rigueur vont arriver
Le plus que quadragénaire demande des preuves
Et ne peut s'empêcher de se montrer sceptique
Quand le médecin ex-mari actuellement de la maman biologique
S'empresse de présenter.
La demande de "réintégration" de l'enfant sur le territoire
Anglo-saxon.
Que d'émotions!
Que de sentiments contraires
Quand il s'agit de recomposer une histoire
Une tranche de vie.

L'avenir dira si les deux familles se retrouveront bientôt aux States
Lors d'un déménagement et que le quadra retrouvera une maman

Qui n'a apparemment jamais oublié son petit gars.

Claudine
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On peut parler de l'instinct maternel, paternel et aussi animal car certains animaux sont capables de sauver et de choyer leur progéniture de façon émouvante, dans des situations critiques.
Dans la vie courante, les mères agissent en fonction de multiples paramètres : reproduction du schéma familial, abandon, refus de maternité, déni de grossesse, joie de maternités épanouissantes...il s'agit de la vie privée, intime des familles.
La littérature abonde en exemples plus ou moins autobiographiques, illustrant cette thématique : les mères adorées ou haïes sont légion : Marcel Proust était proche de sa mère : " Ma seule consolation, quand je montais me coucher, était que maman viendrait m'embrasser quand je serais dans mon lit. Mais ce bonsoir durait si peu, elle redescendait si vite, que le moment où je l'entendais monter puis où passait dans le couloir à double porte le bruit léger de sa robe de jardin en mousseline bleue, à laquelle pendaient de petits cordons de paille tressée, était pour moi un moment douloureux " Marcel Proust, 1913. A la recherche du temps perdu.
Une mère peut être capable d'un dévouement extraordinaire : La mère de Gorki, se sacrifie pour son fils Pavel, le sauve de la prison, devient une véritable militante socialiste jusqu'à son arrestation.
Malheureusement, les enfants ne sont pas toujours à la fête : Le bal d'Irène Némiroski relate le calvaire d'Antoinette, jeune fille craignant et subissant en silence, les remontrances maternelles. La mère s'oppose à sa présence au bal, en la rabaissant, en lui ordonnant d'aller se coucher dans la lingerie. Déboussolée, en larmes, elle doit passer inaperçue, si bien qu'elle veut mourir ....
L'auteur sera déportée, périra en camp de la mort, tandis que sa mère l’ignorera et finira ses jours à Cannes, à l'âge de cent-deux ans.
Mère courage de Bertolt Brecht, narre les pérégrinations de cette femme, de champ de bataille en champ de bataille : pour gagner quelques sous, elle perd toute sa famille. La guerre lui prend ses enfants. Elle se dit alors qu’il ne lui reste plus rien à vendre et que plus personne n'a rien pour acheter ce rien ".
Poil de Carotte de Jules Renard, un roman autobiographique relate de façon poignante, le calvaire de l'enfant non désiré, maltraité : l'enfant tente de mourir en enviant les orphelins.
Vipère au poing d'Hervé Bazin, est un ouvrage haut en couleurs : Folcoche fait pleuvoir sur ses fils brimades punitions, humiliations.
Que dire du Sagouin de Mauriac, du calvaire de Gillou issu d'une mésalliance, disgrâcié physiquement, si sale, si arriéré que sa mère l'appelle le "sagouin ".
Enfin, le récit autobiographique de Gilles Paris relate le parcours chaotique d’Icare, garçon âgé de neuf ans, surnommé Courgette, vivant seul avec sa mère handicapée qui ne vit que pour la bière et la TV. Au plus profond de son désespoir, l'enfant voulant tuer le ciel, tua sa mère. Icare sympathise avec un gendarme, va dans un orphelinat et sera finalement adopté par Raymond, le gendarme au grand cœur.
Je termine par un hommage à toutes les mamans au cœur douloureux ou joyeux :
"Il y a plus de fleurs
Pour ma mère en mon cœur
Que dans tous les vergers.
Plus de merles rieurs
Pour ma mère en mon cœur
Que dans le monde entier
Et bien plus de baisers
Pour ma mère en mon cœur
Qu'on en pourrait donner "
Maurice Carême, 1947.

Marie-Christine
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Un sacré métier à hauts risques que d'être une mère.
Une course d’obstacles sur le long terme. Autant bien s'atteler et surtout ne jamais abandonner. Il s'agit d'être la meilleure sur le marché des mamans. S'il y avait une bourse de change : le marché serait très fluctuant. Chacune revendiquant le titre et n'hésitant pas pour certaines à vous rabaisser. Une attention de toutes les secondes, au jour le jour et toute une vie durant. Une seule erreur vous met sur le banc des "mauvaises mamans ou de celles qui ont fauté!"
Une remise en question, une remise à niveau et des questionnements en permanence. Question de tempérament et surtout de sentiment.
On arrive à ce fameux instinct que certaines possèdent spontanément, au premier regard, lors de la première caresse de la peau veloutée de bébé...Une étincelle dans les yeux et dans le cœur quand ce dernier naît ! On l'a attendu, on s'y est préparée, on a en principe tout prévu : de la literie aux couches en passant par le stérilisateur et la valise contenant le trousseau du premier ou dernier-né. On observe avec plus ou moins d'anxiété la petite merveille disparaître entre les mains de la puéricultrice ou de l’auxiliaire de puériculture. On aimerait bien assister à sa première toilette : ses ablutions selon le culte et ses premiers soins. Remplacée! Presque frustrée que le papa prenne la relève ou encore reste complètement déboussolé face à la nouvelle tâche qui lui incombe.
Mais cet état de fait : cet instinct qui pourrait apparaître si naturel, pourrait carrément se retrouver au bureau des abonnés absents. Ce fameux instinct qui vous hisserait au premier plan : au rang de nouvelles mamans! Ce sentiment de fierté mêlé d'étonnement et d'incrédulité, de stupeur et de stupéfaction d'avoir pu procréer. Des sentiments mêlés avec un petit grain de jalousie, de supériorité qui font de vous : the wonderful mother! Et d'être félicitée! De faire connaissance avec ce petit être qui grandissait en vous. Enfin avoir la priorité de pouvoir admirer, toucher, contempler, observer ce petit être tout empaqueter comme un joli cadeau. Un vrai bonheur.
Mais pas pour toute une chacune. Neuf mois serait nécessaire pour passer de l'état de plus ou moins jeune femme, et de plus en plus des adolescentes, sans vraiment de responsabilité à jeune maman qui doit se consacrer entièrement à sa petite chose. Enfanter n'est vraiment ni chose facile ni aisée. Surtout quand il y a viol, inceste, déni, prématurité ou encore malformation et infirmité. Des volets qui s'avèrent difficiles à aborder. Des pédopsychiatres spécialisées dans le relationnel, des assistantes sociales et des structures heureusement peuvent s'y consacrer. Mais pour combien de temps encore car les budgets alloués pour ces prises en charge ont tendance à diminuer comme peau de chagrin, voire à disparaître.
Il existe des foyers afin d'apprendre ou de distiller ce fameux instinct à des femmes ayant vécu des violences sexuelles ou encore n'ayant pas disposé de suffisamment de temps pour se familiariser avec la venue prématurée de leur bébé ayant ignoré leur grossesse. Certaines «réussissent les tests de réadaptation» et la rééducation avec brio en se battant bec et ongle pour leur progéniture, quand d'autres voient leur enfant placé dans une famille d'adoption. Certains articles relatent encore malheureusement d'une façon trop récurrente avoir trouvé des nouveau-nés ou des nourrissons dans des poubelles ou abandonnés en pleine nature. Triste départ dans la vie pour ces petits qui n'ont aucunement demandé à naître. Mais certaines mères qui ont donné leur enfant en adoption laissent des indices qui leur permettront de retrouver les traces de leur mère biologique s'il le désire par la suite. On est loin de connaître toutes les motivations de ces dernières qui n'ont pu ou su élever leur(s) bébé(s) avec tout l'amour qui en découlerait. On-t-elle manqué d'instinct maternel ou encore ne leur a-t-on pas laissé le temps de tisser des liens avec leur petit? À chacun ses raisons et il y a suffisamment de personnes dans le jugement pour s'occuper de la vie d'autrui. Laissons-leur la liberté de se retrouver face à leurs regrets ou leurs remords. Et le poids de la conscience on fait taire bon nombre de mamans d'antan se retrouvant fille mère et à qui on a ôté le fruit de leur entrailles. Quitte à ne jamais arrêter de penser une seconde de leur vie à ce petit être ayant vécu en dehors du foyer actuel où d'autres enfants ont été conçus dans l'amour et la sérénité. Et ce sans s'être résolue à admettre et avouer l'existence de ce dernier ou premier-né à ses enfants issus d'une autre couche. Le poids de la réputation dans un petit bourg pèse comme une charge de plomb et une relation de jeunesse peut changer une vie à jamais. 

 Claudine
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L'instinct maternel, vaste sujet...
Peut-on employer le mot «instinct» pour parler de l'intérêt qu'une femme témoigne à son enfant, ne serait-ce pas plutôt tout simplement de l'amour. Le mot «instinct» me fait penser au monde animal qui régit ainsi sa vie, incapables que sont les animaux de réfléchir, de se projeter et de ressentir des sentiments comme l'être humain.
Cependant, et même si cela peut sembler surprenant, certaines mères ne portent aucun intérêt à leur enfant, une raison de plus s'il en fallait pour ne pas parler d’instinct. Est-ce que cette attitude découle de leur vécu, de leur rapport vis-à-vis de leur propre mère, je ne suis pas assez renseignée sur la question pour me permettre de trancher sur ce sujet. De même,
certaines femmes ne ressentent pas l'envie d'être mère, d'autres encore disent ne pas aimer les enfants, voilà aussi pourquoi je pense qu'on ne peut pas parler d'instinct.
De nos jours, on remarque que les hommes s'impliquent de plus en plus dans l'éducation de
leurs enfants. Ils n'hésitent plus à se promener avec la poussette, à changer les couches, à donner les biberons et à se lever la nuit. Dans le passé toutes ces tâches incombaient aux femmes qui les assumaient seules. Peut-on parler là encore d'instinct paternel, je ne pense pas, c'est juste de l'amour qui est ainsi témoigné au grand jour par les parents. Ce changement dans les mœurs vient peut-être du fait que le père est à présent d'avantage  associé à la naissance de son enfant, il suit les différentes étapes de sa croissance, de la première échographie jusqu'à sa naissance.
Malgré leur différence de comportement, les animaux manifestent à leur façon un certain intérêt pour leur progéniture. L'exemple qui me vient en tête est tiré du film  «la marche de l'empereur». On y  assiste au cycle de reproduction d'un couple de manchots en particulier,  à leur lutte pour survivre, à leur quête de nourriture, à  la protection qu'ils apportent tour à tour à leur petit, un film à la fois émouvant et triste. De même, dans le monde animal, dès qu'un petit est jugé sans espoir de vie normale, il est rapidement rejeté par la mère qui l'abandonne. Si on peut comprendre son geste vis-à-vis d'un jeune qui sera incapable de lutter pour survivre, il nous paraît impossible d'agir ainsi avec nos propres enfants en difficulté, c'est là toute la différence.
En conclusion, je dirai que les couples ne souhaitant pas d'enfant, ou disant ne pas les aimer sont rares, du moins à ce qu'il me semble. Et c'est fort heureux pour la continuité de l'espèce humaine.

Paulette


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